« dru », définition dans le dictionnaire Littré

dru

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

dru, drue

(dru, drue) adj.
  • 1Bien venant, venant serré, en parlant de l'herbe, des blés, etc. Ces blés sont fort drus. L'herbe était haute et drue, Vaugelas, Q. C. liv. III, dans RICHELET.

    Par extension. Une pluie drue et menue.

    Dru, adv. D'une manière serrée. Il pleut dru. Semer dru. Les balles pleuvaient dru comme mouches.

    Fig. Vivement, sans façon. Vous y allez dru. Allant… Plus dru qu'une navette au travers d'un métier, Régnier, Sat. X. Haussant et baissant les mains dru et menu sur ses cuisses, Scarron, Roman com. II, 7. De telles gens il est beaucoup Qui prendraient Vaugirard pour Rome, Et qui, caquetant au plus dru, Parlent de tout et n'ont rien VU, La Fontaine, Fabl. IV, 7. Caquet-bon-bec alors de jaser au plus dru, Sur ceci, sur cela, sur tout, La Fontaine, ib. XII, 11. Le nœud du mariage Damne aussi dru qu'aucuns autres états, La Fontaine, Belph. Eh ! mais, mais… mon oncle, un peu de patience ; comme vous allez dru sur les questions ! Pont de Vesle, Somnamb. sc. 2.

  • 2 Par extension, se dit des personnes que l'on compare à une herbe drue, bien venant, vif et gaillard. Je te promets à ce printemps Une petite camusette, Friponne, drue et joliette, Avec qui l'on t'enfermera ; Puis s'en démêle qui pourra, La Fontaine, Poésies mêlées, XXXII, pour Mignon, chien de Son Altesse royale. Malgré moi l'on m'a jointe avec vous, Vous vieux penard, moi fille jeune et drue, La Fontaine, Cal. Lucrèce jeune et drue et bien taillée, La Fontaine, Mandr. La fillette était drue, honnête toutefois, La Fontaine, Cas. La petite femme est à cet hôtel de la Rochefoucauld, toute gaillarde et toute drue, Sévigné, 389. Catherine de Navarre, dit-on, fut fille amoureuse et drue, qui eut un mari débile, Courier, Lett. I, 339.

    Il se dit des petits oiseaux assez forts pour s'envoler du nid. Ces moineaux sont drus comme père et mère.

    Par extension. Bel enfant de quinze ans dru comme père et mère, Scarron, dans RICHELET.

HISTORIQUE

XIe s. Tout [il] l'abat mort au pré sur l'erbe drue, Ch. de Rol. CII.

XIIe s. Le premier jour de mai, où druz est li herbois [herbage], Sax. XXXIII.

XIIIe s. Partonopex fu sainz et druz, Partonop. ms. f° 149, dans LACURNE. Entor les ruissiaus et les rives Des fontaines cleres et vives, Poignoit l'erbe freschete et drue, la Rose, 1401.

XIVe s. Et tout entre François [ils] commencent à geter De pierres et caillous qu'il voudrent aporter ; Aussi dru vont en l'air qu'on voit pluie voler, Guesclin. 19175. Car aussi dru que nege chet sur les arbrisseaux, Voloient viretons [dards] et flesches et carreaux, ib. 20178.

XVe s. Si eut par devant la cité maint assaut et maint hutin et drue escarmouche, Froissart, I, I, 58. Là eut fait plusieurs grands appertises d'armes, et ne s'y espargna le roi d'Angleterre neant, mais estoit toudis entre les plus drus, Froissart, I, I, 328. Un bois durement fort et dru d'espines et de ronces, Froissart, II, II, 164. Du païs les plus friches dames, Mout richement et bel arrées, Drut perlées et offrisiées [parées d'orfrois], Froissart, Poésies mss, f° 155, dans LACURNE.

XVIe s. Nous sommes druz ; chagrin ne nous suit mye, Marot, II, 231. Composons luy (je vous prie) un libelle, Qui pique dru, et qui morde à loisir…, Marot, II, 387. Le soleil nous eslance si dru, sans cesse, nouveaux rayons les uns sur les autres, que…, Montaigne, I, 271. À mesure que ces espines domestiques sont drues et desliées, elles nous mordent plus aigu, Montaigne, IV, 71. La plus agée qui estoit mure et drue, Despériers, Contes, V. Considerant l'horreur que faisoit à voir un front de bataille dont il sortoit tant de fers de picques et si drues…, Amyot, P. AEM. 31. En après te faut espandre dru et menu la poudre, Paré, XXV, 26.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. drut ; génois, druo, dense, épais ; piémontais, dru, fertile, en parlant du sol. On a fait venir ce mot de dur par métathèse ; mais ni le sens ni le t du provençal ou de l'ancien français ne permettent cette dérivation. Dru vient probablement du celtique : kimry, drud, hardi ; gaélique, drûth, volontaire ; Cornouailles, dru, beaucoup ; bas-bret. druz, gras. Quel que soit le sens primitif en celtique, le sens primitif en français, d'après les textes, est celui d'herbe drue ; c'est par extension que dru s'est appliqué aux personnes. Il y avait dans l'ancien français un autre mot dru, drue, qui signifiait un fidèle, un amant, une amante ; un substantif, druerie ; dru en ce sens est d'origine germanique.