« convenir », définition dans le dictionnaire Littré

convenir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

convenir

(kon-ve-nir), je conviens, nous convenons, vous convenez, ils conviennent ; je convenais ; je convins, nous convînmes ; je conviendrai ; je conviendrais ; conviens, convenons ; que je convienne, que nous convenions, que vous conveniez, qu'ils conviennent ; que je convinsse ; convenant ; convenu v. n.
  • 1Conjugué avec l'auxiliaire être. Reconnaître la vérité de. Vous convenez là-dessus des devoirs que la religion impose, Massillon, Car. Pardon. Nous sommes convenus que dans un tel dessein Un soupçon bien souvent doit passer pour certain, Lafosse, Manlius, III, 6. Ils [les Français] avouent de bon cœur que les autres peuples sont plus sages, pourvu que l'on convienne qu'ils sont mieux vêtus, Montesquieu, Lett. pers. 100.

    Convenir, dans une phrase affirmative, construit avec que, veut l'indicatif : Il convient que cela est. Dans une phrase négative ou interrogative, il veut le subjonctif : Convient-il que cela soit ? il n'est pas convenu que cela fût. Jamais un Anglais ne conviendra que son gouvernement ne soit pas le plus parfait que les hommes aient imaginé, Condillac, Études hist. part. III, ch. 1.

  • 2S'accorder. Je pense convenir avec tous les théologiens, Descartes, Rep. 2. Si la religion était une pure imagination, tous les hommes, d'un consentement si unanime, ne seraient pas convenus à se la former, Bourdaloue, Pensées, t. I, p. 266. Tous les instituts [monastiques], quelque différents qu'ils soient d'ailleurs, conviennent en ce point qu'il y ait à la tête de chaque société régulière une puissance qui préside, Bourdaloue, ib. t. II, p. 459. On ne convient pas de l'année où il vint au monde, Bossuet, Hist. I, 10. Des témoins qui conviennent sans s'être entendus, Bossuet, ib. II, 13. Les hommes et les femmes conviennent rarement sur le mérite d'une femme, La Bruyère, III. C'est une opinion sur laquelle tout le monde convient assez que Socrate est le premier qui ait ramené la philosophie à ce qui touche les devoirs de la vie commune, Fénelon, Socrate. Les historiens de tous les pays conviennent tous à nous montrer que les différents peuples sont descendus de différents enfants d'un même père, Fénelon, XXII, 354. Ils conviennent tous en ce point et veulent tous être immortels, Massillon, Car. Avenir. Faites convenir, si vous le pouvez, tous les hommes sur votre sujet, Massillon, Car. Resp. hum. L'empereur [Justinien] ne convenait pas avec l'impératrice sur les points les plus essentiels, Montesquieu, Rom. 20.
  • 3S'entendre sur une chose. Il sont convenus de se trouver en tel lieu, de faire telle chose. Convenir du prix de quelque chose. Convenons de nos faits avant que de rien rendre, Regnard, Légat. V, 4. Comme il ne s'agit ici que de convenir des termes, afin de pouvoir se faire entendre, Boullainvilliers, Réfutation de Spinoza, p. 200.

    Avec que il faut le subjonctif ou le conditionnel : Ils convinrent que cela fût fait, ou serait fait au plus tôt.

  • 4En parlant des choses, être conforme. Il a été libre de nommer ces deux choses de même ; mais il ne le sera pas de les faire convenir de nature aussi bien que de nom, Pascal, Pens. I, art. 2. Votre âge, monsieur, ne convient pas avec celui de ma fille, Hauteroche, Crispin médecin, I, 3. Les temps et les autres marques ne convenaient pas, Bossuet, Hist. II, 10. Les temps conviennent, et tout se rapporte autant qu'on le pouvait espérer dans une antiquité si reculée, Bossuet, ib. I, 1. Il faudrait bien que vous vous accoutumassiez à voir des exceptions dans les meilleurs systèmes ; il y a toujours quelque chose qui y convient le plus juste du monde, et puis quelque chose aussi qu'on y fait convenir comme on peut, Fontenelle, I, 121. On est obligé de les mettre [des pièces] les unes sur les autres pour voir d'une manière plus sûre que par la vue si elles conviennent en grandeur, Malebranche, Rech. I, 6.
  • 5Conjugué avec l'auxiliaire avoir ; être propre, convenable à. C'est un parti qui convient à votre fille. Ce projet ne lui a pas convenu. Des mœurs si rudes et si grossières convenaient à la république qui se formait, Saint-Évremond, Génie du peuple romain, ch. 2. dans RICHELET. Ces festons dans vos mains et ces fleurs sur vos têtes Autrefois convenaient à nos pompeuses fêtes, Racine, Ath. I, 3. Du moins ce désespoir convient à mon malheur, Racine, Mithr. III, 1. La bonté convient mal à ton autorité, Voltaire, Mort de Cés. I, 4.

    En logique. L'attribut convient au sujet.

  • 6Plaire, être accepté. Un homme habile sent s'il convient ou s'il ennuie, La Bruyère, V.

    Se convenir, se plaire réciproquement. Ces deux hommes ne sauraient se convenir. Nos humeurs se sont convenu parfaitement. Ces dames ne se sont pas convenu. Nous nous serions convenu, si nous avions pu nous voir plus librement. Est-ce qu'il faut se convenir pour s'épouser ? Du Frény, Double veuvage, I, 1.

  • 7Être à la convenance. Cette place lui aurait bien convenu. Cette maison m'a convenu. Ce domestique ne me convient pas.
  • 8Être convenable, expédient. On délibéra sur ce qu'il aurait convenu de faire dans une telle occurrence. Il ne vous convient pas de tenir un tel langage. J'ai commandé qu'on porte à votre père Les faibles dons qu'il convient de vous faire, Voltaire, le Droit du seigneur, III, 6.

    Impersonnellement, il convient, avec de et l'infinitif. Il ne convient qu'aux enfants de pleurer et de jeter tous leurs hochets quand on leur en ôte un seul, Barthélemy, Anach. ch. 32.

    Avec que et le subjonctif. Il convient que l'impôt soit payé par celui qui emploie la chose taxée plutôt que par celui qui la vend, Rousseau, Économie polit.

HISTORIQUE

XIe s. Dient Franceis : il nous i cuvent garde, Ch. de Rol. XII.

XIIe s. Que à l'espée nel convegne à paier [il ne faille le payer], Ronc. p. 34. Sus en l'antgarde [il] vos convent à monter, Ronc. p. 47. Par grant dolor les convendra mourir, ib. p. 55. Seigneur cousin, com vous est covenent ? ib. p. 121. Par la gastine vous convient à aler, ib. p. 157. Mais il convient qu'à sa volonté soie, Couci, XX. Ou veuil ou non, servir la [la servir] me convient, ib. 21. Je ne tieng pas l'amour à droit partie, Dont il convient mourir ou trop aimer, ib. XX. Et comment Conviendra-il qu'à la fin congié [je] prenne ? ib. XXII. Quant il eurent mengé, sés [si les] en [de table] covint lever, Sax. XII. À prendre lui convient [il faut] vie d'homme sauvage, Et gesir mainte nuit au vent et à l'orage, ib. XXVI.

XIIIe s. Et sachiés certainement que par cele chaaine convenoit passer qui au port de Constantinoble voloit entrer, Villehardouin, LXX. Car nuls ne vient à vie [que] ne conviene finer, Berte, III. D'un coutel en vo [votre] cuisse vous convenra ferir, ib. XII. Ce que [je] n'ai deservi convient que je compere [paye], ib. XVIII. Car li rois les laissoit de trestout convenir [disposer], ib. LXIII. Ce est chose passée [résolue], jà n'y convient penser, ib. CXII. Car sachiés que moult la convient [à l'Envie] Estre irée quant biens avient, la Rose, 251. Et se tu as si grant besoigne Que esloigner il te conviengne, Garde bien que tes cuers remaigne, ib. 2583. Quant li baillis laisse convenir prevoz et sergans et la mesnie de son ostel plains de malice, ce sont lou entre brebis, Beaumanoir, 26. Adont converroit il que je respondisse à cascun pour tant comme à li monteroit, Beaumanoir, VI, 17. Nouvelles, lesqueles je ne weil pas conter pour ce que il ne me convendroit de rompre ma matiere, Joinville, 211.

XVe s. Ainsi furent-ils trois jours et trois nuits sans pain, sans vin, et après, par l'espace de quatre jours, qu'il leur convenoit acheter un pain mal cuit six esterlins, qui ne dust valoir qu'un parisis, Froissart, I, I, 39. Le roi Robert estoit devenu vieux et foible et si chargé de la grosse maladie, ce disoit-on, que mourir le convint, Froissart, I, I, 47. Ils se mirent tous à aller après lui tant qu'il purent, et laisserent les gens du pays convenir du remenant et eux venger, et reprendre partie de ce qu'on leur avoit robé, Froissart, I, I, 182.

XVIe s. Il est à ceste heure bien aisé de juger et discerner en quoy conviennent ensemble, ou en quoy different ces deux signes, la circoncision et le baptesme, Calvin, Instit. 1067. Et n'est point ceste forme de parler nouvelle ; car elle convient avec une autre qui est au premier chapitre, Calvin, ib. 1084. Il feit crier que ung chascun convint en armes en la grande place, Rabelais, Garg. I, 26. Il te convient servir, aymer et craindre Dieu, Rabelais, Pant. II, 8. Il se y convient mettre à l'adventure, les yeuix bandez, Rabelais, ib. III, 10. Or, puysque ne convenons ensemble en l'expousition des sorts Virgilianes, prenons aultre voye de divination, Rabelais, ib. III, 13. C'estoyt le tiers jour des grandes foires, esquelles annuellement convenoyent tous les plus riches marchandz d'Africque et d'Asie, Rabelais, ib. IV. 2. Il lui porta les cinq cens ducats dont ils avoient convenu ensemble, Marguerite de Navarre, Nouv. LVI. Comme il convenoit à sa fortune, Montaigne, I, 57. Voilà pourqucy toutes les regles se rencontrent et conviennent à cet article, Montaigne, I, 70. Il convient assez bien à un philosophe d'escrire l'histoire, Montaigne, I, 103. J'avois bien veu convenir en cecy la pluspart des anciennes opinions, Montaigne, I, 250. Venus et Bacchus se conviennent volontiers, Montaigne, III, 161. Alors ils commencent à estre plus propres aux exercices du corps, auxquels il convient de la force, Lanoue, 126. Après que ledit esquadron auroit enduré cette rude salve, il lui conviendroit [faudrait] venir donner dans les picques du premier rang, Lanoue, 322. La vie contemplative et l'active conviennent très bien l'une avecques l'autre, Lanoue, 540. Si fut chose pitoyable que ce qu'il convint alors faire et souffrir à Perseus, Amyot, P. Aem. 42. Ilz convinrent ensemble, que Cicéron presteroit au jeune Caesar la faveur de son authorité, Amyot, Cicéron, 56. Il y estoit convenu une grande multitude d'hommes de toutes parts de la Grece, Amyot, Démétr. 31. La courtisane le feit adjourner et convenir en jugement, pour…, Amyot, ib. 35. Le prince conceda à la roine Baugency pour la commodité du traité, avec premesse qu'il lui seroit restitué si on ne pouvoit convenir [s'entendre], D'Aubigné, Hist. I, 141. Après avoir convenu [parlementé] ensemble quelques jours, et avoir si bien acheminé les affaires, Du Bellay, M. 25.

ÉTYMOLOGIE

Berry, conveindre ; provenç. convenir, covenir ; espagn. convenir ; portug. convir ; ital. convenire ; du latin convenire, se réunir en un lieu, convenir, de cum, et venire, venir. Palsgrave, p. 4, écrit : Il covient, et dit que cela se prononce : il coviant.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CONVENIR. Ajoutez : - REM. J. J. Rousseau a conjugué convenir, dans le sens de reconnaître la vérité, avec avoir : Ne reparlons plus de cela, je vous prie ; j'ai convenu de mon tort de trop bonne grâce, pour que vous deviez vous en souvenir, Rousseau, Lett. à Duchesne, 21 nov. 1771. Cela n'est pas correct.