« dire », définition dans le dictionnaire Littré

dire

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

dire

(di-r'), je dis, tu dis, il dit, nous disons, vous dites, ils disent ; je disais ; je dis, nous dîmes ; je dirai ; je dirais ; dis, qu'il dise ; disons, dites, qu'ils disent ; que je dise, que tu dises, qu'il dise, que nous disions, que vous disiez, qu'ils disent ; que je disse ; disant, dit v. a.

Résumé

  • 1° Exprimer par la parole.
  • 2° on dit.
  • 3° dire, pris absolument.
  • 4° nommer, désigner.
  • 5° énoncer par écrit.
  • 6° réciter, lire, débiter.
  • 7° raconter.
  • 8° juger, penser, être tenté de croire.
  • 9° avertir, prévenir, ordonner.
  • 10° offrir, proposer.
  • 11° exprimer, en parlant de choses auxquelles on attribue une expression.
  • 12° vouloir dire.
  • 13° trouver à dire.
  • 14° en dire.
  • 15° se le faire dire.
  • 16° que dis-je ?
  • 17-30° locutions diverses.
  • 31° se dire.
  • 1Exprimer par la parole. Que dit-il ? J'ai quelque chose à vous dire. Vous lui direz bien des choses honnêtes de ma part. Il m'a dit qu'il fallait partir. Il n'a dit qu'un mot. Il dira quelques paroles, et se retirera. Il fait son idole de son sujet et tombe dans l'intempérance de ces orateurs violents qui vont toujours plus loin que leur but et ne croient jamais en dire assez s'ils n'en disent trop, Guez de Balzac, Socr. chrét. Disc. 10. Te dirai-je un penser indigne, bas et lâche ? Corneille, Poly. III, 6. Et si nous n'aimions point à nous brouiller l'esprit Ou de ce que l'on fait ou de ce que l'on dit, Corneille, Imitation, I, 11. Ne considère point si l'auteur d'un tel livre Fut plus ou moins savant ; Mais s'il dit vérité, s'il t'apprend à bien vivre, Feuillette-le souvent, Corneille, ib. I, 5. Je n'ai point sur ma langue un assez grand empire ; De ce que je dirais je ne répondrais pas, Molière, Mis. V, 1. Tous les autres comédiens en ont dit tous les maux du monde, Molière, Crit. de l'Éc. des f. 7. Je reçois tous ses soins avec beaucoup de joie, J'admire ce qu'il dit, j'estime ce qu'il est, Molière, Mis. IV, 3. Je vous trouve plaisant d'user d'un tel empire Et de me dire au nez ce que vous m'osez dire, Molière, ib. IV, 3. Donc, de ce que je dis on ne fera nul cas ? Molière, Tart. II, 2. Et depuis un long temps nous nous sommes tout dit, Molière, Amphitr. I, 4. Ne vous ai-je pas recommandé de me venir dire d'abord tout ce que vous voyez ? Molière, Mal. imag. II, 11. Parlerai-je, monsieur, selon ma conscience, Ou comme auprès des grands on le voit usité ? Faut-il dire la vérité, Ou bien user de complaisance ? Molière, Amph. II, 1. On dit à la cour du bien de quelqu'un pour deux raisons : la première, afin qu'il apprenne que nous disons du bien de lui ; la seconde, afin qu'il en dise de nous, La Bruyère, VIII. Il dit ridiculement des choses vraies, et follement des choses sensées et raisonnables, La Bruyère, XII. Combien tout ce qu'on dit est loin de ce qu'on pense ! Racine, Brit. V, 1. Et peut-être, après tout, que, sans trop se forcer, Tout ce qu'il a pu dire, il a pu le penser, Racine, Bajaz. III, 3. César, que me dis-tu de tes fils, de partage ? Voltaire, M. de Cés. I, 1. Nous sommes dans un siècle de raison ; nous trouvons aisément ce qui nous paraît la vérité, et nous osons le dire, Voltaire, Les oreilles, 4. On peut avec ce revenu assuré dire tout ce qu'on pense de la compagnie des Indes, du parlement, de nos colonies, du roi, de l'être en général, de l'homme et de Dieu, Voltaire, ib. 3. Lorsque les yeux chercheront sous les rides Les traits charmants qui m'auront inspiré, Des doux récits les jeunes gens avides Diront : quel fut cet ami tant pleuré ? Béranger, Bonne vieille.

    Qui vous dit, qui vous a dit que… c'est-à-dire sur quoi vous fondez-vous pour dire ou croire… ?

    Dire un secret, le révéler. Elles [les filles] veulent qu'on leur dise tout, et elles veulent aussi tout dire, Fénelon, Éduc. des filles, 2. En disant ce secret ou faux ou véritable, Voltaire, M. de Cés. III, 2.

    Dire des injures à quelqu'un, l'injurier. Épargnezmoi cette peine, je vous supplie, et épargnez-vous à vous-même de grosses injures que je pourrais bien vous dire dans ma mauvaise humeur, Racine, Lett. à quelques amis, X.

    Dire à quelqu'un ses vérités, lui représenter sans ménagement les défauts qu'il a. N'apprêtons point à rire aux hommes En nous disant nos vérités, Molière, Amph. Prol. Vous ne lui voulez mal et ne le rebutez Qu'à cause qu'il vous dit à tous vos vérités, Molière, Tart. I, 1.

    Dire à quelqu'un son fait, lui parler vertement, le malmener en paroles. Il me donna un soufflet, mais je lui dis bien son fait, Molière, Pourc. I, 6.

    Dire son avis, sa pensée, exprimer ce qu'on pense, l'opinion qu'on a. N'allez point là-dessus me consulter ici ; Peut-être y pourriez-vous être mal adressée, Et je suis pour les gens qui disent leur pensée, Molière, Mis. V, 3. C'est un particulier qui a dit son avis dans un gros livre qu'on ne lit point, Voltaire, Dial. 2.

    Dire son mot, ajouter son avis aux avis déjà exprimés, et aussi révéler ses intentions secrètes.

    Sans mot dire, sans dire mot, sans prononcer une parole, et aussi sans protester.

    Je vous l'avais bien dit, sorte de reproche que l'on adresse à quelqu'un que l'on a averti de ce qui allait lui arriver. Quelquefois il lui disait : je vous l'avais bien dit ; singulière manière de consoler ; satisfaction que la vanité se donne aux dépens de la douleur, Staël, Corinne, XVIII, 1.

    Dire la bonne aventure, prédire l'avenir.

    Dire pis que pendre de quelqu'un, dire le diable de quelqu'un, en dire toute sorte de mal.

    Se dire quelque chose à soi-même, faire en soi-même des réflexions, un raisonnement. Je me le suis dit vingt fois.

    Se dire l'un à l'autre, se dire réciproquement quelque chose. Ils se sont dit qu'ils s'aimaient.

    En dire de sèches, faire des contes satiriques et libres, dire des vilenies, mais d'une manière qui ne manque pas de sel.

    Mon petit doigt me l'a dit, cela se dit aux enfants de ce qu'on a appris par des voies qu'ils ignorent. Argan à Louison : Prenez-y bien garde au moins ; car voilà un petit doigt qui sait tout, qui me dira si vous mentez, Molière, Mal. imag. II, 11.

  • 2On dit, c'est-à-dire le bruit court. On dit que nous allons avoir la guerre. On dit une sigulière nouvelle. On dit, et sans horreur je ne puis le redire, Qu'aujourd'hui par votre ordre Iphigénie expire, Racine, Iph. IV, 6.

    S. m. C'est un on dit. Ce sont des on dit. Il ne faut pas ajouter foi à tous ces on dit.

    On dit, s'emploie aussi lorsque nous voulons parler d'une locution ou expression usuelle. On dit en français savoir gré pour être reconnaissant.

  • 3Dire pris absolument. C'est, comme vous dites, une mauvaise action. Il faut se bien comporter et laisser dire. De pas mis avec rien tu fais la récidive, Et c'est, comme on t'a dit, trop d'une négative, Molière, F. sav. II, 6. Le bonhomme disait : ce sont là jeux de prince ; Mais on le laissait dire…, La Fontaine, Fabl. IV, 4. Quiconque ne voit guère N'a guère à dire aussi, La Fontaine, Fabl. IX, 2. Ils étaient pêle-mêle avec les ennemis, la rivière entre deux, comme disent les goujats, Sévigné, 193. Oui, mais avec tout cela, diriez-vous bien pourquoi Cyrus a tant conquis de provinces ? Boileau, Héros de romans.

    Comme dit l'autre, locution familière qui équivaut à : comme on dit, ou comme dit le proverbe. Tout ça, comme dit l'autre, n'a été que de l'onguent miton-mitaine, Molière, Méd. m. lui, III, 2.

    Poétiquement, j'ai dit, il dit, se mettent à la fin d'un récit. Elle dit, et du vent de sa bouche profane Lui souffle avec ces mots l'ardeur de la chicane, Boileau, Lutr. I.

    J'ai dit, équivaut aussi à je n'ai plus rien à dire.

    Quand, citant un discours, des paroles textuelles, on intercale le verbe dire, ce verbe et son sujet subissent une inversion, le sujet se mettant après le verbe. Vous allez, m'a dit notre ami, à Paris. Je ferai, dit-il, la chose en diligence. Mais, dira-t-on, cela est impossible. Il a, m'a-t-on dit, l'intention de parler. Cela, dis-je, est impossible. La résolution en est prise, vous dis-je, Molière, Mis. V, 1. L'épouse que tu prends, sans tache en sa conduite, Aux vertus, m'at-on dit, dans Port-Royal instruite…, Boileau, Sat. X.

    Dire d'un, dire d'autre, tenir un langage qui varie. Qu'est ceci ? s'écria le mangeur de moutons : Dire d'un, puis d'un autre ! est-ce ainsi que l'on traite Les gens faits comme moi ? La Fontaine, Fabl. IV, 16.

    Dire d'or, dire, promettre tout ce qui peut être désiré.

    Dans le même sens. Il dit d'or, et n'a pas le bec jaune.

    Dire d'or signifie aussi, par une sorte d'ironie, parler disertement, mais hors de propos, ou sans utilité. Dans ce conseil de sages, de héros, On entendait les plus nobles propos : Le bien public, la vertu les inspire… Ils disaient d'or et ne concluaient rien, Voltaire, Puc. I.

    Bien dire, parler d'une façon convenable, s'exprimer en bons termes, dire ce qu'il faut. Ce sera là que ma lyre, Faisant un dernier effort, Entreprendra de mieux dire Qu'un cygne près de sa mort, Malherbe, II, 2. Soyez beau, bien disant, La Fontaine, Coupe. Mes paroles sont assez bonnes ; je les range comme ceux qui disent bien, Sévigné, 74. Nous avons eu une conversation où j'ai bien dit, ce me semble, Sévigné, 158. Ainsi berné le novice interdit Comprit en soi qu'il n'avait pas bien dit, Et qu'il serait malmené des commères, Gresset, Vert-Vert, III. Vous avez bien raison, mon cher maître ; on veut toujours dire mieux qu'on ne doit dire ; c'est le défaut de presque tous nos écrivains, D'Alembert, Lettre à Volt. 26 janv. 1767. Quelque génie qu'on ait, on ne dit pas mieux qu'Homère quand il dit bien, Diderot, Lettre sur les sourds et muets.

    L'art de bien dire, l'éloquence.

    Substantivement, le bien-dire. Ces grands orateurs romains qui avaient l'art de persuader ce qu'ils voulaient par la force et les charmes de leur bien-dire, Marguerite de Navarre, BUFFET, Observ. p. 120, 1668.

    Être sur son bien-dire, sur son beau-dire, être en train de parler, et aussi affecter de bien parler, ou parler d'un sujet de prédilection. On dit dans le même sens se mettre sur son bien-dire (voy. BIEN-DIRE).

    Bien-disant, voy. BIEN-DISANT.

    PROVERBE

    Le bien-faire vaut mieux que le bien-dire, les bonnes actions sont préférables aux belles paroles.
    L'Académie, au mot BIEN-DIRE, dit que le trait d'union ne se met que dans la locution : être sur son bien-dire ; mais que, dans le proverbe rapporté ci-dessus, on écrit le bien dire sans trait d'union ; puis, citant de nouveau ce proverbe au verbe DIRE, elle met le trait d'union : le bien-dire. Il est donc loisible de mettre ou d'omettre le trait d'union ; et il vaut mieux le mettre.
  • 4Nommer, exprimer. Vous bénirez le mal qui vous est avenu, Si l'on peut dire un mal un fortuné veuvage, Mairet, Soph. V, 6. Qui dit froid écrivain dit détestable auteur, Boileau, Art p. IV. … La source du comique : je dis de celui qui…, La Bruyère, Disc. s. Théophr. Mais, mon cher Sidrac, pourquoi dites-vous toujours ma faculté pensante ? que ne dites-vous mon âme tout court ? Voltaire, Les oreilles, 4.
  • 5Énoncer par écrit. Je vous ai dit dans ma dernière lettre que… Tel auteur a dit là-dessus d'excellentes choses. Cicéron dit dans son traité de la République. Presque tous les historiens ont dit ce que je fais dire ici à Mithridate, Racine, Préface de Mithridate.

    Il se dit de l'écrit même. Que dit la loi ? à ce que dit l'histoire. Comme dit le proverbe.

  • 6Réciter, lire, débiter. Dire sa leçon. Cet acteur a mal dit son rôle. Je vous dirai, si vous voulez, pour vous désennuyer, le conte de Peau d'âne ou bien la fable du Corbeau et du Renard qu'on m'a apprise depuis peu, Molière, Mal. imag. II, 11. La démangeaison de dire ses ouvrages est un vice attaché à la qualité de poëte, Molière, Comtesse, 1.

    Absolument. Cet acteur dit bien, il a un bon débit.

    Dire la messe, célébrer la messe. Faire dire une messe pour quelqu'un. Dire les vêpres, les chanter.

    Terme de musique. Il dit bien les récitatifs, il les chante bien. Dire un morceau, exécuter un morceau de musique.

  • 7Raconter. Dis-moi de mon époux le véritable sort, Corneille, Perthar. I, 3. Je pourrai de mon père émouvoir la tendresse, Et lui dire un amour qu'il peut vouloir troubler, Racine, Phèdre, III, 6. Et moi je suis venu, détestant la lumière, Vous dire d'un héros la volonté dernière, Racine, ib. V, 6. Je dirai les exploits de ton règne paisible, Boileau, Épît. I. Je vais dire les douleurs de l'Église persécutée, Chateaubriand, Mart. 4.

    Poétiquement. Muses, dites… Muse, dis la colère d'Achille.

  • 8Juger, penser, être tenté de croire. Qu'en dites-vous ? Que dira-t-on de vous ? Alléguant un grand rhume : il ne pouvoit que dire, Sans odorat…, La Fontaine, Fab. VII, 7.

    Qui l'eût dit ? signifie : aurait-on pu le penser, l'imaginer ?

    Substantivement. Le qu'en dirat-on, les propos qui se tiennent sur le compte de quelqu'un. Se moquer, être au-dessus du qu'en dirat-on. Braver le qu'en dira-t-on. Être sensible au qu'en dira-t-on.

    Savoir qu'en dire, avoir passé par là, avoir eu l'expérience de la chose. Notre mélancolique en savait bien que dire, Régnier, Sat. VII. Beaucoup d'honnêtes gens en pourraient bien que dire, Molière, Éc. des f. III, 3. Vraiment je sais bien qu'en dire, Sévigné, 562.

    Ne savoir que dire, être embarrassé. Cela faisait que le bon sire Ne savait tantôt plus qu'y dire, La Fontaine, Ann.

    Absolument. Vous diriez que, on dirait que… avec l'indicatif, on penserait, on s'imaginerait. On dirait, quand tu veux, qu'elle [la rime] te vient chercher, Boileau, Sat. II. On dirait que le ciel est soumis à sa loi, Et que Dieu l'a pétri d'autre limon que moi, Boileau, Sat. V.

    Vous diriez que, on dirait que… avec le subjonctif. On dirait que le ciel, qui se fond tout en eau, Veuille inonder ces lieux d'un déluge nouveau, Boileau, Sat. VI. On dirait que, pour plaire, instruit par la nature, Homère ait à Vénus dérobé sa ceinture, Boileau, Art p. III. On dirait, à vous voir assemblés en tumulte, Que Rome des Gaulois craigne encore une insulte, Crébillon, Catil. IV, 1. Vous diriez qu'il soit devenu un autre David, Bossuet, le Tellier. Vous diriez qu'il ne fasse rien en ce monde, Bossuet, Loi de Dieu, 3.

    Vous diriez, on dirait d'un fou, d'un homme ivre, c'est-à-dire il se conduit, il parle comme s'il était fou, ivre (la locution s'explique par une ellipse : on dirait d'un fou, c'est-à-dire on dirait cela d'un fou, on dirait que ce qu'il dit ou fait est d'un fou, et, elliptiquement : on dirait d'un fou). Et l'on dirait d'un tas de mouches reluisantes Qui suivent en tous lieux un doux rayon de miel, Molière, Mélic. I, 3. Les trois vieilles femmes brûlaient un des roseaux de la gerbe ; on aurait dit des Parques coupant le premier fil de la vie de René, Chateaubriand, Natch. 366. Voyez même, comme les traits du même homme varient… vous diriez de plusieurs êtres différents, Bernardin de Saint-Pierre, Harm. liv. V, Harm. anim.

  • 9Avertir, prévenir, ordonner, conseiller. Allez lui dire de venir. Ah ! mon papa, je vous demande pardon ; c'est que ma sœur m'avait dit de ne pas vous le dire, Molière, Mal. imag. II, 11. Dites-leur qu'elles descendent, Molière, les Préc. 3. Dites au roi, seigneur, de vous l'abandonner, Racine, Esther, II, 1. Qu'on dise à Josabeth Que Mathan veut ici lui parler en secret, Racine, Athal. III, 1.

    Absolument. Vous n'avez qu'à dire, locution qui signifie : parlez et je ferai ce que vous voudrez. Comment, coquin ! - Monsieur, vous n'avez rien qu'à dire, Je mentirai si vous voulez, Molière, Amph. II, 1.

  • 10Offrir, proposer. J'ai trouvé ces objets si chers que je n'ai rien dit. Dites-en un prix raisonnable.
  • 11Exprimer, en parlant des choses auxquelles on attribue une expression. Un silence respectueux dit beaucoup. Et puisqu'aucun soupçon ne dit rien à Phocas, Soyez encor son fils et ne vous montrez pas, Corneille, Héracl. II, 2. Et malgré tous vos soins et votre adresse à feindre, Mon astre me disait ce que j'avais à craindre, Molière, Mis. IV, 3. Qu'ai-je fait ? que veut-il ? et que dit ce silence ? Racine, Bérén. II, 5. Ce front satisfait Dit assez à mes yeux que Porus est défait, Racine, Alex. III, 1. Et ce poison vous dit les volontés du roi, Racine, Mithrid. V, 2. Tout cela dit assez que le trône m'est dû, Racine, Théb. IV, 3. Et son silence même, accusant sa noblesse, Nous dit qu'elle nous cache une illustre princesse, Racine, Iphig. I, 2. … Vous portez, madame, un gage de ma foi, Qui vous dit tous les jours que vous êtes à moi, Racine, Mithr. II, 4. Ma pensée au grand jour partout s'offre et s'expose ; Et mon vers bien ou mal dit toujours quelque chose, Boileau, Épît. IX. Le cœur ne me dit rien pour les devoirs de la religion, Massillon, Car. Prospér.

    Le cœur me le disait bien, j'en avais le pressentiment.

    Cette femme a de beaux yeux, mais ils ne disent rien, ils sont sans expression.

    Cela ne dit rien au cœur ni à l'esprit, cela ne les touche point, ne les émeut aucunement.

    Familièrement. Cela ne dit rien, cela n'importe pas à l'affaire, cela n'empêche pas.

    Ne dire rien, se dit aussi des personnes dont les paroles n'ont guère de sens. Voilà bien des paroles sans rien dire, Bossuet, Var. XII, § 2.

    Familièrement. C'est beaucoup parler pour ne rien dire.

  • 12Vouloir dire, signifie faire entendre, insinuer, en parlant des personnes. Que voulez-vous dire ? De quoi s'offense-t-il ? et que veut-il me dire ? Y vat-il de sa gloire à ne pas bien écrire ? Molière, Mis. IV, 1. Que voulez-vous donc dire, mes pères ? comment entreprenez-vous de soutenir après cela qu'aucun jésuite n'est d'avis qu'on puisse tuer pour des médisances ? Pascal, Prov. 13. Que me voulez-vous dire de pénitence et de pardon ? Sévigné, 374. Ce qu'une judicieuse prévoyance n'a pu mettre dans l'esprit des hommes, une maîtresse plus impérieuse, je veux dire l'expérience, les a forcés de le croire, Bossuet, Reine d'Anglet.

    Que veut-il dire ? s'est dit dans le sens de pourquoi. Son Louis soupire Après ses appas ; Que veut-elle dire De ne venir pas ? Malherbe, VI, 7.

    Dénoter, en parlant des choses. Je ne sais ce que cela veut dire. Que veut dire ce retard ? … Achevez, seigneur, ce mais, que veut-il dire ? Corneille, Nicom. III, 7.

    Signifier. Que veut dire ce mot, cette phrase ? Cela est mal construit et ne veut rien dire.

  • 13Trouver à dire, c'est-à-dire trouver à blâmer. Il y a, il y aurait bien à dire, il y a à reprendre, à blâmer. Vous trouveriez quelque chose à dire dans le ciel, si je n'y étais avec vous, Guez de Balzac, liv. I, lett. 14. Ce que je trouve à dire en la confidence que fait Cléopâtre, Corneille, Ex. de Pompée. On trouve à dire à la frugalité de vos repas, Sévigné, 427. L'empereur ne trouve rien à dire à ces censures, Bossuet, Lett. 194. Ayant eu la bonté de déclarer qu'elle [Votre Majesté] ne trouvait rien à dire dans cette comédie qu'elle défendait de produire en public, Molière, 1er placet au roi.

    Trouver à dire, regretter l'absence. Mettez-vous donc bien en tête que je vous trouve à dire plus que je ne voudrais dans toutes les parties où l'on m'entraîne, Molière, Mis. V, 4. Rien ne me flattait plus que de penser que je manquais au bonheur de l'heureux Soliman, et qu'on me trouvait à dire dans le sérail, Fontenelle, Soliman, Juliette.

    Trouver à dire, ne pas avoir son compte. On trouvait dix ou douze voix à dire, Patru, Plaidoyer 16, dans RICHELET.

    Avoir à dire, manquer de. Il faisait parade d'un visage remarquable par de grandes plaies et par un œil qu'il avoit à dire, Guez de Balzac, liv. V, lett. 9.

    À dire, manquant. Le fourrage revint en abondance, il n'y eut pas un cheval de perdu, ni un homme à dire, Saint-Simon, 47, 48.

    Il y a bien à dire, il y a une grande différence. Il y a bien à dire entre ces deux personnes. Dans le même sens, il y a tout à dire.

    Il y a bien à dire, il s'en faut de beaucoup. Il y a bien à dire que je n'aie mon compte.

  • 14En dire forme une locution qui a différents sens.

    Le cœur en dit, on y a inclination. Si le cœur vous en dit, si cela vous agrée. Et quand le cœur m'en dit, j'en prends par où je puis, Corneille, Ment. I, 4. Et puis-je mais, chétif, si le cœur leur en dit ? Molière, le Dép. V, 3. Pour peu que le cœur lui en dît, Hamilton, Gramm, 4. Qu'on s'aime de part et d'autre autant que le cœur en dira, Fontenelle, Laure, Sapho. Par extension. Si le sort nous en dit [nous est favorable], tout sera bien réglé, Molière, l'Étour. V, 2.

    En vouloir dire, être prêt à faire. D'abord, dit-il, j'allais tout doucement Auprès du lit écouter si le sire S'approcherait, et s'il en voudrait dire, La Fontaine, Mandr.

    En dire, faire des reproches. S'en dire, se faire des reproches. Mon cœur s'en est plus dit que vous ne m'en direz, Racine, Brit. III, 1. Et mon cœur soulevant mille secrets témoins, M'en dira d'autant plus que vous m'en direz moins, Racine, Andr. IV, 5.

  • 15Se le faire dire, hésiter beaucoup à faire une chose ; ne pas se le faire dire, montrer beaucoup d'empressement. Charles exigea une lettre d'Auguste à Stanislas : le roi détrôné se le fit dire plus d'une fois ; mais Charles voulait cette lettre, et il fallut l'écrire, Voltaire, Charles XII, 3.
  • 16Dans le style élevé. Que dis-je ? sorte de retour sur soi, de transition, d'aggravation. Il l'a abandonné, que dis-je ? il l'a dépouillé. Fuyons dans la nuit infernale… Mais que dis-je ? … mon père y tient l'urne fatale, Racine, Phèd. IV, 6.
  • 17À dire vrai, à vrai dire, locut. adv. En disant la chose telle qu'elle est. À dire vrai, il n'a pas rempli l'attente qu'on avait conçue de lui.

    À dire vérité, même sens. Et s'il avait mon cœur, à dire vérité, Il tournerait ses vœux d'un tout autre côté, Molière, Mis. IV, 1.

    Pour ainsi dire, locution dont on se sert pour atténuer une expression, pour la faire passer. Ils sont, pour ainsi dire, morts à toutes les joies.

    Pour mieux dire, locution dont on se sert pour préciser davantage sa pensée. Contrainte d'accepter ces mêmes conditions, sans avoir pu en rien retrancher, y rien ajouter, ou, pour mieux dire, sans avoir pu, avec tous leurs efforts, s'écarter d'un seul pas du cercle étroit qu'il lui avait plu de leur tracer, Racine, Disc. de réception de Th. Corneille.

  • 18Dire s'emploie quelquefois à l'impératif pour appeler l'attention. Dites-moi, venez-vous dîner avec moi ? D'où vient donc, je vous prie, un tel emportement ! Avez-vous, dites-moi, perdu le jugement ? Molière, Mis. IV, 3. Dites-moi un peu, s'il vous plaît, combien aviez-vous d'années lorsque nous fîmes connaissance ? Molière, Mar. forc. 2. Dis, penses-tu qu'un jour mon père nous pardonne ? Ducis, Othello, I, 8.

    Disons mieux, sorte de compliment ou de correctif. Il est l'avocat des pauvres, disons mieux, il en est le père.

    Disons-le s'emploie lorsqu'on va dire quelque vérité fâcheuse. Disons-le : les mesures violentes ne peuvent qu'irriter les esprits. Disons-le sans figure, il parle comme un fou et pense comme un homme sage, La Bruyère, XII.

  • 19Qu'est-ce à dire ? s'emploie pour qu'est-ce que cela signifie ? Qu'est-ce à dire ? vous murmurez. Cette locution exprime la surprise, le mécontentement. Qu'est-ce à dire, monsieur ? j'apprends par le notaire Qu'au contrat vous trouvez quelque chose à refaire, Dufrény, Mar. fait et rompu, I, 9.

    Ce n'est pas à dire pour cela que… Ce n'est pas à dire que… locution gouvernant le subjonctif, et qui a un sens de rectification. Vous m'avez rencontré parmi eux, ce n'est pas à dire que je sois des leurs. Ce n'est pas à dire qu'ils aient effectivement parlé pour la dernière fois, Fontenelle, Oracles, ch. III, 2e part.

    Ce n'est pas pour dire, locution très familière qui signifie sans se vanter. Ce n'est pas pour dire, mais je saurais en faire autant.

  • 20C'est-à-dire, loc. conj. qui annonce l'explication, la conséquence de ce qui vient d'être dit. Les quatre lettres I. N. R. I. qui sont au haut de la croix de Notre-Seigneur signifient Jesus Nazarenus, rex Judaeorum, c'est-à-dire Jésus de Nazareth, roi des Juifs. Et qu'on l'honore ici, mais en dame romaine, C'est-à-dire un peu plus qu'on n'honore la reine, Corneille, Pomp. III, 4. Le genre humain pensant, c'est-à-dire la cent-millième partie du genre humain tout au plus, Voltaire, Aventure de la mémoire.

    C'est-à-dire que, avec un verbe qui suit, même sens. C'est-à-dire que j'ai consenti à la transaction. C'est-à-dire que je paye la somme demandée.

  • 21C'est tout dire ou c'est tout dit, il n'y a rien à ajouter, cela achève, complète. Il est fort enfoncé dans la cour, c'est tout dit ; Et la cour, comme on sait, ne tient pas pour l'esprit, Molière, Femm. sav. IV, 3. Sur l'argent, c'est tout dire, on est déjà d'accord ; Ton beau-père futur vide son coffre-fort, Boileau, Sat. X. Qui dit Sillery dit tout ; Peu de gens en leur estime Lui refusent le haut bout, La Fontaine, Fabl. VIII, 13.

    Cela est bientôt dit, se dit, par antiphrase, d'une chose difficile, ou sur laquelle on conserve des doutes. Vous parlez de trouver d'ici à ce soir dix mille francs ; cela est bientôt dit. On a, dites-vous, perdu les bonnes épigrammes grecques ; cela est bientôt dit ; mais qu'est-ce qui le prouve ?

    C'est beaucoup dire, c'est poser une limite extrême qui probablement ne sera pas atteinte. Posons le cas que vous ayez tout le bien qu'il faudrait, et c'est beaucoup dire, Hamilton, Gramm. 7.

  • 22Cela vous plaît à dire, exprime que l'on ne convient pas de ce qui vient d'être dit, ou sert à énoncer un refus.
  • 23Cela va sans dire ; il va sans dire que… Cela va de soi et est si naturel qu'il n'est pas besoin d'en parler, de le stipuler. Cela s'en va sans dire, Sévigné, 166.
  • 24Il n'y a pas à dire, c'est-à-dire l'affaire est décidée, il n'y a pas d'observations à faire, il n'y a pas à revenir là-dessus.

    On dit de même : il a beau dire. Cette dernière femme eut beau faire, eut beau dire : Moi devine ! on se moque ; eh ! messieurs, sais-je lire ? … Point de raisons : fallut deviner et prédire, La Fontaine, Fabl. VII, 15.

  • 25Cela soit dit en passant, ou soit dit en passant, exprime qu'on mentionne seulement une chose à propos d'une autre, ou qu'on fait quelque légère plainte, quelque léger reproche en peu de mots.
  • 26Ce qui est dit est dit, c'est-à-dire la parole donnée sera tenue. … Va, tranquillise-toi ; Ce que j'ai dit est dit ; repose-toi sur moi, Regnard, Légat. I, 2.

    Voilà qui est dit, locution dont on se sert pour affirmer qu'une chose est convenue, entendue.

    Je ne vous dis que cela, locution qui, suivant le ton, exprime dévouement ou menace. Mon ami, dès qu'il s'agit de ton repos… je ne te dis que cela ; tu dois me connaître. Si vous y revenez… je ne vous dis que cela.

    Prenez que je n'ai rien dit, locution qui annule quelque chose qu'on a dit. C'était dans votre intérêt ; mais, si cela vous contrarie, prenez que je n'ai rien dit.

    C'est moi qui vous le dis, sorte d'affirmation très familière. Et laisse venir demain ; tu verras comme il sera fait ; c'est moi qui te le dis, Marivaux, Marianne, II.

  • 27 Familièrement. S'il vient à bout de son entreprise, je l'irai dire à Rome, locution dont on se sert pour exprimer qu'on regarde la chose comme impossible. Créqui prétend qu'Oreste est un pauvre homme, Qu'il soutient mal le rang d'ambassadeur ; Et Créqui de ce rang connaît bien la splendeur ; Si quelqu'un l'entend mieux, je l'irai dire à Rome, Racine, Épigr. contre Créqui qui avait critiqué Andromaque.
  • 28S'il ne dit mot, il n'en pense pas moins, c'est-à-dire il écoute en silence et fait ses réflexions, ou bien il se tait, mais il est mécontent.
  • 29À qui le dis-tu ? à qui le dites-vous ? locution qui exprime que celui qui parle sait, connaît, a éprouvé aussi bien que qui que soit ce dont il s'agit. Il est difficile de faire son chemin ; à qui le dites-vous ?
  • 30Comme qui dirait, locution familière qui signifie une sorte de. Sa coiffure attira nos regards, c'était comme qui dirait un turban (voy. l'explication de cette locution à COMME).
  • 31Se dire, v. réfl. Se donner, se faire passer pour. Il se dit votre parent. Se dire malade. Ces perfides tous deux se sont dits aujourd'hui Et subornés par vous et subornés par lui, Corneille, Nicom. III, 8. Et de quel droit se diraient-ils héros, s'ils n'étaient point amoureux ? n'est-ce pas l'amour qui fait aujourd'hui la vertu héroïque ? Boileau, Héros de romans.

    Se dire, être dit. Cela se dit partout. Cette phrase se dit très bien. La première et principale cause pourquoi on n'a pu entendre assez clairement aucune des choses qui se sont dites de Dieu et de l'âme, Descartes, Rép. II, 4. Il y a un certain nombre de phrases toutes faites que l'on prend comme dans un magasin ; bien qu'elles se disent souvent sans affectation et qu'elles soient reçues sans connaissance, il n'est pas permis de les omettre, La Bruyère, VIII.

    Soi-disant, voy. SOI-DISANT.

PROVERBES

Quand les mots sont dits, l'eau bénite est faite, se dit des marchés qui sont conclus.

Qui dit tout n'excepte rien.

Qui ne dit mot consent, c'est-à-dire le silence est pris pour l'acquiescement.

REMARQUE

1. Die, pour dise, au subjonctif est un archaïsme. Non, je croyais tout d'elle, il faut que je le die, Régnier, Élég. III. Pourquoi, à votre avis, tant de périls et tant de combas ? vous plaît-il, madame, que je vous le die ? Guez de Balzac, De la gloire. Ils n'ont pas besoin que je leur die rien davantage, Descartes, Méth. 6. Encore qu'on die que la foi a pour objet des choses obscures, Descartes, Rép. II, 36. Mais encore une fois souffrez que je vous die, Corneille, Cinna, I, 1. Votre ardeur vous séduit, mais quoi qu'elle vous die…, Corneille, Poly. V, 4. Ah ! ce n'est pas ces soins que je veux qu'on me die, Corneille, Pomp. V, 3. Veux-tu que je te die ? une atteinte secrète Ne laisse point mon âme en une bonne assiette, Molière, le Dép. I, 1. Ah ! souffrez que je die, Valère, que le cœur qui vous est engagé…, Molière, ib. V, 9. Faites-la sortir, quoi qu'on die, De votre riche appartement, Molière, Femm. sav. III, 2. Gardez-vous… d'ouvrir… que l'on ne vous die…, La Fontaine, Fabl. IV, 15. … rois et dieux mettent, quoi qu'on leur die, Tout en même catégorie, La Fontaine, ib. V, 18. Et puisqu'il faut que je le die, Rien où l'on soit moins préparé, La Fontaine, ib. VIII, 1. Quiconque aime le die ! La Fontaine, Court. Mais, quoi que je craignisse, il faut que je le die, Racine, Bérén. V, 6. Cet archaïsme, ainsi autorisé, peut encore être conservé dans la poésie.

2. Dire de, avec un infinitif, signifiant commander, ordonner, sont signalés par Vaugelas et Th. Corneille comme un gasconisme qu'il fallait éviter. Cependant, dès le temps de ces puristes, cette locution était employée par les meilleurs auteurs, et elle est restée en plein usage. À cette époque, l'Académie ne l'approuvait qu'avec hésitation : « Comme c'est bien parler que de dire : Il lui ordonna d'aller, Il le pria de faire, l'usage semble avoir permis de dire : Il lui dit d'aller, Il lui dit de faire, Acad. Observ. sur Vaugelas, p. 308. »

3. La deuxième personne plurielle vous dites représente la forme latine dícitis, avec l'accent sur la première syllabe.

HISTORIQUE

Xe s. E si distrent, Fragment de Valenciennes, p. 467. Si cum dist e le [en le] evangelio lieu de avant dist, ib. p. 469.

XIe s. Hom qui plaide en curt, à qui curt que ço seit, e hom li mette sur qu'il ait dit chose…, Lois de Guill. 28. Dis e set ans, n'en fut nient à dire [il n'y en a rien à dire, à rabattre], Penat sun cors el damne Deu servise, St Alexis, XXXIII. Et dist au roi : or ne vous esmaiez, Ch. de Rol. III. Dient paien : ainsi peut-il bien estre, ib. IV. Respondent Franc : Sire, vous dites bien, ib. CLXXVII.

XIIe s. Qu'après nos mors n'en soit dit negun [nul] mal, Ronc. p. 49. [à] mon seigneur dites qu'il me viegne veoir, ib. p. 122. S'uns autres homs deïst tel legerie, ib. p. 168. Li cuiverz [le pervers] ne dit mot, l'ame s'en est alée, ib. p. 196. Ne tout [je] ne cel [cèle] mon cuer, ne tout [je] nel [ne le] di, Couci, VII. Je ne di pas que je fasse folage, ib. XI. As fins amans proi [je prie] qu'il dient le voir [la vérité], ib. X. Et quant uns seus [un seul] en remanoit de ça [n'allait pas à la croisade], Il [Quenes] lui disoit et honte et reprouvier, Hues D'Oisi, Romancero, p. 104. [Je] N'en oi [ouis] nului parler, qui moult de bien n'en die, Sax. VII. Si diromes de Charle, qui tant fait à louer, ib. XII. Puis lui dites coment Guiteclins de Sassogne envers nous entreprent, ib. XX.

XIIIe s. Si vous dirons des pelerins dont grant partie estoit jà venue en Venise, Villehardouin, XXXI. Et dient cil qui morir le virent, que ce fu uns des homes du monde qui plus bele fin fist, Villehardouin, XXIII. Dame, ce dist Pepins, on ne doit pas douter… Berte, III De ce ne vous ert [sera] ore nuls lons racontes dis, ib. V. Quant la messe fut dite, ib. X. En son lit en seant [elle] prist ses heures à dire, ib. XI. Qu'ele ne deïst mot ne que n'osast noiser, ib. XI. D'eus [je] lairrai à parler, n'en dirai ore plus, ib. XXIV. Forment se repent Berte que son nom [elle] leur a dit, ib. LIII. Laissez tout ce aler, n'en soit parole dite, ib. LIV. Sans les autres richesses que je ne sai conter, Qu'à peine les peut-on ne dire ne esmer [estimer], ib. XCVII. Car [elle] sait bien que c'est ele [Berte] … Li cuers lui dit, pour voir bien l'en asseüra, ib. CXXII. À peine [elle] put mot dire, tant li cuers lui failli, ib. CXXVII. Dist li vilain : " Par saint Marcel, Ta pel ert mise en mon mantel. " Mès moult a entre dire et fere ; Qar Renart li fera contrere, Ren. 7885. Maintes gens disent que en songes N'a se fables non et mençonges, la Rose, 1. D'omme traïstre g'en di fi ; Puisqu'il n'a foi, point ne m'i fi, ib. 7867. … Il le secorra De tretout quanques il porra, Plus liés [joyeux] du faire, au dire voir, Que ses amis du recevoir, ib. 4753. … or dis-tu que sage, ib. 10421. Au voir dire [à vrai dire], ib. 17465. Qui droitement veut apeler, il doit dire ainsi, se c'est por murdre : Sire, je di sor tel, et le doit nommer, qu'il malvesement…, Beaumanoir, LXI, 3. Nus lais [legs] ne vaut s'il n'est fes de persone qui soit en bon sens et en bonne memore, et s'il ne le dit de se [sa] bouche, Beaumanoir, XXI, 8. Le pris qui est en leur chevalerie si est tel, que quant il sont si preus et si riches que il n'i ait que dire…, Joinville, 235. Et li [au comte de Monfort] distrent que il venist veoir le cors nostre Seigneur qui estoit devenuz en sanc et en char entre les mains au prestre, Joinville, 198. Sire, se vous ne me lessiez dire que vous soiés cousin au roy, l'en vous occirra touz et nous avec, Joinville, 240. Et pour ce se doit on garder et en tele maniere deffendre de cest agait, que en die à l'ennemi [au démon] quant il envoie tele temptacion : va t'en, Joinville, 197. Bien est, ki dit, s'il est ki fait, Ph. Mouskes, ms. p. 200, dans LACURNE.

XIVe s. Il est voir [vrai] disant et veritable, Oresme, Eth. 124. Il avient aucune fois que par suspicion et par opinion l'en dit faulz, Oresme, ib. 173.

XVe s. Et [messire Galéas] avoit telle grace de toutes gens en Lombardie que chacun l'aimoit et disoit bien de lui ; … et toutes gens disoient mal et se plaignoient couvertement de messire Barnabo, Froissart, II, II, 226. [Les cardinaux] distrent et imaginerent que il ne leur feroit jà bien [Urbain VI], et que il n'estoit pas digne de gouverner le monde, Froissart, II, II, 48. En lisant nul n'osoit parler ni mot dire, car il vouloit que je fusse bien entendu, Froissart, II, III, 13. Et arriva à un port que on dit Cepsée [Chertsey en Cornouaille], Froissart, I, I, 152. Et menoient ma dite dame d'Orleans messire Jaquemes de Bourbon et messire Philippe d'Artois, Froissart, III, IV, 1. Vous l'arez, puisque je l'ay dit, la Pass. N. S. J. C. Afin que ils ne s'en peussent excuser et que plus ne sceussent que dire…, Boucic. I, ch. 14. La plus belle compagnie qu'on sçauroit dire, Commines, VIII, 7. Je vous prie que vous me diez où je pourrai parler à vous à part, Louis XI, Nouv. XLVI.

XVIe s. Ce dire de S. Pierre a tousjours esté vray que…, Calvin, Instit. 327. L'aage me conduisoit Sans peur, ne soin, où le cœur me disoit, Marot, I, 216. Et croyez à mon dire, ô charité, ô bonté indicible ! Marot, I, 265. … Pour vous certes, je treuve Facile chose à faire un impossible, Et fort aisée à dire un indicible, Marot, I, 359. … Quand tout est dit [après tout], en tous les lieux Où je voulois tourner les yeux, Tout me rioit…, Marot, IV, 181. Vous savés combien vostre paine est necessaire aux affaires dont vous portés le faix, et où vos amis vous trouvent bien à dire, Marguerite de Navarre, Lett. 64. Il n'y a nulle raison en leur affaire, j'espere les trouver bien toust ; je croy que leur diray leurs verités, Marguerite de Navarre, ib. 114. Il vous treuve tant à dire que vous diriés qu'il est tout seul, Marguerite de Navarre, ib. 122. Monseigneur, quant tout est dit [après tout], mon principal souci est de votre santé, Marguerite de Navarre, ib. 24. C'est à dire que les painctres ont la liberté de paindre ce qu'ilz veulent, Rabelais, Pant. II, 5. L'antechrist est desjà né, ce m'a l'on dict, Rabelais, ib. III, 26. Si nous avions à dire l'intelligence des sons de l'harmonie et de la voix, cela apporteroit une confusion inimaginable à tout le reste de nostre science, Montaigne, II, 359. Que sait-on si… plusieurs effects des animaux qui excedent nostre capacité sont produits par la faculté de quelque sens que nous ayons à dire…, Montaigne, II, 358. Si on veult dire [exprimer] qu'un homme n'a point de sens, Montaigne, I, 33. Il disoit mieulx [parlait] sans y avoir pensé, Montaigne, I, 41. Cyrus s'estant enquis que c'estoit à dire [de ce que cela voulait dire], Montaigne, I, 65. Il falloit raisonner leur dire [en donner les raisons], Montaigne, I, 51. Ce qu'il y a à dire [la différence] entre la licence et la liberté, Montaigne, I, 172. Aprez qu'il les eust bien laissez dire, il respondit…, Montaigne, I, 189. Il y a bien à dire que ce ne soit le mieulx qu'il peust faire, Montaigne, I, 206. Callicles dict l'extremité de la philosophie estre dommageable, Montaigne, I, 224. J'aurois prins une voye plus naturelle, qui est à dire, vraye…, Montaigne, I, 228. Si vous dictes : il fait beau temps, et que vous dissiez verité…, Montaigne, II, 265. En se deshabillant, il trouva à dire sa chaine, Yver, 536. Le dire de Thucidides s'accorde mieux avec les chroniques, Amyot, Thém. 48. Il commanda que les autres par ordre dissent consecutivement leurs advis, Amyot, Cam. 55. Il n'y avoit capitaine qui eust osé dire de non aux soudards qui en demandoient le pillage, Amyot, Marcell. 28. Je suis marry qu'il faut que je vous die, que…, Amyot, Arist. 10. Antigonus le comparoit à un joueur de dez, à qui les dez disent fort bien, mais qui ne se sçait servir des chances qui luy viennent, Amyot, Pyrrh. 57. Qu'il se teinst tousjours auprès de son armée de mer, à fin que si la fortune luy disoit mal sur terre, il eust incontinent les forces de la marine toutes prestes pour…, Amyot, Pomp. 107. Il rencontra par cas d'adventure Goesylus lacedaemonien, soy disant estre envoyé de Lacedaemone, Amyot, Dion, 62. Quant à cela, il n'y a personne qui die du contraire, Amyot, Brutus, 1. La memoire de cette bataille qui estoit encore recente, d'autant qu'il n'y avoit pas cinq ans à dire, les avoit ainsi enflammez, Carloix, I, 3. Cent ou six-vingts picqueurs, qui avec leurs trompes disoient la mort du cerf, Carloix, IV, 12. Dire d'un et penser d'autre, H. Estienne, Apol. d'Hérodote, p. 26, dans LACURNE. Qui dit ce qu'il sçait et donne ce qu'il a n'est pas tenu à davantage, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 127.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. dir, dire ; catal. dir ; espagn. decir ; portug. dizer ; ital. dire ; du latin dicere. Comp. le grec δείϰνυμι, montrer, goth. taiha, allem. zeigen, montrer ; mots où est le radical identique dic, deik, taih.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1. DIRE. Ajoutez :
32 Terme de jurisprudence. Dire droit d'un appel, admettre l'appel, synonyme de faire droit sur l'appel. La cour déclare mal fondé l'appel interjeté par M… contre le jugement… disant droit, au contraire, de l'appel de C… et D…, réforme ledit jugement, Gaz. des Trib. 29 janv. 1875, p. 94, 1re col.

REMARQUE

Ajoutez :

4. Corneille ne dit pas : Cela va sans dire, mais : cela s'en va sans dire. Cela s'en va sans dire, Mélite, III. Mme de Sévigné non plus : Ils ne viendront point à l'assemblée, cela s'en va sans dire, Lett. 21 oct. 1676. De même, Bussy à Mme de Sévigné, le 5 janvier 1678 : Je ne vous dis pas que je vous aime ; cela s'en va sans dire,

5. Mme de Sévigné a écrit : de ce qu'il dit, pour à ce qu'il dit. Il est ravi, de ce qu'il dit, de l'amitié que vous avez pour moi, Sévigné, 15 avril 1671.

HISTORIQUE

XVe s. Ajoutez : Qui chiet [choit] de l'asne il dist [signifie] crieve ; et qui chiet du cheval il dist lieve, les Evangiles des quenouilles, p. 34.

ÉTYMOLOGIE

Ajoutez : M. Boucherie (Revue des langues romanes, t. III, p. 71-77) a jeté du jour sur la locution à dire au sens de manquer. Elle représente le bas-latin habere ou esse diger, digere, dicere, qui se trouve avec le même sens dès les textes mérovingiens : Quantum de compositione diger est, Loi salique ; Quasi animalia per sua menata dicere habuissit (comme si par ses menées il avait eu à dire les animaux), Formules angevines (ailleurs, digere habuisset) ; Quod ante dicta terra de annos triginta et uno semper tenuissint nec eis diger numquam fuissit, LETRONNE, p. 28, anno 680. Ce dernier exemple semble le modèle du vers de St Alexis, cité dans l'historique : Dis et set ans, n'en fut nient à dire. M. Boucherie pense que dicere, qui a eu le sens de plaider, a passé à celui de réclamer, et, comme on réclame ce qui manque, au sens de manquer.