« change », définition dans le dictionnaire Littré

change

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

change

(chan-j') s. m.
  • 1Succession de choses diverses ou d'états divers. La faim se renouvelle au change des viandes, Régnier, Sat. X. Ô que nos fortunes prospères Ont un change bien apparent, Malherbe, II, 3. C'est elle et non pas lui qui fait sentir au monde Le change des saisons, Malherbe, V, 25.
  • 2Changement d'affections. J'aime le change, à la bonne heure, La Fontaine, Pâté. En amour le change est assez doux, Molière, Psy. IV, 2. Mon cœur court-il au change ? Molière, F. sav. IV, 2. Quoi ! vous appelez crime un change raisonnable ? Corneille, Hor. I, 2. Mon honneur offensé sur moi-même se venge, Et vous m'osez pousser à la honte du change [inconstance], Corneille, Cid, III, 6.
  • 3Troc d'une chose contre une autre. Vous auriez sans doute perdu au change, Guez de Balzac, VI, Lett. 2. Ma perte n'est pour vous qu'un change avantageux, Corneille, Poly. V, 2.

    Ce qu'on donne pour une autre chose, ce qui peut remplacer, équivaloir ; et figurément, la pareille. C'est ce qu'on peut donner pour change Au songe dont vous me parlez, Molière, Amph. II, 2. Fille qui n'eût de quoi rendre le change, La Fontaine, Maz. Je voudrais… savoir comment… Caliste en use et lui rendre le change, La Fontaine, Coupe. Un nouveau galant qui survient lui rend le change, La Bruyère, III. Rendre le change à quelqu'un, signifie aussi lui faire une réplique ingénieuse ou vive.

  • 4Toute négociation relative à la vente ou à l'échange des matières d'or ou d'argent, soit monnayées, soit en lingots, ainsi que de tous les papiers représentant une valeur métallique. Change de monnaie. Bureau de change. Combien vous a-t-on pris pour le change de votre billet ?

    Le prix que prend le changeur. Quel est le change des billets de banque ?

    Lieu où l'on change la monnaie, l'or pour de l'argent, etc. Aller au change. Le pont au Change à Paris, ainsi dit parce que les changeurs y logeaient.

    Payer comme au change, payer sur-le-champ.

    S'est dit autrefois de la bourse, du lieu destiné aux réunions des négociants.

  • 5 Terme de banque, toute négociation par laquelle on cède, moyennant un prix convenu, à un tiers, des fonds qu'on possède dans un endroit autre que celui où se fait l'opération. Le change est une manière de remettre de l'argent d'un lieu à un autre, par une lettre qui en indique le payement, et qui se nomme lettre de change. Une bonne lettre de change bien acceptée, Sévigné, 295.

    La lettre de change est aussi une sorte de billet dont le non-payement entraîne la contrainte par corps,

    Agent de change, fonctionnaire ministériel nommé par le gouvernement pour attribuer à la négociation des rentes, des effets publics, des actions de banque, de tout papier commerçable enfin, le caractère de l'authenticité. Charge d'agent de change. Moitié, quart d'agent de change, personne qui est intéressée pour moitié, pour quart dans les affaires d'un agent de change à qui elle a fourni la moitié ou le quart de ses fonds.

    Le prix que prend le banquier pour l'argent qu'il fait remettre. Le change d'ici à Londres, sur Londres, est à tant pour cent, est haut, bas, au pair, désavantageux. Coter le change, en marquer le taux.

  • 6Le profit, l'intérêt de l'argent qu'on prête selon le cours de la place. Prendre à change. Rare en ce sens.
  • 7 Terme de vénerie. Substitution d'une nouvelle bête à celle qui a été lancée d'abord. La bête donne le change, en fait lever une autre à sa place. Les chiens prennent le change, tournent au change, quittent la bête lancée pour la nouvelle. Les chiens gardent le change, ne tournent pas au change. Que de raisonnements pour conserver ses jours ! Le retour sur ses pas, les malices, les tours, Et le change et cent stratagèmes, La Fontaine, Fab. X, 1.

    Fig. En me donnant le change attirer mon courroux, Corneille, Suréna, IV, 4. Ne parlons point ici du Tage ni du Gange, Je connais ma portée et ne prends point le change, Corneille, M. de Pomp. II, 3. À cet amour naissant il faut donner le change, Molière, l'Étour. I, 9. Je sais l'affaire et ne prends point le change, Molière, Tartufe, IV, 3. Je crois voir Annibal qui, pressé des Romains, Met leur chef en défaut, ou leur donne le change, La Fontaine, Fables, XII, 23. Il donne le change aux théologiens, Bossuet, 2e écrit. Il fit le plaisant pour donner le change à ses hôtes, Hamilton, Gramm. 4. Ils se donnent sans cesse le change à eux-mêmes, Massillon, Carême, Doutes. De peur que les passions ne lui fissent prendre le change, Massillon, Carême, Avenir. Le monde ne prend pas le change sur vos sentiments, Massillon, Carême, Pardon. Elle s'est humiliée d'avoir pris si grossièrement le change sur ses intérêts éternels, Massillon, Carême, Inconst. Si l'Évangile renfermait les moindres obscurités favorables aux passions, c'étaient sans doute ces premiers disciples qui devaient y prendre le change, Massillon, Car. Évid. de la loi. Sous prétexte d'un pèlerinage qui ne fit prendre le change à personne, Voltaire, Louis XIV, 17. Il exhorte Polybe à donner le change à sa douleur, Diderot, Claude.

  • 8 Terme de fauconnerie. Empêcher le faucon d'aller au change, l'empêcher de quitter l'oiseau qu'il chasse pour en prendre un autre.

HISTORIQUE

XIIe s. Pour un des nostres cinq des paiens prenez ; Ci a bon change ; Dex en soit aorez, Roncisv. 102.

XIIIe s. Se tu as le [la] fort monnoie, multeplie par canje tant saus [sous] com tu vels cangier, Comput, f° 22. Se marchant font change de chevaus li uns à l'autre bout à bout, riens ne doivent de tonlieu, Liv. des mét. 316. Car il en eust eu grant raençon ou change d'aucun gentilhomme, Chron. de Rains, 96. Certes, moult ai fait mauvès change, Quant si vers moi vous truis [trouve] estrange, Que ge plus aim que riens qui vive, la Rose, 16669. Por ce que li monde se change Plus sovent que denier à change, Rutebeuf, 218. Se li drapiers ne t'en veut croire, Si t'en reva droit à la foire, Et va au change, Rutebeuf, 28. De ce change se souffrissent moult bien li pelerin, se Diex vousist, Villehardouin, XXIX.

XIVe s. Se ton faulcon va ou [au] change et il prend coulon ou cornaille ou autre vosel de change, Modus, f° LXXXV, verso.

XVe s. … Change est paradis à l'argent, Car il a là tous ses deduits, Ses bons jours, ses bonnes nuits ; Là est frotés et estrillés, Lavés et bien appareilliés, Froissart, Le dit dou florin. En ung seul lieu aimera fermement, Sans point querir ou desirer le change, Orléans, 10. Et je te promets que avant que il soit gueres de jour, tu me verras aller par entre les changes de Genes, Bouciq. III, 22.

XVIe s. À Rome fut baillée grande somme d'argent au change, pour cette opinion de nostre ruine, Montaigne, I, 44. Cela m'a emporté hors de mon propos ; mais il y a du proufit au change, Montaigne, III, 107. C'est un vilain desreglement qui poulse si souvent les femmes au change, Montaigne, III, 370. C'est un meschant : ayons en un bon en change, Montaigne, IV, 83. Quelqu'un, pensant faire du plaisant… Mais Dionysius luy rendit son change plaisamment, car il lui dit…, Amyot, Timol. 22.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. camge, camje (voy. CHANGER).