« cru », définition dans le dictionnaire Littré

cru

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

cru [1]

(kru) s. m.
  • 1La quantité dont une chose a crû, a pris croissance. Ces arbres ont bien poussé, voilà le cru de cette année.
  • 2Production. On leur a défendu d'apporter d'autres marchandises que celles du cru de leur pays, Montesquieu, Esp. XX, 8. Son vin noir et grossier mais désaltérant et sain est du cru de sa vigne, Rousseau, Ém. III.
  • 3Terroir considéré comme ce qui fait croître les végétaux et leurs produits. Ce vin-là est d'un bon cru. Après ce qui lui vient de son cru, rien ne lui paraît de meilleur goût que le gibier et les truffes que cet ami lui envoie, La Bruyère, III. Droit qui fut fixé à cinq pour cent sur toutes les marchandises des Indes et de la Chine, et à trois pour cent sur toutes celles du cru des îles de France et de Bourbon, Raynal, Hist. phil. IV, 26. Les seules denrées du cru couvrent notre table, Rousseau, Hél. V, 2. Des vins d'un cru céleste épanchent leurs trésors, Delille, Parad. perdu, V.

    Vin du cru, vin fait sur le lieu même où il est bu. Moi, gai comme un dieu sans nectar, Au vin du cru je me résigne, Béranger, Nourrice.

    Fig. Cet ouvrage est une compilation, l'auteur n'y a rien mis de son cru. Ce que nous désirons aujourd'hui avec tant de chaleur et de besoin vient immédiatement du cru de Dieu, Guez de Balzac, Disc. à la régente. Le vieux marchand me dit à l'oreille : On voit bien que ce n'est pas de son cru [à M. de Beaufort], Retz, III, 167. Il est bien nécessaire d'employer de l'argent à des perruques, lorsque l'on peut porter des cheveux de son cru qui ne coûtent rien, Molière, Avare, I, 5. C'est de votre cru que vous dites cela, Bossuet, Instr. 2. Il n'a rien de son cru que le mensonge, Bossuet, I, Pent. 1. La pièce est de mon cru, Racine, Épigr. Il sait par cœur une infinité de bons contes qu'il a récités tant de fois comme de son cru, qu'il est parvenu à se figurer qu'ils en sont effectivement, Lesage, Gil Blas, III, 11.

    Fig. Le vin de mon cru, le vin de son cru, les actions, les pensées, les paroles de quelqu'un. Lorsque Mondor osa te dire en face Que tu saignas du nez dix fois au moins, Te citant l'heure et le jour et la place. - Conte grossier que personne n'a cru, Qui n'était pas digne de ma colère : On me connaît, et le vin de mon cru Ne passera jamais pour de l'eau claire, Pons, (de Verdun) les Excuses dans les Contes et poésies diverses, p. 191.

  • 4 Terme de chasse. Milieu d'un buisson, dit plus communément creux, où la perdrix se retire quelquefois pour éviter la poursuite des chiens.

REMARQUE

Cru n'est pas autre chose que le participe passé du verbe croître qui s'écrit crû ; l'Académie devrait donc l'écrire avec un accent circonflexe, comme elle fait pour dû : réclamer son dû.

HISTORIQUE

XVIe s. Est dit vin du cru de la ditte ville tout vin qui croist dedans les limittes du ruisseau de Saint Jouandeau…, Nouv. coust. génér. t. IV, p. 911. Je sçais très bien sentir, à mesurer ma portée, que mon terroir n'est aulcunement capable d'aulcunes fleurs trop riches que j'y treuve semées et que touts les fruicts de mon creu ne les sçauroient payer, Montaigne, II, 99.

ÉTYMOLOGIE

Crû, participe de croître.