« consumer », définition dans le dictionnaire Littré

consumer

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

consumer

(kon-su-mé) v. a.
  • 1Détruire en usant, en réduisant à rien. Le feu consuma ce grand édifice en moins de deux heures. La rouille consume le fer. J'ai pitié de moi-même et jette un œil d'envie Sur ceux dont notre guerre a consumé la vie, Corneille, Hor. II, 3. Il arrête et consume deux grandes armées, Fléchier, Tur. S'il [l'homme] était haut comme les plus grands clochers, un petit nombre d'hommes consumerait en peu de jours tous les aliments d'un pays, Fénelon, Exist. 42. …À nos vaisseaux la mer toujours fermée Trouble toute la Grèce et consume l'armée, Racine, Iphig. I, 2. Toutes leurs provisions furent consumées, Voltaire, Cand. 17. Il pense déjà voir les flammes triomphantes Embraser leurs drapeaux et consumer leurs tentes, Delille, Parad. perdu, V.

    Consumer son patrimoine, le dissiper.

    Fig. Consumer avec lui toute cette faiblesse, Corneille, Hor. II, 4. Il [le peuple] n'est donc plus à craindre : il a pris ses victimes ; Sa fureur sur leur sang va consumer ses crimes, Corneille, Nicom. V, 4. Jusqu'à ce que la mort brise ce qui te lie à cette longue infirmité, Et qu'en toi, dans le ciel, la véritable vie Consume la mortalité, Corneille, Imit. I, 22. Je lui laissai sans fruit consumer sa tendresse, Racine, Brit. IV, 2. L'oisiveté d'un camp consume leur vigueur, Racine, Alex. I, 1.

  • 2 Par analogie. Le regret de sa faute le consume. L'esprit s'use comme toutes choses ; les sciences sont ses aliments, elles le nourrissent et le consument, La Bruyère, XI. Si pour me consumer Un destin envieux ne m'avait fait rimer, Boileau, Sat. II. La riche expression, la nombreuse mesure, Sorcières dont l'amour sait d'abord les charmer [les poëtes], De fatigues sans fin viennent les consumer, Boileau, Ep. X. Son naturel ardent le consumait dans le travail, Fénelon, Tél. XI. Je vais seule en ces lieux, où l'horreur me consume…, Voltaire, Alz. IV, 4. Le feu qui semble éteint souvent dort sous la cendre ; Qui l'ose réveiller peut s'en laisser surprendre, Et je mériterais qu'il [le feu] me pût consumer, Si je lui fournissais de quoi se rallumer, Corneille, Rodog. III, 4. C'en est fait, le poison me consume, ma force m'abandonne, la plume me tombe des mains, je sens affaiblir jusqu'à ma haine, Montesquieu, Lett. pers. 161.
  • 3Employer sans réserve, en parlant du temps. La longueur du temps que les choses ont consumé, Corneille, Ex. de Pomp. … Il [un diable] se pouvait tirer d'affliction Par ses bons tours et par son industrie, Mais non mourir ni revoir sa patrie, Qu'il n'eût ici consumé certain temps, La Fontaine, Belph. J'ai consumé mon âge au sein de l'Amérique, Voltaire, Alz. I, 1. Nous autres hommes c'est souvent par vanité, quelquefois par intérêt, que nous consumons notre vie dans la culture des arts, Voltaire, Épît. à Mme du Châtelet, sur Alz.
  • 4Se consumer, v. réfl. Être consumé. Se consumer de travail et d'inquiétude. Ce peu, que mes vieux ans m'ont laissé de vigueur, Se consume sans fruit à chercher ce vainqueur, Corneille, Cid, III, 5. N'allez pas sur des vers sans fruit vous consumer, Boileau, Art poét. I. De vos jours prêts à se consumer, Racine, Phèd. I, 3. En efforts impuissants leur maître se consume, Racine, ib. V, 6. Hélas ! je me consume en impuissants efforts, Racine, Iphig. V, 4. Les empereurs se consument dans des disputes de religion, Bossuet, Hist. I, 11. Je me consumais en regrets inutiles, Fénelon, Tél. II. Narcisse se consuma lui-même de douleur, Fénelon, ib. VIII. Il se consumait par ses inquiétudes, Fénelon, ib. XXIII. Les Romains laissaient le riche royaume se consumer par lui-même, et s'étendaient du côté de l'occident, Bossuet, Hist. I, 9. Le jeune amant ne pouvant obtenir sa maîtresse se consumait de douleur, Rousseau, Conf. I. Les païens se consumaient à la poursuite de l'ombre de la vie, Chateaubriand, Génie, III, IV, 1. Pâle lampe du sanctuaire, Pourquoi, dans l'ombre du saint lieu, Inaperçue et solitaire, Te consumes-tu devant Dieu ? Lamartine, Harm. I, 4.

    Absolument. Faire de vains efforts. Je cours, je me consume, et le peuple m'entraîne, Voltaire, Mérope, V, 6.

    Dépérir. La petite fille n'a fait que languir depuis [l'emprisonnement de son père], et se consume peu à peu, Courier, I, 107.

HISTORIQUE

XVe s. Pour ceste heure estoit consummée la force de son pays, Commines, V, 9.

XVIe s. Ses prefaces, partitions, etc. consument la plus part de son ouvrage, Montaigne, II, 106. Le feu, n'ayant plus que consumer, se consume soy mesme, et n'est plus feu, Montaigne, IV, 351. Purger, resouldre et consumer toutes les mauvaises humeurs d'un corps gasté, Amyot, Lyc. VII. Ce temple fut consumé par le feu, du temps des guerres civiles, Amyot, Publ. 28. Se consumer de melancholie, Amyot, Timol. VII. La fouldre consumera les os des corps, sans entammer la chair qui les couvre, Rabelais, Pant. III, 3.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. et espagn. consumir ; du latin consumere, de cum, et sumere, prendre, d'où dérive sumptus, dépense (voy. SOMPTUEUX).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CONSUMER. - HIST. Ajoutez : XIIe s. Wa à moi ; car je sui consummez, et m'anime [mon âme] defaillie [l'original latin porte consumptus sum], Bonnardot, Texte lorrain, dans Romania, t. V, p. 299.