« fable », définition dans le dictionnaire Littré

fable

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fable

(fa-bl') s. f.
  • 1Ce que l'on dit, ce que l'on raconte. Inusité en ce sens, qui est le propre.
  • 2Sujet de malins récits. La science… Sert au peuple de fable, aux plus grands de risée, Régnier, Sat. III. Il me laisse au milieu d'une terre étrangère, La fable de son peuple et la haine du mien, Corneille, Médée, I, 5. Gardez-vous de l'homme malicieux, qui est toujours appliqué à faire le mal, de peur qu'il ne vous rende pour jamais la fable du monde, Sacy, Bible, Ecclésiastique, II, 35. Nous allons servir de fable et de risée à tout le monde, Molière, Préc. sc. 19. Un prince sera la fable de toute l'Europe et n'en saura rien, Pascal, Am.-propre, 1. Suis-je, sans le savoir, la fable de l'armée ? Racine, Iph. II, 7. Je ne prétends pas qu'une patience ridicule me rende la fable de la ville, Hamilton, Gramm. 8. Par vous la piété devient la fable du monde, le jouet des impies, Massillon, Carême, Injust.
  • 3Récit imaginaire, c'est-à-dire d'imagination. Non plus que si nos peines Étaient fables du peuple inutiles et vaines, Régnier, Sat. IV. Et si l'enfer est fable au centre de la terre, Il est vrai dans mon sein, Malherbe, V, 21. Après y avoir bien pensé, il m'a semblé que cela sent extrêmement sa fable et qu'il n'est pas possible qu'il y ait au monde un homme si petit ni si galant, Voiture, Lett. 28. En une saison où l'histoire est si brouillée, j'ai cru que je vous pouvais envoyer des fables, et qu'en un lieu où vous ne songez qu'à vous délasser l'esprit, vous pourriez accorder à l'entretien d'Amadis quelques-unes de ces heures que vous donnez aux gentilshommes de votre province, Voiture, Lett. 3. Tu ne trouveras plus ici, Alexandre, de fables ridicules à conter pour te vanter d'être le fils de Jupiter, Fénelon, t. XIX, p. 238.
  • 4Récits mythologiques relatifs au polythéisme. Les dieux de la Fable. La Fable offre à l'esprit mille agréments divers, Boileau, Art p. III. Mais dans une profane et riante peinture De n'oser de la Fable employer la figure, C'est d'un scrupule vain s'alarmer sottement, Boileau, ib. Là [en Grèce], l'histoire ou la Fable ont semé leurs grands noms Sur des débris sacrés, sur les mers, sur les monts, Lamartine, Harold, X.

    En ce sens il s'écrit avec majuscule, et ne se dit qu'au singulier.

    Il se dit aussi au singulier sans majuscule et au pluriel, pour exprimer tout récit ayant un caractère mythologique quelconque. Rien n'est beau que le vrai, le vrai seul est aimable ; Il doit régner partout, et même dans la fable, Boileau, Épit. IX. Le récit que fait Hérodote des premiers commencements de Cyrus a bien plus l'air d'une fable, que d'une histoire, Rollin, Trait. des Ét. v, III, 2. Les fables sont l'histoire des temps grossiers, Voltaire, Mœurs, CXIX. Le pic tenait le premier rang dans les auspices ; son histoire, ou plutôt sa fable, mêlée à la mythologie des anciens héros du Latium, présente un être mystérieux et augural, Buffon, Ois. t. XIII, p. 14, dans POUGENS.

  • 5 Terme de poésie épique et dramatique. La suite des faits qui forment une pièce dramatique ou épique, en tant qu'elle est un travail d'imagination.
  • 6Petit récit qui cache une moralité sous le voile d'une fiction et dans lequel d'ordinaire les animaux sont les personnages. L'apologue est composé de deux parties, dont on peut appeler l'une le corps, l'autre l'âme ; le corps est la fable ; l'âme, la moralité, La Fontaine, Fabl. Préface. Aristote n'admet dans la fable que les animaux, La Fontaine, ib. Les fables ne sont pas ce qu'elles semblent être ; Le plus simple animal nous y tient lieu de maître, La Fontaine, ib. VI, 1. On doute que les fables d'Ésope, telles que nous les avons, soient toutes de lui, du moins pour l'expression ; on en attribue une grande partie à Planude, qui a écrit sa vie, et qui vivait dans le XIVe siècle, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. II, p. 626, dans POUGENS. Dans la plupart de ses fables il [la Fontaine] est infiniment au-dessus de tous ceux qui ont écrit avant et après lui, en quelque langue que ce puisse être, Voltaire, Louis XIV, Écrivains.
  • 7Mensonge, chose controuvée. Tu veux rendre, Asdrubal, par une pure fable, Le coupable innocent et l'innocent coupable, Mairet, Mort d'Asdrubal, II, 3. Sa mort est trop certaine et fut trop remarquable Pour craindre un grand effort d'une si vaine fable, Corneille, Héracl. I, 2. [Pharnace]… me troublant par des fables, Grossit, pour se sauver, le nombre des coupables, Racine, Mithr. III, 4.

REMARQUE

Il est probable qu'au commencement du XVIIe siècle beaucoup prononçaient fâble ; car on fait un reproche de mettre à la rime périssable et fable. Ceux qui soutenoient que c'étoient autant de fautes en faisoient de bien moins supportables, car ils faisoient rimer périssable avec fable, étoffer avec enfer, Francion, l. v, p. 189. Au reste, aujourd'hui aussi, quelques personnes prononcent fâble.

HISTORIQUE

XIIe s. Junst [soit à jeun, s'abstienne] li oroille [l'oreille] de flaves et de novales et de totes teles choses, c'oiseuses sont, Saint Bernard, ms. p. 302, dans LACURNE. E quant levez estoit li sainz huem de la table, N'aveit cure à oïr de chançun ne de fable Ne de nule altre chose, s'ele ne fust verable, Th. le mart. 102.

XIIIe s. Ne vous tenrai jà longue fable [discours] Du leu plesant et delitable, la Rose, 1419. Fable est uns contes que l'om dit des choses qui ne sont pas voires [vraies] ne voiresemblables, si comme la fable de la nef qui vola parmi l'air longuement, Latini, Trésor, p. 518.

XVe s. Il ne le tint à fable, mais s'appareilla, et monta tantost à cheval, et partit, Froissart, liv. II, p. 409, dans LACURNE. Clemence grant et magnanimité, Cela avez ; mais vous passez, sans fable, Ung droit Cesar en liberalité, Orléans, Rondeau de Robertet. Mal osas le ladre huchier, Et à nos gens dire tels fauve, la Pass. de N. S.

XVIe s. Servir de fable au peuple, Montaigne, Il, 35.

ÉTYMOLOGIE

Bourguign. faule ; wallon, fâve ; du lat. fabula, récit, fable, de fari, parler ; grec, φάναι, dire, parler.