« faiseur », définition dans le dictionnaire Littré

faiseur

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

faiseur, euse

(fe-zeur, zeû-z') s. m. et f.
  • 1Celui, celle qui fait quelque chose. Ce n'est plus le marchand au port… qui se propose des gains sans danger… c'est un faiseur de vœux au milieu de la tempête, qui se repent d'être parti du logis, Guez de Balzac, De la cour, 4e discours. Je n'aime pas les faiseurs de remontrances, Molière, le Fest. I, 2. Mais quoi ! rien ne remplit Les vastes appétits d'un faiseur de conquêtes, La Fontaine, Fabl. VIII, 27. Puis, comme on sait, dévots et pauvres gens, Pour honorer l'état du mariage, Sont la plupart de grands faiseurs d'enfants, Sénecé, Serpent mangeur de Kaïmac. Tous les faiseurs de projets sont trompés eux-mêmes les premiers, comme Law le fut dans son système, Voltaire, Dict. phil. (force physique). Warwick chassa enfin d'Angleterre le roi qu'il avait fait, et alla à la tour de Londres tirer de prison ce même Henri VI qu'il avait détrôné, et le replaça sur le trône ; on le nommait le faiseur de rois, Voltaire, Mœurs, 116. Il faut savoir que les faiseurs de tragédies, c'est-à-dire les rois et moi, nous sommes sifflés quelquefois par un parterre qui n'est pas trop bon juge, Voltaire, Lett. Thiriot, 9 oct. 1742. Une douzaine de faiseurs et faiseuses de cabrioles que V. M. fait venir de France dans ses États, Voltaire, Lett. roi de Prusse, 49. Ces erreurs sont de peu d'importance, en comparaison de celles où les faiseurs de collections, qui n'ont pour tout mérite que le faste des cabinets, entraînent les naturalistes qui suivent ces mauvais guides, Buffon, Ois. t. XI, p. 71, dans POUGENS.

    Faiseur de tours, escamoteur.

    Faiseur d'affaires, homme qui a un cabinet et qui, moyennant un bénéfice, traite pour autrui toute sorte d'affaires d'argent.

    Par extension et familièrement. Faiseur d'embarras, celui qui affecte des airs, des prétentions. Faiseur de… celui qui fait semblant de faire, ou qui affecte une apparence de… Ne te voilà-t-il pas comme ces faiseurs de sensiblerie qui voient un sentiment partout ? Picard, Petite ville, III, 2.

  • 2Celui, celle qui fabrique certains objets. Un faiseur d'instruments. Une faiseuse de corsets. Dieu n'est point un simple faiseur de formes et de figures dans une matière préexistante, Bossuet, Élévat. III, 2. Vous portez les mêmes jarretières que la reine, vous les prenez donc chez la même faiseuse, Voltaire, Zadig, ch. 7.

    Familièrement. Cela est d'un bon faiseur, c'est l'œuvre d'un artisan habile et renommé. J'ai remarqué que leurs rabats ne sont pas de la bonne faiseuse, Molière, les Préc. 5.

  • 3Il se dit en parlant des auteurs. Mais nous autres faiseurs de livres et d'écrits, Boileau, Épître VI. Mon ancien ami, mon philosophe, mon faiseur de beaux vers, Voltaire, Lettres en vers et en prose, 157. Je fus bercé par tes faiseurs De vers, de chansons, de poëmes, Béranger, Deux cousins.

    Souvent il se prend en mauvaise part. C'est lui [l'amour] qui sert de matière aux faiseurs de romans et aux poëtes, Descartes, Pass. 90. Le vieux tailleur s'écrie : eh quoi ! ma fille Ne m'a donné qu'un faiseur de chansons ! Mieux jour et nuit vaudrait tenir l'aiguille Que, faible écho, mourir en de vains sons, Béranger, Tailleur et fée. Être un faiseur habile De contes graveleux, Béranger, Roger B.

    C'est un faiseur de phrases, se dit de celui qui fait de belles phrases, de grandes phrases, sans beaucoup d'idées.

    C'est un faiseur d'almanachs, c'est un homme qui aime à pronostiquer.

    Absolument. Celui qui travaille habituellement pour un autre. Ce théâtre, ce libraire a ses faiseurs attitrés. Ce ministre a un bon faiseur.

  • 4Absolument et en mauvaise part. C'est un faiseur, c'est un homme qui a envie de faire du nouveau, du bruit, de changer. Les faiseurs sont redoutés dans les administrations.

    Un faiseur, un intrigant ; celui qui fait des affaires peu honorables.

    PROVERBE

    Les grands diseurs ne sont pas les grands faiseurs, c'est-à-dire ceux qui se vantent le plus sont ordinairement ceux qui font le moins.

REMARQUE

On trouve aussi dans les livres l'orthographe feseur, conforme à la prononciation.

HISTORIQUE

XIVe s. Et pour ce ceulx qui sont faiseurs de bonnes œuvres sont loés à cause de leur vertu, Oresme, Eth. 28. Et injustice est operative ou faiseresse, et par elle sont faiz les extremes, Oresme, ib. 153.

XVe s. Car pour rimer… N'est aujourd'hui, bien le puis soustenir, Si grant faiseur ne si noble pouette, Deschamps, Poésies mss. f° 225, dans LACURNE, au mot pui.

XVIe s. Si j'estoy faiseur de livres, Montaigne, I, 81. Voilà pourquoy les faiseurs de lois deffendent les donations entre le mari et la femme, Montaigne, I, 215. Il vouloit donner les diseurs pour juges aux faiseurs, D'Aubigné, Hist. I, 155. De grand vanteur, petit faiseur, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Faisant ; picard, foiseux, foiseux de fagots, menteur ; bourguign. fezeu ; wallon, feû. L'ancien français avait faisiere, au nominatif, et faseor, au régime ; ces formes répondent à un bas-lat. factátor, factatórem, et non à factor, factorem, qui avait donné faitre, factor.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FAISEUR. Ajoutez :

5Faiseuse d'anges, nourrice qui laisse mourir de propos délibéré les nourrissons qu'on lui confie ; cette expression a souvent retenti dans les discussions à propos de la mortalité des enfants mis en nourrice. Il y a surtout la nourrice à emporter ; alors l'enfant peut mourir pendant le voyage ; s'il échappe à ce danger, il est transplanté dans un milieu souvent misérable, parfois immoral, en butte aux brutalités d'une mégère qui peut être une faiseuse d'anges, L. Narval, la Phil. posit. sept.-oct. 1875, p. 199.