« douve », définition dans le dictionnaire Littré

douve

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

douve [1]

(dou-v') s. f.
  • 1Nom de planches disposées en rond qui forment le corps du tonneau et qu'on fait tenir ensemble avec des cercles. Six douves de poinçon servaient d'ais et de barre, Régnier, Sat. X.
  • 2Fossé servant de limite aux champs et d'écoulement aux eaux.

    Terme de fortification. Douve de fossé, paroi des fossés de la fortification ancienne.

    Terme de construction. Mur d'un bassin quand il n'est que d'une assise ou deux.

    Caverne que les habitants des bords de la Loire creusent dans le roc pour s'y loger.

  • 3Planche sur laquelle on met les peaux de veaux pour les ratisser et en enlever les parcelles de tan.

HISTORIQUE

XIIe s. Sovent en i a d'enversez Jus ez grans doves des fossez, Benoit de Sainte-Maure, V. 11864. Il i ont mis du feu tout rasé [ras] un tonel ; Les douves sont emprises, si rompent li cercel, Sax. IX.

XIIIe s. Tout cil qui ont arbres souz le [la] forterece de le [la] vile, ke il les aient fait couper à quatre piés près de la deuve, Tailliar, Recueil, p. 125. El liu oil apert mix [mieux], ou par bonnes [bornes] anciennes qui sont trouvées, ou par douves anciennes de fossés qui sont trouvées, Beaumanoir, XXV, 9.

XIVe s. Lesquels trois varlés feussent revenuz armez d'espées et de dagues, et leurs visages estoupez et muciez de leurs chaperons au long d'une douve et fossé tenant au bail de la ditte ville, Du Cange, douva.

XVe s. Et vindrent ardoir la ville de Cousie sur les douves de la mer, Froissart, liv. III, p. 167, dans LACURNE. Les murs estoient tous rasez, et povoient [les assiégés] saillir par oils vouloient, et y avoit seulement ung peu de douve, ne jamais ne y eut fossez, car le fons est très aspre et très dur, Commines, II, 11. Ils avoient droit d'avoir près d'iceulx maretz certains grans fossez ou flaches, appellez douvres ; esquels douvres, quant la riviere de Marne se desvoye et est hors de son chanel, se arreste…, Du Cange, dovra.

XVIe s. Le fossé appartient … celui sur lequel est le rejet ; car qui douve a, si a fossé, Loysel, 289. Quand les tonneliers veulent retirer une douve du dedans au dehors, Paré, VIII, 5. Qui a la douhe du fossê du costé de son heritage, pareillement le fossé lui appartient, Du Cange, doha. Auquel lieu l'avant-garde de l'armée huguenotte se presenta en bataille jusques sur les dubes du faux-bourg St-Ladre [de Poitiers], Castelnau, 247.

ÉTYMOLOGIE

Normand douve, fossé d'eau croupissante ; wallon, dèwe ; provenç. dogua, creux, cavité ; ital. doga, douve de tonneau, et raie, bordure d'étoffe ; milanais, dova, même sens ; bas-latin, doga, qui se trouve dans Grégoire de Tours avec le sens de conduit (fossas in circuitu fieri jussit, ne forte dogis occultis lymphae deducerentur in fontem, cité dans du Cange) ; allem. Daube ; holl. duig ; suisse, dauge, tous mots germaniques qui signifient douve de tonneau. Voilà toutes les formes mises sous les yeux du lecteur ; maintenant, il y a dans la latinité le mot doga qui signifie vase, coupe, et que du Cange a rattaché avec raison au grec δοχὴ, réservoir ; Diez, partant de là, a établi la série des sens : réservoir d'eau, fossé, rebord du fossé, ce qui retient le liquide dans un tonneau, la douve, et même rebord, encadrement, un des sens de l'italien doga qui signifie aussi raie, bordure. La transformation littérale est parfaitement justifiée : doga se change en douve, comme rogare en rouver, dans l'ancien français.