« éterniser », définition dans le dictionnaire Littré

éterniser

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

éterniser

(é-tèr-ni-zé) v. a.
  • 1Faire durer sans fin. [Que] Le ciel, grand conquérant, éternise tes jours ! Rotrou, Bélis. I, 2. Il ne faut pas que le roi se persuade que ce palais superbe qui occupe aujourd'hui tant d'esprits et qui lasse tant de mains, éternise son nom, Ménage, Préface aux œuvres de Malherbe. Cet ouvrage est un monument qui éternisera sa honte, Fénelon, Tél. XXII. Ils cherchent à éterniser sa mémoire par des titres et des inscriptions, Massillon, Car. Riche. Ce n'est point un tableau, c'est une estampe ; cela n'est fait qu'avec du noir de fumée, on en tire cent copies en un jour, et ce secret éternise les tableaux que le temps consume, Voltaire, Dial. XII. Heureux qui, satisfait de lumières bornées, à d'utiles travaux consacre ses années, Ignorant le désir d'éterniser son nom, Gilbert, Ode au roi. Qu'une haine éternelle éternise la guerre ! Delille, Én. IV. De vengeance affamé, constant dans son courroux, Voudrait-il, prolongeant son effroyable joie, Ainsi que sa colère éterniser sa proie ? Delille, Parad. perdu, X.

    Éterniser se dit aussi de la durée indéfinie d'une race, d'une famille. S'il vous faut de Bélus éterniser le sang, Si la jeune Azéma prétend à ce haut rang, Voltaire, Sémir. II, 7. Je veux dans ma famille éterniser l'empire, Legouvé, M. de Nér. IV, 5.

    Donner une gloire sans fin. Ou que d'un beau trépas la mémoire durable, Éternisant des jours si noblement finis…, Racine, Phèdre, III, 5. Cette supériorité qu'une régence mémorable éternisera dans nos annales, Massillon, Or. fun. Madame.

  • 2Prolonger indéfiniment, traîner en longueur. Éterniser un procès. D'abord sa politique, assurant sa puissance, Semblait d'un fils docile éterniser l'enfance, Voltaire, Henr. II. Dion proposait-il des voies d'accommodement avec Denys, on le soupçonnait d'intelligence avec ce prince ; cessait-il d'en proposer, on disait qu'il voulait éterniser la guerre, afin de perpétuer son autorité, Barthélemy, Anach. ch. 60.
  • 3S'éterniser, v. réfl. Se donner une durée sans fin. Il aurait voulu pouvoir s'éterniser sur la terre dans l'usage des voluptés, Massillon, Car. Avenir. Vous voudriez vous éterniser dans cette vallée de larmes, Massillon, Car. Riche.

    Se perpétuer. C'est ainsi que les abus s'éternisent. Puisse votre maison s'éterniser, comme vous avez immortalisé votre nom ! Voltaire, Lett. Richelieu, 11 fév. 1764.

    Se donner une renommée éternelle. Pour vous éterniser sous ces arcs glorieux Qu'une savante main taille aux victorieux, Tristan, Mort de Chrispe, I, 3.

    Familièrement. Rester longtemps, trop longtemps. Le cardinal Fleury s'éternisa au ministère. On aurait cru qu'il voulait s'éterniser chez nous.

HISTORIQUE

XVIe s. Je veux brusler, pour m'envoler aux cieux, Tout l'imparfait de mon escorce humaine, M'eternisant comme le fils d'Alcmeine, Ronsard, 89. Tousjours, tousjours, sans que jamais je meure, Je voleray cyne par l'univers, Eternisant les champs où je demeure De mes lauriers honorez et couvers, Ronsard, 576.

ÉTYMOLOGIE

Bas-latin, æternisare, de æternus, éternel (voy. ÉTERNEL).