« fausser », définition dans le dictionnaire Littré

fausser

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

fausser

(fô-sé) v. a.
  • 1Rendre faux, rendre contraire à la vérité, en parlant des promesses faites, de la foi donnée. …Si beaux… Qu'il faille pour son bien que tu fausses ta foi, Régnier, Ép. I. Tu fausses ton serment Pour donner à son crime un juste châtiment, Mairet, Mort d'Asdrubal, I, 4. Damon… Ne pouvait se résoudre à fausser la promesse D'être fidèle à sa moitié, La Fontaine, Coupe. Non, non, n'ayez pas peur Que je fausse parole, Molière, le Dép. IV, 3.

    Fausser le sens de la loi, d'un texte, donner une fausse interprétation à une loi, à un texte.

    Familièrement. Fausser compagnie, proprement être faux, infidèle à une compagnie, et, par suite, quitter une compagnie sans prendre congé, ne pas se trouver à un rendez-vous. Amis, moins de cérémonie, Ou bien je fausse compagnie, Scarron, Virg. v. Quand je fausse pour vous compagnie à tout autre, Th. Corneille, Baron d'Albikrac, IV, 2.

    On le dit aussi pour signifier : ne pas faire ce qui était promis ou attendu. Lorsque, par impuissance ou par mépris, la nuit On fausse compagnie…, Régnier, Sat. X.

  • 2Rendre faux, détruire la justesse. Fausser la voix. Fausser l'esprit.
  • 3 Terme de jurisprudence féodale. Fausser la cour ou le jugement, soutenir qu'un jugement n'est pas équitable. On s'exposait beaucoup en faussant un jugement des pairs, Montesquieu, Espr. XXVIII, 17.
  • 4Courber, tordre un corps solide, de sorte qu'il ne se redresse plus de lui-même. Fausser une clef, une lame.

    Fausser une serrure, en gâter les ressorts par quelque effort.

    Enfoncer sans traverser. Les coups d'épée faussèrent ses armes en divers endroits, Bouhours, Aubusson, liv. III, dans RICHELET.

    Enfoncer en traversant. La flèche, faussant la cuirasse, lui entra bien avant dans le corps, Vaugelas, Q. C. IX, 5.

  • 5 V. n. Chanter faux. Un aveugle y chante en faussant La faridondaine, Béranger, Farid.
  • 6Se fausser, v. réfl. Être faussé. Des promesses qui se faussent, des serments qui se violent.

    Devenir faux. La voix de cet acteur commence à se fausser.

    Être tordu, enfoncé. La lame se faussa par la violence du coup.

    Terme militaire. Ne plus former une ligne droite, en parlant des rangs. Redresser les rangs qui se sont faussés.

HISTORIQUE

XIe s. Je si li fals [le jugement], od li m'en combatrai, Ch. de Rol. CCLXXX.

XIIe s. Quarrals [carreau] ne lance n'en puet [peut] maille fausser, Ronc. p. 50. Ja fu tex [tel] jors que [où] les dames amoient De leal cuer, sans feindre et sans fausser, Quesnes, Rom. anc. p. 87. Por vous [je] ferai une tel abaïe, Se nus [nul] i vient qui ait s'amor fausie, Ja del moustier n'en avera l'entrie [l'entrée], ib. p. 48. Mais tous leur sairemenz [ils] fauserent de legier, Sax. IV. Quant il est vostre huem liges, il vus deit fei porter, E tenir en tuz lius vostre honur e guarder ; E quant il volt tolir vostre curt e fauser, E apele autre curt, de ço l'poez grever, Th. le mart. 44. [Tu] Ne li deiz al busuing ne faillir ne falser, Rou, v. 4471.

XIIIe s. [Ils] ont l'histoire faussée, onque mais [je] ne vi si, Berte, I. Vous avez vostre convenance faussée envers moy, H. de Valenciennes, XXV. Et que li executeur ne puissent fausser le testament dont il sont executeur, il y a bone reson, Beaumanoir, XII, 26. Tout ainsi, qui veut fausser tesmoins, il doit lessier passer le premier tesmoing…, Beaumanoir, LXI, 54. Si un home viaut [veut] la court fausser, et dit que le jugement ou l'esgart ou la conoissance ou le recort que la court a fait est faus et desleaument fait…, Ass. de Jér. I, 179.

XIVe s. Et est moult plus à accuser que ne sont ceulz qui corrumpent ou falsent la monnoie, Oresme, Eth. 264.

XVe s. Le quel compaignon avait faulsé ou fait faulser à un jeune clerc certaines lettres royaulx, Du Cange, falsare. Ce fut chose moult estrange à luy de ainsi faulser sa foi et soy ainsi abaisser, J. de Troyes, Chron. 1472. Judas, plus ne te celeray, C'est de Jhesu qui tout fausse Notre loy et la seue [la sienne] essauce, la Passion de N. S. J. C. Prestement recommencerent leurs armes, et de celle rencontre le seigneur de Ternant donna si grand coup qu'il fauça le bacinet à jour, De la Marche, Mém. liv. I, p. 248, dans LACURNE, au mot coup.

XVIe s. Il r'alluma son courage, et, faulsant la presse, donna jusques à…, Montaigne, II, 33. Nostre intelligence se conduisant par la seule voye de la parole, celuy qui la faulse trahit la societé, Montaigne, III, 78. L'amende qui du commun consentement de nous tous avoit esté prescripte à l'encontre de celuy qui fausseroit compagnie, Cholières, Contes, après-dînée 4.

ÉTYMOLOGIE

Wall. fâser, faire manquement ; provenç. et portug. falsar ; espag. falsear ; ital. falsare ; du lat. falsare, de falsus, faux 1.