« camus », définition dans le dictionnaire Littré

camus

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

camus, camuse

(ka-mu, ka-mu-z' ; l's ne se lie pas dans la conversation) adj.
  • 1Qui a le nez court et plat. Pour toi, Socrate, tu n'étais qu'un pauvre homme, laid, camus, chauve, Fénelon, XIX, 187. Ils déclarent qu'on ne peut être camus sans avoir de nez, Voltaire, Phil. II, 169.

    Un nez camus, un nez court et plat. Il [mon nez] n'est ni camus, ni aquilin, ni gros, La Rochefoucauld, Portrait.

    Se dit aussi de certains animaux. Un chien camus. Cheval camus, cheval dont le chanfrein offre une espèce d'enfoncement.

  • 2 Fig. et familièrement, embarrassé, interdit. …Et n'est Nostramus Qui l'astrolabe en main ne demeurât camus, Régnier, Sat. X. Oui, Charlotte, je veux que Monsieur vous rende un peu camuse, Molière, Don Juan, II, 5.

    A côté de demeurer camus, on dit aujourd'hui avoir un pied de nez ; de sorte que des images toutes contraires peuvent cependant exprimer la même pensée ; l'idée fondamentale est toujours celle d'une disproportion ridicule dans l'endroit le plus apparent du visage.

    Camus en chien d'Artois, camus comme un chien de Boulogne, cela se disait de quelqu'un fort interdit de se voir trompé dans son attente. Le chien d'Artois, le chien de Boulogne est une variété de carlin. Madame votre fille est pleurante en un coin ; Monsieur votre neveu grommelle sur du foin, Camus en chien d'Artois d'avoir compté sans hôte, La Fontaine, Je vous prends sans vert, 14.

  • 3 Substantivement. Un camus, une camuse, une personne qui a le nez camus.
  • 4Un des noms du dauphin (poisson).

HISTORIQUE

XIIIe s. D'entre les sorcix [sourcils], à compas, Muet [meut, sort] ses nes trop haut ne trop bas ; N'est pas camuse ne bekue, Bl. et Jehan, 265. Trop grans mamieles font les enfans camus devenir, quant par deseur le nes les metent, Alebrand, f° 30.

XIVe s. Une paire de cousteaulx camus, à deux virolles d'argent, De Laborde, Émaux, p. 231. Je croi qu'il n'ot si laid de Resnes à Disnant ; Camus estoit et noir, malostru et nuisant, Guesclin, V. 55.

XVe s. Si en furent camus les conseilleurs, mès aultres y cuiderent ruer qui y faillirent, Chastelain, Chr. des d. de B. 2e p. ch. 8.

XVIe s. Voilà une belle response, ce me semble, et des harangueurs bien camus, Montaigne, I, 189. Il est demeuré tout camus, pour dire que quelqu'un est demeuré tout honteux, H. Estienne, du Nouv. lang. fr. p. 475. Voulez-vous en françois braver un homme, vous dites que vous le ferez bien camus, ou que vous lui rendrez le nez aussi plat comme une andouille, Pasquier, Recherches, liv. VIII, p. 694, dans LACURNE. La ligue se trouvant camuse, Et les ligueurs fort etonnés Se sont avisés d'une ruse ; C'est de se faire un roi sans nez [Sur l'élection du duc de Guise qui était camus], Sat. Ménippée.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. camus, gamus, niais, sot ; ital. camuso, camoscio. Origine incertaine. On a indiqué le celtique cam, courbé ; mais, comme le remarque Diez, un suffixe us n'existe pas dans les langues romanes ; dès lors il est porté à y voir un mot composé ca-mus, où mus se rapporte à l'italien muso, français museau, et où il y aura un préfixe ca, peut-être péjoratif (voy. CA préfixe). D'autres l'ont rapproché de l'italien camoscio, espagnol camusa, chamois ; le chamois, comme la chèvre, pouvant être dit camus ; la forme des mots parle pour cette dernière étymologie.