« cygne », définition dans le dictionnaire Littré

cygne

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

cygne

(si-gn') s. m.
  • 1Oiseau palmipède, aquatique, du genre de l'oie. Le cygne règne sur les eaux à tous les titres qui fondent un empire de paix, la grandeur, la majesté, la douceur ; avec des puissances, des forces, du courage et la volonté de n'en pas abuser et de ne les employer que pour la défense, il sait combattre et vaincre sans jamais attaquer, Buffon, Cygne. À sa noble aisance, à la facilité, à la liberté de ses mouvements sur l'eau, on doit reconnaître le cygne, non-seulement comme le premier des navigateurs ailés, mais comme le plus beau modèle que la nature nous ait offert pour la navigation ; son cou élevé et sa poitrine relevée et arrondie semblent en effet figurer la proue du navire fendant l'onde ; son large estomac en représente la carène ; son corps, penché en avant pour cingler, se redresse à l'arrière et se relève en poupe ; la queue est un vrai gouvernail ; les pieds sont de larges rames ; et ses grandes ailes, demi-ouvertes au vent et doucement enflées, sont les voiles qui poussent le vaisseau vivant, navire et pilote à la fois, Buffon, ib. À leur tête s'avance et nage avec fierté Le cygne au cou superbe, au plumage argenté, Delille, Jardins, III.

    Avoir la blancheur du cygne, être d'une blancheur éclatante. Longtemps on n'a connu que le cygne blanc ; aussi en a-t-on fait le type de la blancheur Aujourd'hui on connaît des cygnes noirs, originaires de la Nouvelle-Hollande.

    Il est blanc comme un cygne, se dit d'un homme qui a la barbe et les cheveux tout blancs.

    Cou de cygne, en parlant d'une femme, cou élégant et flexible. J'ai pris femme noble aux doux yeux, Aux mains blanches, au cou de cygne, Béranger, Contr. de m.

    Familièrement et par antiphrase. Blanc comme un cygne qui casse des noix, c'est-à-dire noir comme un corbeau.

    Fig. Faire un cygne d'un oison, louer une personne, une chose démesurément.

    Le chant du cygne, chant mélodieux que l'antiquité attribuait au cygne près de mourir. Ce sera là que ma lyre, Faisant son dernier effort, Entreprendra de mieux dire Qu'un cygne près de sa mort, Malherbe, II, 2. Un jour le cuisinier, ayant trop bu d'un coup, Prit pour oison le cygne ; et, le tenant au cou, Il allait l'égorger, puis le mettre en potage ; L'autre, prêt à mourir, se plaint en son ramage, La Fontaine, Fabl. III, 12. Ce que l'on dit des cygnes, qu'ils ne chantent que quand ils sont près de mourir et qu'alors ils chantent mélodieusement, n'est fondé que sur une erreur populaire, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. I, p. 50, dans POUGENS. À leurs chants on croirait entendre dans les cieux De cygnes argentés un chœur mélodieux, Delille, Énéide, VII. Je suis un cygne aussi ; je meurs, je puis chanter, Lamartine, Socr. 342. Mais il ne faut pas qu'on ignore Qu'en chantant le cygne a fini, Béranger, Ma dern. chans.

    Figurément, le chant du cygne, la dernière composition d'un musicien, d'un poëte distingué.

  • 2 Fig. Poëte, orateur, musicien illustre surtout par la douceur et le fini de ses compositions, plutôt que par l'originalité et la grandeur. Le cygne de Mantoue, Virgile. Le cygne de Cambrai, Fénelon. De Bossuet, on dit l'aigle de Meaux ; on ne dirait pas le cygne.
  • 3 Terme d'astronomie. Constellation de l'hémisphère septentrional.
  • 4Cou de cygne, partie de l'avant-train d'une voiture à quatre roues, qui est courbée afin de laisser passer les roues de devant quand la voiture tourne.

HISTORIQUE

XIIe s. Paons rotiz et bons cisnes pevreis, Et venoison à molt riche plenté : Que tout li pires an ait tot à son gré, Raoul de C. 62.

XIIIe s. Et contrefaisoient le cinne qui chante quant il doit morir, Hist. occid. des croisades, t. II, p. 293. C'est oisel cler semé en terre, Si legierement congnoissable, Qu'il est au cine noir semblable, la Rose, 8746. Puis-ge voler avec les grues, Voire saillir outre les nues, Cum fist li cine Socratès ? ib. 5443. Quant il encommençoient à corner, vous deissiez que ce sont les voiz des cynes qui se partent de l'estanc, Joinville, 269. Qui partout rent l'ame benigne, Qui en trait toute riens maligne, Et d'innocence si l'acesme, Qu'il la fait plus blanche que cygne, J. de Meung, Tr. 261.

XVe s. Au roi fut presenté ung cherf-volant, au duc d'Orliens ung blanc chisne, au duc de Bourgoigne un lyon, Chastelain, Chron. des ducs de Bourg. 1re part. ch. 20.

XVIe s. Aussi blanches que cignes, Carloix, III, 30. Tout blanc oysel n'est pas cygne, Rozier histor. I, 7. On ne voit cyne noir, nulle neige noire, Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 17. Vous y serez cogneu comme un oyson parmy les cygnes, je voulois dire comme un cygne parmy les oysons, D'Ambroise, Les Napolitaines, Anc. théâtre fr. t. VII, p. 256.

ÉTYMOLOGIE

Picard, cyngne ; provenç. cigne ; espagn. cisne ; ital. cigno ; du latin cycnus, de ϰύϰνος, qui tient au latin ciconia, cigogne, par l'intermédiaire du sanscrit çakuni, oiseau en général.