« farder », définition dans le dictionnaire Littré

farder

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

farder [1]

(far-dé) v. a.
  • 1Mettre du fard. On lui a fardé le visage.

    Se farder, farder à soi. Se farder le visage.

  • 2Donner à une chose du lustre, une apparence qui en cache les défauts. Farder une étoffe. Farder sa marchandise. Et moi, sans compliment qui vous farde mon cœur, Je vous offre et demande une amitié de sœur, Corneille, la Veuve, V, 8. À la gymnastique on a fait succéder l'art de farder les corps et de leur donner une beauté factice, Fénelon, t. XXI, p. 33. Les couleurs les plus vives pour farder des vices et des crimes [chez les dieux du paganisme], qui seraient tombés dans le décri sans la parure qu'ils [les poëtes] leur prêtaient pour en couvrir la difformité, l'absurdité et l'infamie, Rollin, Traité des Ét. II, I, 2. Non, de tous les amants les regards, les soupirs Ne sont point des piéges perfides…, Toujours la feinte mensongère Ne farde point de pleurs, vains enfants des désirs, Une insidieuse prière, Chénier, Ode VI.

    Fig. Farder sa marchandise, tromper, faire illusion. Vous ne fardez point votre marchandise, vous êtes honnête homme, Voltaire, Dict. phil. Maladie.

  • 3Déguiser ce qui peut déplaire et choquer. Je vous estime trop pour vouloir rien farder, Corneille, Nicom. I, 2. Je répondrai, madame, avec la liberté D'un soldat qui sait mal farder la vérité, Racine, Brit. I, 2.
  • 4 En termes de littérature, parer d'ornements de mauvais goût. Farder un discours. Farder son langage.

    Il s'est dit aussi en parlant de la peinture. [Amours] Vous avez fardé la peinture, Vous affadissez l'opéra, Béranger, Pauv. amours.

  • 5Il se dit quelquefois simplement pour déguiser, avec un nom de chose pour sujet. Affreuse image du trépas, Qu'un triste honneur m'avait fardée, Surprenantes horreurs, épouvantable idée, Qui tantôt ne m'ébranliez pas, Corneille, Androm. III, 1.
  • 6Se farder, v. réfl. S'enduire de fard. Cette femme se farde.

    Fig. On a beau se farder aux yeux de l'univers, Boileau, Sat. X.

    Être fardé. Tout se farde à la cour, jusqu'à la vérité, Boursault, Ésope à la cour, I, 3.

HISTORIQUE

XIIIe s. Toutes font à Venus hommage, Sans regarder preu ne dommage, Et se cointoient [se parent] et se fardent Pour ceus bouler [tromper] qui les regardent, la Rose, 9064.

XIVe s. Dire ses pechiés sans rien polir ne farder, Ménagier, I, 3.

XVe s. En regardant ces belles fleurs Que le temps nouveau d'amours prie, Chascune d'elles s'ajolie Et farde de plaisans couleurs, Orléans, Rondeau.

XVIe s. Eloquent à inventer des raisons fardées de paroles honestes, Amyot, Dion, 47. C'estoient belles paroles et bien fardées pour couvrir la mauvaise intention qu'il avoit en son cueur, Amyot, Timol. 12. D'ami fardé, flatteur et papelart, Nous garde Dieu…, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 283. La sagesse humaine… faict favorablement et industrieusement d'employer ses artifices à nous peigner et farder les maulx, et en alleger le sentiment, Montaigne, I, 227. Vostre extreme volupté a quelque air de gemissement et de plaincte… voire quand nous en forgeons l'image en son excellence, nous la fardons d'epithetes et qualitez maladifves et douloureuses, langueur, mollesse, foiblesse, defaillance, Montaigne, III, 85.

ÉTYMOLOGIE

Fard. On trouve, au XIIe siècle, un dérivé, fardoillié, barbouiller : Fardoillié furent d'alun et d'arrement [encre], la Prise d'Orenge, v. 450.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1. FARDER. Ajoutez : - REM. Se farder a été dit des chats qui, à l'approche du mauvais temps, se passent les pattes sur les oreilles. À l'approche de la pluie, les hirondelles se tiennent près des habitations et rasent la terre dans leur vol, les lézards se cachent, les chats se fardent, les oiseaux lustrent leurs plumes, Journ. offic. 20 sept. 1873, p. 5976, 1re col.