« convertir », définition dans le dictionnaire Littré

convertir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

convertir

(kon-vèr-tir) v. a.
  • 1Transmuer une chose en une autre. Les alchimistes espéraient convertir en or les métaux qu'ils appelaient imparfaits. Jésus-Christ convertit l'eau en vin. Convertir du sucre en alcool. J'ai beau m'épuiser les veines Et tout mon sang en larmes convertir, Malherbe, V, 27. Ce feu véhément Convertirait en soi le liquide élément, Avant qu'il éteignît cette ardeur violente, Rotrou, Hercule mour. IV, 5. Savent-ils comment ce ver [le ver à soie] convertit le suc d'une feuille en filets d'or ? Rollin, Traité des Études, V, 5. Il lui permit de convertir en rentes viagères ou tontines une partie de ses actions, Raynal, Hist. phil. IV, 19.

    Fig. Convertir le doute en certitude. Les curiosités de la nature sont une source féconde pour l'imposture ; elle convertit des phénomènes singuliers en prodiges, Raynal, Hist. I, 17.

    Terme de droit. Changer la nature, l'espèce Convertir une obligation en contrat de constitution. Convertir une peine corporelle en peine pécuniaire.

  • 2Retirer d'une religion et amener à une autre. Les missions catholiques ont converti beaucoup d'idolâtres. Les musulmans convertissent à leur foi dans l'intérieur de l'Afrique une multitude de nègres. Il fut converti au protestantisme. Jésus-Christ, qui les voulait convertir [les païens], parle d'en haut à saint Paul qui en devait être le docteur, Bossuet, Hist. II, 7. Il faudrait les dompter et non les convertir, Chénier M. J. Charles IX, III, 2. J'ai calmé les chagrins, j'ai converti l'erreur, Chénier M. J. Fénelon, III, 2.

    Amener quelqu'un à des sentiments qu'il n'avait pas. Vous l'avez converti à notre cause.

    Absolument. On fait des missions, on prêche, on convertit.

  • 3Se convertir, v. réfl. Se transmuer. L'alcool se convertit en vinaigre. Tout ce qu'il a touché se convertit en or, Boileau, Art p. III. La peine corporelle se convertissait en peine pécuniaire, Montesquieu, Esp. VI, 19.

    Fig. Son amour se convertit en haine.

  • 4 Terme de logique. Ces deux propositions se convertissent, sont la converse l'une de l'autre.
  • 5Quitter une fausse religion pour la vraie. Les païens se convertirent.

    Rentrer dans le sein de la religion qu'on avait négligée. Mais, en priant pour son âme, chrétiens, songeons à nous-mêmes ; qu'attendons-nous pour nous convertir ? Bossuet, Duch. d'Orl. Ils se convertiront de leurs péchés, Bossuet, Hist. II, 7. Convertissez-vous à moi de tout votre cœur, Massillon, Car. Motifs de conv. Pendant une aimable jeunesse On n'est bon qu'à se divertir ; Et quand le bel âge nous laisse, On n'est bon qu'à se convertir, La Sabl. dans RICHELET.

HISTORIQUE

Xe s. Cum Jonas propheta cel populum habuit pretiet et convers, Fragment de Valenc. p. 468. Quant il se erent convers de via sua mala, ib. p. 469.

XIe s. Ce velt li reis, [que] par amor [elle se] convertisse, Ch. de Rol. CCLXVIII.

XIIe s. Tu convertis la meie plainte en goie [joie], Liber psalm. p. 36. Convertide [changée] est la tue fuireur [fureur], ib. p. 232. Et convertis saint Pol son compeignon, Ronc. p. 48. Deus qui'l [qui le] mist enz el regne, à vus le demandra ; Vus l'avez à garder quant se convertira, Th. le mart. 29.

XIIIe s. Et sitost que li aprentis iert à convenances au mestre, il poiera cinq sols qui seront converti ou pourfit de touz les maistres, Liv. des mét. 55. Qui vuet pecheors convertir Por eus faire à Dieu revertir, la Rose, 12079. Enprès demenda l'en se sarrazin qui a plusors femes, se convertist, laquelle il retendra, Liv. de just. 216. S'il sunt plege de deniers, et il sunt converti en blé, ou en vin, ou en autre coze, Beaumanoir, XLIII, 11. Quant il convient qu'aucuns ait damace, mix vaut qu'il soit converti en la soustenance de bone gent que de malvès, Beaumanoir, LIV, 12. Et li cors qui les biens devore, Si sera converti en cendre, Guersai. Ô vous, fill des hommes, convertissiez vous à moi, et ge auré pitié de vous, Psautier, f° 110. Mès Diex atent, et por atendre Se fist les braz en croiz estendre ; Ne veut pas que pechierres muere, Ainz convertisse à sa droiture, Rutebeuf, II, 111.

XIVe s. Et ne se depart ou ne delesse pas ses faiz ou diz des autres ou [au] cas que il les puet tourner et convertir à gieu ou à risée, Oresme, Eth. 138. Et pourroit estre converti par raison au contraire, Oresme, ib. 195. Puis soulphre et vif argent en issent, Qui en metaulx se convertissent, Nat. à l'alch. err. 164. [Que l'archevêque] Il voise en la cité, mais qu'il ait sauf conduis, Et presche tant la gent qu'il les ait convertis, Guesclin. 17053. Ensi chius [ce] rois païens fut adont convertis Par le voloir de Dieu, le roy de paradis, Baud. de Seb. XI, 488. Et torna par devers li et converti à son profit les biens de Gentil et de Simon lombars qui estoient acquis au roy, Lett. de rémission, Bibl. des Chartes, 4e série, t. II, p. 60.

XVe s. Arethuse… Qui en eaue fut par plour convertie, Deschamps, Mort de Guesclin. Aysement toutes ces deux parties se convertiroient contre nous, Commines, I, 5.

XVIe s. C'est afin qu'un chacun d'eux se convertisse de son iniquité, Calvin, Instit. 477. Ils leur envoyerent tous les chefs qui avoient consenty à la composition, pour convertir sur leurs testes tout le peché de la contravention au serment qu'ilz avoient presté, Amyot, les Gracques, 9. Lui qui les eaux profondes En desert convertit, Marot, IV, 319. Midas requit les dieux que tout ce qu'il toucheroit se convertist en or, Montaigne, II, 339.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. convertir, covertir ; espagn. convertir ; ital. convertire ; du latin convertere (avec changement de la 3e conjugaison en la 4e), tourner, convertir, de cum, et vertere, tourner (voy. VERSION).