« espoir », définition dans le dictionnaire Littré

espoir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

espoir

(è-spoir) s. m.
  • 1Le fait même d'espérer. Attirer par l'espoir. J'ai bon espoir qu'il réussira. Il n'a point son espoir au nombre des armées, Malherbe, II, 1. Apprends-moi de nouveau quel espoir j'en dois prendre, Corneille, Cid, I, 1. Quittez le long espoir et les vastes pensées, La Fontaine, Fabl. XI, 8. Et que le refus qu'il a fait… n'ait pas étouffé dans mon âme toute sorte d'espoir, Molière, Am. méd. I, 4. Mais combien d'écrivains d'abord si bien reçus Sont de ce fol espoir honteusement déçus ! Boileau, Sat. IX. Mon espoir N'est plus qu'au coup mortel que je vais recevoir, Racine, Iphig. v, 2. Je meurs dans cet espoir, satisfaite et tranquille, Racine, ib. Et l'espoir malgré moi s'est glissé dans mon cœur, Racine, Phèd. III, 1.

    Sous espoir, dans l'espoir, en espérant. Lâcher ce qu'on a dans la main, Sous espoir de grosse aventure, Est imprudence toute pure, La Fontaine, Fabl. IX, 10. Dans l'espoir d'élever Bérénice à l'empire, Racine, Bérén. II, 2.

    En espoir, dans l'imagination qui espère. Mes guerriers en espoir dépouillaient votre monde Des tributs éclatants qu'il recueille à Golconde, Delavigne, Paria, I, 1.

    Au plur. Alors je revis en moi-même Les doux espoirs, les bizarres pensers, Voiture, dans GIRAULT-DUVIVIER.

    Espoir est quelquefois appliqué au présent, parce que l'esprit humain transporte volontiers une idée de futur au présent. Me cherchiez-vous, madame ? Un espoir si charmant me serait-il permis ? Racine, Andr. I, 4. Cet emploi est justifié par un emploi analogue d'espérer.

  • 2Ancien terme de mer. Petite pièce de canon mise sur le pont d'un vaisseau, et servant à favoriser les descentes.

SYNONYME

ESPOIR, ESPÉRANCE. Ces deux mots sont très-voisins, ne différant que par un suffixe qui est dans espérance et qui manque dans espoir. Espoir est le substantif du verbe espérer, sans aucun suffixe, comme garde l'est de garder, et par conséquent équivaut exactement à l'infinitif pris substantivement ; l'espoir ou l'espérer c'est la même chose. Espérance dérive du participe présent ; c'est l'état de l'âme de l'espérant. Par conséquent, espoir a un sens plus général, plus indéterminé qu'espérance ; et dans le vers célèbre de la Fontaine : « Quittez le long espoir et les vastes pensées ; » espoir seul convient, espérance serait impropre. À part cette nuance, espoir et espérance se confondent.

HISTORIQUE

XIIe s. Et je cuit [crois] bien au mien espoir [d'après l'espoir que j'ai] Que…, Couci, IV. Benoit soit li hardemens Où j'ai pris si bon espoir, ib. XI. Tost auront perceü l'engin de felonie ; Espoir [sans doute], il manderont partout leur baronie, Sax. X.

XIIIe s. Mais un espoir m'a tant reconforté, Le Comte D'Anjou, Romancero, p. 124. Et espoir il leur en prendra pitié, Villehardouin, XLII. En assembler tresor [elle] avoit mis son espoir, Berte, LXV. Bien le voudroit Pepins, ainsi com j'ai l'espoir, ib. Mais, espoir, ce n'iert [ne sera] mie tost, Grans biens ne vient pas en poi d'ore, la Rose, 2038.

XVe s. Les gardes de la porte commencerent à corner et à esmouvoir ceux de la ville, qui, espoir [peut-être], dormoient encore, car il estoit moult matin, Froissart, I, I, 254. Plusieurs menues folies auxquelles ledit mignon trop se donnoit d'espoir, Louis XI, Nouv. VII.

XVIe s. Un vain espoir qui de vent nous vient paistre, Ronsard, 1. Ainsi j'alloy sans espoir [crainte] de dommage, Ronsard, 34. L'age vole tousjours sans espoir de retour, Ronsard, I, 657. Seize pataches de 25 à 30 tonneaux, garnies d'espoires [canons] de fonte et de quelques moiennes [pièces d'artillerie], D'Aubigné, Hist. III, 18.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. esper ; du latin speres, qui se trouve dans Ennius. Espoir dans l'ancienne langue avait un emploi élégant : il signifiait peut-être, qui l'a remplacé.