« chatouiller », définition dans le dictionnaire Littré

chatouiller

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

chatouiller

(cha-tou-llé, ll mouillées, et non cha-tou-yé) v. a.
  • 1Produire, par des attouchements légers et répétés sur certaines parties du corps, une sensation moitié agréable, moitié pénible, qui excite un rire convulsif. Il ne faut pas chatouiller les jeunes enfants.

    En termes de manége, chatouiller un cheval de l'éperon, le toucher légèrement avec l'éperon.

    Terme de monnaie. Chatouiller le remède, approcher de très près de la quantité d'alliage qui est autorisée.

  • 2 Par extension, produire certaines sensations agréables. La musique chatouille l'oreille. Ce mets Lui chatouillait fort le palais, La Fontaine, Pâté. Il [le sommeil] chatouille mon mal d'un faux ressentiment, Régnier, Plainte. La douleur qui fait frémir ses bourreaux ne fait que la [la vertu] chatouiller, Guez de Balzac, le Prince, ch. X. Que ferez-vous ici, faibles discoureurs ? Dissiperez-vous ces conseils cachés en chatouillant les oreilles ? Bossuet, Fr. Bourgoing. Jamais odeur de pâté ne chatouilla l'odorat plus délicatement que celle qui se répandit de tous côtés à cette ouverture [d'une tortue de 500 livres cuite en pâté], Labat, Nouveau voy. aux îles, 2e part. ch. 22. Heureux … Qui, pour ne rien souffrir qui lui pèse ou le souille, Fuit ce qui le chatouille, Et, pour mieux servir Dieu, se rend maître de soi ! Corneille, Imit. I, 21.
  • 3 Fig. Tandis que je m'arrête à chatouiller mon âme en ce contentement, Malherbe, V, 25. Dragon, gentil dragon, que te dirai-je encor Qui te chatouille et qui te plaise ? La Fontaine, Psyché, liv. II, p. 178. Ce M. de Luçon avait un je ne sais quoi de votre voisin qui lui avait chatouillé l'esprit, Guez de Balzac, 8e Entretien. L'aise de voir la terre à son pouvoir soumise Chatouillait malgré lui son âme avec surprise, Corneille, Pomp. III, 1. Ces noms de roi des rois et de chef de la Grèce Chatouillaient de mon cœur l'orgueilleuse faiblesse, Racine, Iphig. I, 1. J'aime à te voir presser cet aveu de ma flamme : Combattant mes raisons, tu chatouilles mon âme, Molière, Pr. d'Él. I, 1. … l'appas qui la chatouille… Lui cache le péril de ce qu'elle entreprend, Boursault, Fables d'Ésope, IV, 3. Un auteur vertueux en ses vers innocents Ne corrompt point le cœur en chatouillant les sens, Boileau, Art poét. IV. Il n'y a rien qui chatouille tant l'oreille d'un homme soupçonneux que les rapports, Perrot D'Ablancourt, Lucien, t. III, dans RICHELET.

    Absolument. Il n'y a rien assurément qui chatouille davantage que les applaudissements que vous dites, Molière, Bourg. gent. I, 1.

  • 4Se chatouiller, v. réfl. Se causer la sensation du chatouillement.

    Fig. Se chatouiller pour se faire rire, rire sans sujet, faire effort pour paraître gai.

    Se chatouiller l'un l'autre. Ils s'amusent tous deux à se chatouiller.

HISTORIQUE

XIVe s. Et aucuns sont aussi comme sont ceulz qui se doubtent que les autres ne les catoillent, et pour ce il se catoullent et confriquent premierement, Oresme, Eth. 211.

XVe s. Quant dedans fu [le dard], mon cueur vint esveiller Et tellement le print à catoillier Que je senty que trop rioit de joye, Orléans, 1. Durant que ce vin j'avaloy, Qui me chastouilloit soubz la langue, Basselin, Vau de Vire, 9.

XVIe s. Ceste parole ne despleut point à Sylla, ains au contraire, il donna à cognoistre qu'elle l'avoit chatouillé, Amyot, Sylla, 72. La pluspart des plaisirs nous chatouillent et embrassent pour nous estrangler, comme faisoient les larrons que les Aegyptiens appeloient Philistas, Montaigne, I, p. 283. Livre que j'avoy basty pour me chastouiller moymesme, à fin de me faire rire le premier, Des Accords, Avant-propos. Guerres, maux et telles petites mignardises qui chatouillent malheureusement les personnes pour les faire rire, Moyen de parvenir, p. 4, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Picard, catouiller ; rouchi, catoulier ; d'après Diez, de catulire, changé en catuliare, être en chaleur en parlant des chiennes, de catulus, petit chien, diminutif de canis, chien ; d'après Grandgagnage, qui trouve dans le wallon catî, gatî, guètî, pour chatouiller, de l'allemand : anglo-saxon, citelan ; holl. kittelen ; allem. moderne, kitzeln, chatouiller. La forme du mot est en faveur de l'opinion de Diez. Il y avait aussi dans l'ancien français chatillier ou catillier, signifiant harceler : Li mal d'amour… Ne me font fors chatillier De joie et de delirier Sans penser nule folie, Mss. de poésies fr. avant 1300, t. IV, p. 1384, dans LACURNE. Et s'estoient là retraits une grosse compaignie pour catillier les Picards, Monstrelet, dans DU CANGE, catillare. Ces formes catillare, catillier, dont le sens n'est pas très précis entre harceler et chatouiller, se prêteraient mieux à l'étymologie de Grandgagnage, et, comme il est arrivé souvent, une confusion a pu s'opérer entre chatillier et chatouiller.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CHATOUILLER. - ÉTYM. Ajoutez : M. Ascoli, Archivio, t. II, p. 322, pense que le français chatouiller et autres formes romanes (elles sont nombreuses) qui commencent par cat ou gat, peuvent provenir du lat. catus, chat, mais par l'intermédiaire de termes dérivés, catrulus, catriculus, catuculus, catruccius, etc.