« désavouer », définition dans le dictionnaire Littré

désavouer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

désavouer

(dé-za-vou-é) v. a.
  • 1Refuser d'avouer une personne en ce qu'elle a dit ou fait. Le désavouerez-vous ? et du don qu'il me fait Voudrezvous retarder le bienheureux effet ? Corneille, Cinna, III, 4. La reine qui m'entend peut me désavouer, Racine, Bérén. V, 7. J'attaquai les Romains ; et ma mère éperdue [qui avait trahi son mari Mithridate] Me vit, en reprenant cette place rendue, à mille coups mortels contre eux me dévouer, Et chercher en mourant à la désavouer, Racine, Mithr. I, 1.

    Dans le même sens, désavouer quelqu'un de quelque chose. Rends-moi mon fils, ingrat. - Il m'en désavouerait, Corneille, Hér. IV, 5. Et vous avez eu peur de le désavouer Du trait qu'à ce pauvre homme il a voulu jouer, Molière, Tart. IV, 3. C'est un homme né pour les allées et venues, pour aller plus loin que sa commission, et en être désavoué, La Bruyère, II.

    Absolument. Quelques-uns pensent qu'aucun homme dans tout l'empire, hors l'empereur, n'aurait osé se charger d'une si terrible responsabilité [l'incendie de Moscou] ; depuis, sa conduite désavoua sans désapprouver, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 2.

    Terme de jurisprudence. Déclarer qu'on n'a pas autorisé quelqu'un en ce qu'il a fait. Désavouer un mandataire, un agent, un ambassadeur.

  • 2Ne pas avouer, ne pas ratifier, en parlant des choses. On doit désavouer de pareils moyens. Nous désavouons tous le meurtre de Zopire, Voltaire, Fanat. V, 1. Le roi va désavouer la lettre de son confesseur, Maintenon, Lettre au card. de Noailles, 16 mars 1697.

    Désavouer un dépôt, nier qu'on l'ait reçu. Je la [une chose baillée en garde] pourrais rendre quelquefois de telle façon, et devant tant de personnes, que je ferais mieux de la désavouer tout à fait, Malherbe, le Traité des bienf. de Sénèque, IV, 9.

  • 3Être en contradiction avec. De la religion c'est ainsi qu'ils se jouent ; Ils ont un air pieux répandu sur le front Que leurs actions désavouent, Deshoulières, Ép. chagrine.
  • 4Prétendre qu'on n'a pas dit ou fait quelque chose. Vous l'avez dit, vous ne sauriez le désavouer. Désavouer hardiment les choses les plus évidentes. Ces femmes ne songèrent qu'à désavouer leur faute, Fénelon, Tél. X. Pourquoi [ô Homère] viens-tu me désavouer [à moi Achille] que tu me dois la gloire de ton plus beau poëme ? Fénelon, t. XIX, p. 133.

    Ne pas désavouer, ne pas nier, convenir. Je ne désavoue pas que j'en aie été fâché.

  • 5Ne pas reconnaître comme sien. Désavouer quelqu'un pour son parent. Il désavoua effrontément son seing. Ma valeur n'a point lieu de te désavouer, Corneille, Cid, III, 6. Je le désavouerais pour frère ou pour époux, Corneille, Hor. II, 6. Cette noble fierté désavoue un tel père, Corneille, D. Sanch. V, 5. Ainsi donc vous descendez en vain des aïeux dont vous êtes né, ils vous désavouent pour leur sang, Molière, Festin, IV, 6. Le désavouerez-vous pour n'avoir pas de seing ? - Pourquoi désavouer un billet de ma main ? Molière, Mis. IV, 3. Ou révoquez ou désavouez une lettre qui déshonore…, Bossuet, Lett. 181. Qui moi ? moi de Phébus te dicter les leçons ? Moi dans l'ombre ignoré, moi que ses nourrissons Pour émule aujourd'hui désavoueraient peut-être, Chénier, Élég. 18.

    Plus particulièrement. Désavouer quelqu'un, dire qu'on ne l'a pas pour ami, ou, si c'est une femme qui parle, pour amant. … Xipharès n'a point trahi son père ; Vous vous pressez en vain de le désavouer, Racine, Mithr. II, 4.

  • 6Renier, condamner. Lui-même désavoua les doctrines qu'il avait soutenues. Des principes que la morale désavoue, Dict. de l'Académie. Qu'il s'en prenne à ses vers que Phébus désavoue, Boileau, Sat. IX. Va faire chez tes Grecs admirer ta fureur ; Va, je la désavoue, et tu me fais horreur, Racine, Andr. V, 3. Son cœur désavoue ces expressions divines, Massillon, Car. Mort.
  • 7Se désavouer, v. réfl. Être désavoué. De pareilles paroles ne se désavouent pas aisément.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et Artus li dist : ge vos pri que vos ne me desavoez pas de fil [pour fils] ; car ge ne sauroie où aler, Merlin, f° 74, recto. Cil ne garde pas bien se [sa] foi vers son segneur, qui desavoue ce qu'il doit tenir de li, Beaumanoir, XLV, 1. Li sires ne pot pas desavouer le fet de son serjant, Beaumanoir, XXIX, 3. De tix [tels] cas pot li sires desavouer le fet de son sergant, s'il n'est atains de ce qu'il li feist fere, Beaumanoir, LI, 21.

XVe s. Et que eulx se trouveroient desadvouez, Commines, V, 16.

XVIe s. Desadvouant [niant] mesme avoir sceu que…, Montaigne, I, 39. C'est aux despens de nostre honneur que nous desadvouons nostre pensée, Montaigne, IV, 169. La peincture mesme qu'en faict l'academie ne me desadvouera pas, comme je pense, de dire ainsi de sa part…, Montaigne, I, 210. Le vassal est tenu avouer ou desavouer son seigneur, sinon qu'il y eust contention de tenure entre deux seigneurs, Loysel, 645. Le vassal mal desavouant [qui refuse à tort de reconnaître son seigneur], perd son fief, Loysel, 647.