« capable », définition dans le dictionnaire Littré

capable

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

capable

(ka-pa-bl') adj.
  • 1Qui peut contenir en soi, au propre et au figuré. De dire si peu d'un sujet si capable, Régnier, Sat. I. De toutes les figures c'est la ronde qui est la plus capable, c'est-à-dire qui a le plus de superficie, Descartes, Météor. 5. Quelques paroles ambiguës d'une de ses lettres, qui, étant capables d'un bon sens, doivent être prises en bonne part, Pascal, Prov. 16. Tout genre d'écrire reçoit-il le sublime, ou s'il n'y a que les grands sujets qui en soient capables ? La Bruyère, 1. La brèche était capable pour deux bataillons de front, Saint-Simon, 278, 8.

    Terme de géométrie. Segment capable d'un angle, segment de cercle tel que tous les angles qui y sont inscrits soient égaux à ce premier angle.

  • 2 Fig. En parlant des personnes ou des choses personnifiées, qui peut admettre une chose, qui est apte et propre ou disposé. Les plus impies sont capables de la grâce de leur rédemption, Pascal, Vrai bien, 22. Quelque étendue d'esprit que l'on ait, l'on n'est capable que d'une grande passion, capable de peu et de beaucoup, de tout et de rien, Pascal, dans COUSIN. Votre vertu dont notre siècle n'est pas capable sera à la fin reconnue, Guez de Balzac, Liv. II, Lett. 19. Une joie dont je ne devrais être capable qu'en votre présence, Voiture, Lett. 61. Si Dieu ne dédaigne de juger ce qu'il a créé capable d'un bon et d'un mauvais choix, Bossuet, Anne de Gonz. Suivant les sentiments dont vous êtes capable…, Corneille, Mort de P. III, 2. Et si je vous croyais capable de raison…, Corneille, Agés. IV, 3. Moi ! voilà les soupçons dont vous êtes capable, Racine, Brit. V, 6. De quel crime un enfant peut-il être capable ? Racine, Ath. II, 5. Ses transports dès longtemps commencent d'éclater ; à d'inutiles cris puissent-ils s'arrêter. - Quoi ! de quelque dessein la croyez-vous capable ? Racine, Brit. III, 1. Eurymaque savait la guerre ; il était capable d'affaires, Fénelon, Tél. XVI. Au lieu de faire des vices de l'homme des peintures affreuses ou ridicules qui servissent à le corriger, les stoïciens lui ont tracé l'idée d'une perfection et d'un héroïsme dont il n'est pas capable, et l'ont exhorté à l'impossible, La Bruyère, 11. Ceux qui font profession des arts libéraux ou des belles-lettres, les peintres, les musiciens, les orateurs, les poëtes, tous ceux qui se mêlent d'écrire ne devraient être capables que d'émulation, La Bruyère, ib. L'imagination, si capable alors [dans la jeunesse] de séduction, Massillon, Panég. St Benoît. Quelque capable que fût son esprit de toutes sortes d'affaires…, Fléchier, Panég. II, 392. Capable d'une erreur, il ne l'est point d'un crime, Voltaire, Alz. V, 2.

    Être capable de tout, être homme à se porter aux dernières extrémités. Apprenez qu'Orosmane est capable de tout, Voltaire, Zaïre, IV, 2.

    Avec de et un infinitif, dans le même sens qu'avec un substantif. Est-ce que l'honnête homme est capable de mentir ? Il n'est rien que les hommes ne soient capables d'entreprendre. Ceux qui, ne comprenant pas d'abord cette double infinité, sont capables d'en être persuadés, Pascal, Pensées, part. I, art. 2. Madame, voyez donc si vous serez capable De rendre également ce peuple raisonnable, Corneille, Nicom. V, 2. Vous prenez plaisir à vous instruire et à vous rendre capable de profiter des bontés que l'on pourra avoir pour vous, Racine, Lettres à son fils, 25. Trop capable déjà de sentir son malheur, Voltaire, Zaïre, II, 3.

  • 3Capable de, avec un infinitif, en parlant des choses, qui peut. Que votre procédé est violent, mon père, mais qu'il est peu capable de réussir ! Pascal, Prov. 18. Partout où sa présence est capable de nuire, Molière, l'Étour. V, 2. Ce changement d'habit est assez capable, je crois, de me déguiser, Molière, le Médec. malgré lui, III, 1. Il [Jésus-Christ] a mis dans son église une autorité seule capable d'abaisser l'orgueil et de relever la simplicité, Bossuet, Anne de Gonz. Je vous ai mis entre les mains assez de livres français capables de vous amuser, Racine, Lettres à son fils, 11. Quand vous auriez tous les talents les plus capables de lui faire honneur, Massillon, Amb. des clercs. L'exercice et la tempérance sont capables de conserver aux vieillards quelque chose de leur première jeunesse, D'Olivet, Pensées de Cicéron.
  • 4Qui a de la capacité, habile. Hommes capables et judicieux. Cette cicatrice semblait ajouter à son visage quelque chose de capable, Hamilton, Gramm. 7.

    Air capable, air d'un homme qui présume trop de son habileté.

  • 5Qui a la capacité légale. Capable de tester. Les calvinistes étaient déclarés capables de toutes les charges et dignités de l'État, Voltaire, Louis XIV, 36.
  • 6Substantivement et familièrement. Faire le capable, se donner l'air d'une plus grande capacité que celle que l'on a réellement. Pourquoi subtiliser et faire le capable ? Molière, le Dép. I, 1.

REMARQUE

Des grammairiens ont prétendu que capable, en parlant des choses n'ayant qu'un sens physique, on ne pouvait dire, par exemple : un propos capable de nuire. C'est une observation mal fondée ; voyez les exemples de bons auteurs.

HISTORIQUE

XVIe s. Une escuelle bien capable et profunde, Rabelais, Garg. I, 20. Mes forces ne sont pas capables d'un tel dessein, Montaigne, Au Lect. p. X. À qui on a esté une fois capable, on n'est plus incapable, Montaigne, I, 94. Les premiers sieges sont communement saisis par les hommes moins capables, Montaigne, I, 168. Un bastiment capable de deux ou trois cents ames, Montaigne, I, 237. Il est capable de changer d'opinion et d'advis tous les mois, s'il plaist à la coustume, Montaigne, I, 369. Les loix ne veulent pas qu'un homme soit capable du maniement de ses biens, qu'il n'ait vingt-cinq ans, Montaigne, I, 407. Un seul [animal] est capable de desfaire un grand nombre d'hommes, Montaigne, II, 171. On feroit ceste tranchée capable de dix mille hommes, Lanoue, 448. Il a un esprit capable d'apprendre et de comprendre, Lanoue, 496. L'homme est entre toutes les creatures seul capable de vertu, Lanoue, 506. Je m'efforçai de lever les deffiances, assurer chacun, rendre tous mes sujets capables de mon intention, D'Aubigné, Hist. II, 243. Si la femme pendant quarante jours n'a renoncé solennellement, elle est capable [responsable] et poursuivable des debtes de son mary, Coustumier génér. t. I, p. 751. Nous estimons les avoir rendus capables [les avoir instruits] de la droite intention du roy, Mém. de Bellièvre et de Sillery, p. 143, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. capable ; bas-lat. capabilis, de capere, contenir (voy. CAPTURE) : qui peut contenir.