« certes », définition dans le dictionnaire Littré

certes

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

certes

(sèr-t') adv.
  • Certainement, en vérité, à coup sûr. En quoi certes personne ne le surpassa jamais, Vaugelas, dans BOUHOURS. Certes, messieurs, le barreau n'a vu que trop de ces malheureux, Patru, Plaidoyer, dans BOUHOURS, Nouv. rem. Mais certes c'en est trop d'aller jusqu'à la joie, Corneille, Hor. I, 1. Certes l'exemple est rare et digne de mémoire, Corneille, ib. IV, 2. Certes les chrétiens ont d'étranges manies, Corneille, Poly. IV, 5. Certes plus je médite, et moins je me figure Que vous m'osiez compter pour votre créature, Racine, Brit. I, 2.

REMARQUE

On trouve peu d'exemples de certes écrit sans s ; Ménage en rapporte un de Michel Marot : J'ai trouvé certe une chose bien rare Au cabinet de mon père Marot, En voici un de Molière : Cela certe est fâcheux. - Oui, plus qu'on ne peut dire, Tart. IV, 5.. Cette licence a été prise aussi par V. Hugo : Certe on peut parler de la sorte, Quand c'est au canon qu'on répond, Orient. 35.

HISTORIQUE

XIe s. Non ferez certes, dist li quens Oliviers, Ch. de Rol. XVIII.

XIIe s. Certes, dit Charles, trop avez mal talent, Roncisv. 14. Certes, dame, moult s'honneure Qui courtois est contre tort, Couci, IV. Diex ! tant avons esté preus par huiseuse [oisiveté] ; Or verra on qui à certes ert [sera] preus, Quesnes, Romanc. 94. Par Dieu, vassal, jel [je le] di pour vous gaber ; Cuidiez-vous donc qu'à certes [je] le vous die ? ib. 108. Certes, seigneur, dist-il, trop tost le saura on, Sax. XX.

XIIIe s. La royne me pria si à certes comme elle pot, Joinville, 171.

XVe s. La fille lui respond : Certes, mere, nenni, Louis XI, Nouv. XI. Vous voyez bien que c'est à certes [pour tout de bon], quand de rechef s'est apparu l'ange vers moi, Louis XI, ib. Chargeant à chacun, par exprès et bien à certes, qu'il ne faille pas à son heure assignée, Louis XI, ib. XXXIV.

XVIe s. Aucuns personnages m'ont amiablement, mais acertes, adverty que…, Du Bellay, M. 311. Socrates avoit seul mordu à certes au precepte de son Dieu : de se cognoistre, Montaigne, II, 62. J'en vaulx certes bien mieulx, Montaigne, II, 83. Il ne pouvoit croire qu'ils eussent parlé à certes [sérieusement] d'une si vaine matiere, Montaigne, II, 239. Quand Platon escript selon soy, il ne prescrit rien à certes, Montaigne, II, 244. Quand il vit qu'ilz parloient à certes, il leur monstra du doigt le camp des Romains, Amyot, Lucull. 19. Elle luy respondit magnanimement certes, sans se troubler ny estonner, Amyot, Dion, 25.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. et anc. espagn. certas ; catal. certes. Il y avait l'ancien adjectif cert, dont certes, certas, est le pluriel féminin. La locution complète est à certes, que l'on trouve en effet, et sous-entendu un substantif indéterminé féminin pluriel, comme voies, manières, choses ; elle suppose une forme latine a certis ; c'est pour cela que certes s'est toujours écrit avec une s, qui, comme on voit, n'est point un caprice d'orthographe et qui seule permet de comprendre comment certes a un sens adverbial. Certus est, par métathèse, pour cretus, participe passé de cernere, séparer, distinguer, le même que le grec ϰρίνειν, juger (voy. CRISE).