« commencer », définition dans le dictionnaire Littré

commencer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

commencer

(ko-man-sé ; quelques personnes prononcent ke-man-sé, provincialisme non reçu ; le c prend la cédille devant a et o : commençant, commençons) v. a.
  • 1Donner commencement à quelque chose. Commencer une construction, un discours. J'ai commencé la lecture de ce livre. Ce que j'ai commencé je ne l'achève point, Racine, Iphig. III, 1. Notre grand flandrin de vicomte, par qui vous commencez vos plaintes, Molière, Mis. V, 4. L'on en sait d'autres qui ont commencé leur vie par les plaisirs et qui ont mis ce qu'ils avaient d'esprit à les connaître, que les disgrâces ensuite ont rendus religieux, sages, tempérants, La Bruyère, XI.
  • 2Être au commencement de. Commencer l'année, commencer la journée, être aux premiers jours de l'année, aux premières heures de la journée. Je crains que cet enfant ne commence une maladie grave. Commencez donc par là cette heureuse journée, Racine, Iphig. III, 4.
  • 3Être en tête, au commencement, en parlant des choses. Le mot qui commence la phrase.
  • 4Ébaucher. La nature commence avec nous ce sentiment, Bossuet, Conn. de Dieu, IV.
  • 5Commencer un élève, lui donner les premières leçons.

    Cette nourrice a commencé cet enfant, elle est la première qui lui ait donné à téter.

    Terme de manége et de vénerie. Commencer un cheval, commencer un chien, commencer à dresser un cheval, un chien.

  • 6 V. n. Prendre commencement, en parlant des choses. Notre année commence au premier janvier. La leçon commence à telle page. Voilà qui commence bien, lui dis-je, Pascal, Prov. 4. Près de la borne où chaque État commence, Aucun épi n'est pur de sang humain, Béranger, Sainte alliance des peuples. Ce serait ignorer sa nature, de s'imaginer qu'elle ait commencé, Pascal, Préf. vide.

    Être au début, en parlant des personnes. J'ai pris ce livre pour l'étudier, et je commence. Il a mal commencé. Il y a un jeu dans la conduite : on a commencé, il faut finir, or veut fournir toute la carrière, La Bruyère, XI.

    Commencer par, faire d'abord, parler d'abord, s'en prendre d'abord à… Commençons par nous préparer, ensuite nous agirons. Ciel, que lui vais-je dire et par où commencer ? Racine, Phèd. I, 3. Pour commencer par Néron, il faut se souvenir qu'il est ici dans les premières années de son règne, qui ont été heureuses, Racine, Brit. 2e préface. Il commence, il est vrai, par où finit Auguste ; Mais crains que, l'avenir détruisant le passé, Il ne finisse ainsi qu'Auguste a commencé, Racine, ib. I, 1.

    Commencer à avec un infinitif. Commencez par Sabine à faire de nos vies Un digne sacrifice à vos chères patries, Corneille, Hor. II, 6. S'il cesse de m'aimer, qu'il commence à me craindre, Corneille, Médée, I, 5. Tant de précaution commence à me lasser, Corneille, Sertor. IV, 2. On commence en Europe à la moins redouter, Voltaire, Tancr. I, 1. Après trente-trois ans sur le trône perdus, Commençant à régner, il a cessé de vivre, Corneille, Sonnet sur Louis XII. Ce n'est pas être transporté d'un lieu à un autre que de commencer à entendre ce qu'on n'entendait pas, Bossuet, Connaiss. IV, 10. La vie est un sommeil ; les vieillards sont ceux dont le sommeil a été plus long ; ils ne commencent à se réveiller que quand il faut mourir, La Bruyère, XI.

    Commencer de. Il a commencé d'écrire sa lettre. Albe où j'ai commencé de respirer le jour, Corneille, Hor. I, 1. Vous avez commencé tantôt d'y consentir, Corneille, Héracl. V, 6. Puisque j'ai commencé de rompre le silence…, Racine, Phèd. II, 2. Ma vie à peine a commencé d'éclore, Racine, Esth. I, 5. Ses transports dès longtemps commencent d'éclater, Racine, Brit. III, 3. Je commence d'avoir plus d'espérance de mon retour que je n'en avais eu jusqu'ici, Voiture, Lett. 37. Le conte qu'il a commencé de faire à quelqu'un, La Bruyère, XI. Le Vésuve ne commença d'être un volcan dangereux que quand l'Etna cessa de l'être, Voltaire, Mœurs, Introd. chang. Ô rives de la Saône, où ma faible paupière à la clarté des cieux commença de s'ouvrir, Lieux où l'on sait au moins respecter l'innocence, Vous ne me verrez plus ! …, Gilbert, Le poëte malheureux. Avant d'avoir commencé de vivre, Rousseau, Ém. II. … tout ce qui pense et tout ce qui respire Commença de souffrir, Lamartine, Méd. I, 7. Il commença d'exercer son ministère, Bossuet, Hist. II, 10. Un loup qui commençait d'avoir petite part…, La Fontaine, Fabl. III, 1. La renommée enfin commença de se plaindre, La Fontaine, Fabl. VI, 20. Nous commençons de vivre par degrés, et nous finissons de mourir comme nous commençons de vivre, Buffon, De la vieillesse et de la mort. Le roi Henri VIII commença d'ébranler l'autorité de l'Église, Bossuet, Reine d'Anglet. Et déjà mon rival commence de paraître, Molière, D. Garc. V, 3. Nous commençons d'être connues, Molière, les Précieuses, 12. À demi-lieue de là, L'étoile commença de se plaindre, Scarron, Rom. com. II, 12.

    Impersonnellement. Il commence. Il commence à pleuvoir. Il a commencé à faire nuit.

  • 7Se commencer, v. réfl. Prendre commencement. Cette étude, cet apprentissage doit se commencer de bonne heure, si l'on veut réussir.

PROVERBES

N'a pas fait qui commence, c'est-à-dire il ne suffit pas de commencer, il faut poursuivre et continuer. Dans un sens analogue : A moitié fait qui commence bien.

REMARQUE

Les grammairiens ont essayé de distinguer entre commencer à et commencer de, disant par exemple que : Cet enfant commence à marcher signifie que l'enfant prend l'habitude de faire des pas, et que : Cet enfant commence de marcher signifie que l'enfant, qui était immobile, se met à faire des pas. Cette distinction subtile n'est pas justifiée par l'usage des auteurs.

HISTORIQUE

Xe s. Quant oi comenciest [quand vous commencez aujourd'hui], Fragm. de Valenc. p. 469.

XIe s. [Il] baisse son chef, si cumencet à penser, Ch. de Rol. IX. Que je ne fu à l'estor cumencer, ib. CLXXIII.

XIIe s. Commenciez est li dex [deuil] et li estriz, Ronc. p. 72. Toutes ses plaies comencent à saigner, ib. p. 96. Mout fait l'amors que vilaine, Qui comence por faillir, Couci, IV. En aventure [peut-être] [je] comens Ma daerraine chanson, ib. X. Et la mauviz [alouette] qui commence à tentir, ib. XVIII. Au commencier [je] la trovai si doucete, ib. VI. Quand il commençad à regner, Rois, p. 41.

XIIIe s. Et nostre sires les en commencha mains [moins] à amer que il n'avoit fait, Villehardouin, CVIII. À ce tems dont vous ai l'histoire commencie, Berte, II. Lors commence la dame tenrement à plorer, ib. XLIII.

XVe s. Folie parmaintenue vaut pis que folie commencée, Froissart, II, III, 38. Il m'apperceu, si commença à rire, Orléans, 10. Et luy commença la parolle disant, Commines, I, 12.

XVIe s. Peu de temps aprez elle commencea à souspirer, lamenter et crier, Rabelais, Garg. I, 6. Lors commencea le monde attacher les chausses au pourpoinct, Rabelais, ib. I, 8. S'ils commencent une fois de la reputer selon leurs œuvres, Calvin, Instit. 618. Depuis mercredi, madame s'est trouvée beaulcoup plus mal qu'elle n'avoit esté despuis qu'elle a commencé à se lever, Marguerite de Navarre, Lett. X. J'ay commencé de les mettre en roolle, Montaigne, I, 33. Les oracles avoyent commencé à perdre leur credit, Montaigne, I, 42. Les voiles aegyptiennes, qui commençoient à les approcher, Montaigne, I, 63. Et, pour commencer à luy oster son plus grand advantage, Montaigne, I, 76. Que l'amitié commence de ce jour d'huy entre nous, Montaigne, I, 130. Encore l'injuria il bien plus oultrageusement, et ce en une chanson, qui se commence, ô muse ! Montaigne, Thém. 41.

ÉTYMOLOGIE

Berry, c'mincer, c'mencer ; Saintonge, coumencer, coumincer ; bourguig. quemancé ; provenç. comensar, comenchar ; catal. comensar ; anc. espagn. compenzar, avec un p intercalaire ; espagn. mod. comenzar ; portug. comezar ; anc. ital. comenzare ; ital. mod. cominciare ; du latin cum, et initiare, commencer (voy. INITIER).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

COMMENCER. Ajoutez :

8Se commencer, avoir un commencement. Quand le mot qui suit se commence par une consonne, Corneille, Lexique, éd. Marty-Laveaux.