« coudre.2 », définition dans le dictionnaire Littré

coudre

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

coudre [2]

(kou-dr'), je couds, tu couds, il coud, nous cousons, vous cousez, ils cousent ; je cousais ; je cousis, nous cousîmes ; je coudrai ; je coudrais ; couds, cousons, cousez, qu'ils cousent ; que je couse, que nous cousions ; que je cousisse ; cousant ; cousu v. a.
  • 1Attacher au moyen d'un fil passé dans une aiguille. Coudre deux morceaux d'étoffe. Coudre une pièce à un vêtement. Coudre un bouton, un cahier. La vieille crut qu'on pouvait sans dommages Du livre affreux détacher quelques pages ; Elle en prend quatre, et les coud proprement Pour relier un volume vivant [l'enfant de chœur dont la culotte était déchirée], Gresset, Lutrin viv.

    Absolument. Elle coud très bien. Je l'ai vue heureuse et parée ; Elle cousait, chantait, lisait, Béranger, Jeanne la rousse. Et c'est assez pour elle, à vous en bien parler, De savoir prier Dieu, m'aimer, coudre et filer, Molière, Éc. des f. I, 1.

    Fig. On ne sait quelle pièce y coudre, on ne sait quel remède y apporter.

    Coudre la peau du renard à celle du lion, joindre la ruse à la force. Car, disait-il, partout où la peau du lion ne peut atteindre, il faut y coudre la peau du renard, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. IV, p. 77, dans POUGENS. Vous savez coudre avec encor plus d'art Peau de lion avec peau de renard, La Fontaine, Poésies mêlées, XLII, à Turenne.

  • 2 Par extension. À sa naissance on le coud dans un maillot, Rousseau, Ém. I.

    Terme de treillageur. Arrêter les parties d'un treillage en bois par des liens de fer.

    Terme de vannier. Lier les sarments avec de l'osier.

    Terme de pêche. Coudre un filet, joindre plusieurs filets de la même espèce pour en former un grand.

    Terme de marine. Coudre un bordage, le clouer sur les membres.

  • 3 Fig. Assembler, mettre bout à bout. Si l'on cousait ensemble toutes les heures que l'on passe avec ce qui plaît, l'on ferait à peine d'un grand nombre d'années une vie de quelques mois, La Bruyère, IV.
  • 4Assembler sans art. Il croyait avoir tout sauvé en cousant à ses expressions le mot de sacramentel, Bossuet, Var. 4. De sorte que, pour ne point rompre le fil de la pièce, on s'avisa de les coudre au sujet du mieux que l'on put, Molière, Fâcheux, préf. Je ferais comme un autre, et, sans chercher si loin, J'aurois toujours des mots pour les coudre au besoin, Boileau, Sat. II. Je sais coudre une rime au bout de quelques vers, Boileau, ib. VII. Quand on ne s'applique qu'à des actions détachées, on coud des lambeaux qui ne sont point faits les uns pour les autres, Fénelon, XXI, 39. On leur apprend à coudre des phrases de Cicéron, Rousseau, Ém. II. J'ai suivi leur projet quant à l'événement, Y cousant en chemin quelque trait seulement, La Fontaine, Fabl. VI, 1.

HISTORIQUE

XIIe s. Bele Yolans en ses chambres seoit, D'un bon samit une robe cosoit, Romancero, p. 39. Bele Yolans en chambre coie Sur ses genouz pailes desploie, Cost un fil d'or, l'autre de soie, ib. p. 53. Mere, de quoi me chastoiez ? Est-ce de coudre ou de tailler ? ib. p. 54. Adès senti les pointes li clers de la custure, Cum li saint le cusurent après la tailleüre, Th. le mart. 168.

XIIIe s. Et fu li vaissiaus bien cousus et poiés, et fu assis en l'aigue [l'eau], Chron. de Rains, p. 95. Une meschine i troverez ; Jo quid ke vus la conustrez : à chandele cust la pucele, Lai del desiré. Cele ki esveillée fu E le bliaut aveit cosu, ib. Un vermeil samit [elle] ot vestu, Estoit à las molt bien cosu, Lai de Melion. Se aucuns cavatiers [savetier] mesprent en son mestier, si comme se il keust mauveisement un soulier ou de mauvais fil…, Liv. des mét. 233. Et pour ce qu'il convient que il taillent et cousent les robes aus haus homes aussi bien par nuit come par jour, ib. 144. Ces povres chapes mau cozues, Rutebeuf, 256.

XVe s. Si l'emporterent entre leurs bras dedans la forteresse, et luy cousirent, banderent et appareillerent ses playes et le gouvernerent si bien qu'il guarit, Froissart, liv. I, p. 225, dans LACURNE.

XVIe s. Quand la peau du lion n'y peult fournir, disoit-il, il y fault couldre aussi celle du regnard, Amyot, Lysand. 11. Ilz luy montroient leurs mains cousues à coups de flesches avec leurs pavois, Amyot, Crassus, 48. Ayant les cheveux et la barbe tous herissez et pouldreux, et le visage desfaict et cousu pour les ennuis qu'il avoit supportez, Amyot, Cicéron, 60. Il cousut celle pierre en sa ceincture, et puis nia qu'il l'eust prise, Amyot, Anton. 104. L'on couche le patient dedans l'une de ces auges, et puis le couvre l'on de l'autre, et les coust on l'une à l'autre, Amyot, Artax. 20. Toutes les deux trouppes se revinrent coudre ensemble ; et cette seconde meslée s'opiniastroit à bon escient, quand…, D'Aubigné, Hist. I, 278. Peu de gens voulant coudre la besongne que cette chaude teste entreprenoit, D'Aubigné, ib. I, 303. Tout cela combattoit cousu de façon que les testes des chevaux alloient jusques aux arçons des ennemis, D'Aubigné, ib. II, 287.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, keûse, coudre, kosou, cousu ; namurois, keûze ; rouchi, keute ; saintongeois, coudut, cousu ; provenç. coser, cozir, cuzir ; catal. cosir ; espagn. coser ; portug. cozer ; ital. cucire ; bas-lat. cucire, dans les Gloses d'Isidore, de consuere de cum, avec, et suere, coudre (voy. SUTURE). La forme est très contracte, mais régulière : consúere, donne cou-re, et, par l'attraction de la dentale par l'r, coudre, puis dans les temps primitifs reparaît l's du radical : je cousais, je cousis.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

2. COUDRE. - ÉTYM. Ajoutez : Bas-lat. cum aco et filo cosis, cousu avec aiguille et fil, Ms. lat. d'Oribase, Suppl. latin, VIIe siècle.