« fortifier », définition dans le dictionnaire Littré

fortifier

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fortifier

(for-ti-fi-é), je fortifiais, nous fortifiions, vous fortifiiez ; que je fortifie, que nous fortifiions, que vous fortifiiez v. a.
  • 1Rendre fort, donner des forces. Cet exercice est propre à fortifier le corps. Le bon vin fortifie l'estomac. L'évangéliste ne nous fait pas entendre que l'ange le consola [Jésus-Christ], mais seulement qu'il le fortifia, Bourdaloue, Exhort. sur la prière de J. C. t. I, p. 390. Le sang des Guises fortifia la ligue, comme la mort de Coligni avait fortifié les protestants, Voltaire, Ess. guerres civ. de France.

    Terme de peinture. Fortifier une figure, les membres d'une figure, leur donner plus de grosseur.

    Fortifier les teintes, les rendre plus vigoureuses.

    Fortifier les ombres et les touches, les rendre plus brunes et plus obscures.

  • 2 Fig. Il se dit au sens moral. Ces méditations fortifient l'esprit. Fortifier le courage. L'exemple de ma mort les fortifiera mieux, Corneille, Poly. II, 6. Fortifie, affermis ceux qu'ils auront séduits, Corneille, Héracl. I, 2. Comme le christianisme a pris naissance de la croix, ce sont aussi les malheurs qui le fortifient, Bossuet, Reine d'Anglet. Elle [l'Église catholique] enseigne que nous, qui ne pouvons rien de nous-mêmes, pouvons avec celui qui nous fortifie ; en telle sorte, que l'homme n'a rien de quoi se glorifier, ni de quoi se confier en lui-même, Bossuet, Proj. de réun. des protest. Explic. de points de controv. Vous-même contre vous fortifiez mon cœur, Racine, Bérén. IV, 5.

    Fortifier quelqu'un dans une résolution, l'y affermir, l'y faire persister.

    Corroborer, confirmer. Cela fortifie les soupçons. [Elle]… fortifie en toi cette inclination, Tristan, Panthée, III, 3. Plusieurs circonstances et divers motifs concoururent à faire naître [à Rome] cette haine implacable de la royauté et à la fortifier, Rollin, Trait. des Ét. v, III, 2. Tout fortifie dans les grands cette dangereuse impression, Massillon, Carême, Prosp.

  • 3 Terme de guerre. Fortifier une place, un poste, l'entourer d'ouvrages de défense. S'ils avaient pris encore dix autres de nos places avec un pareil succès [c'est-à-dire en les reperdant après les avoir fortifiées], notre frontière en serait en meilleur état, et ils l'auraient mieux fortifiée que ceux qui jusques ici en ont eu la commission, Voiture, Lett. 74. Qu'il embellît cette magnifique et délicieuse maison [Chantilly], ou bien qu'il munît un camp au milieu d'un pays ennemi et qu'il fortifiât une place…, Bossuet, Louis de Bourbon. Je suis un peu affligé, en ma qualité de Français, d'entendre dire que c'est un chevalier de Tott qui fortifia les Dardanelles, Voltaire, Lett. Catherine, 20 nov. 1770.
  • 4Se fortifier, v. réfl. Devenir plus fort. Cet enfant se fortifie tous les jours. Plus l'Église se fortifiait, plus elle faisait éclater sa soumission et sa modestie, Bossuet, Var. 5e avert. § 16.

    Fig. L'esprit se fortifie par l'étude. Ce devrait être aussi notre unique pensée De nous fortifier chaque jour contre nous, Corneille, Imitation, I, 3. Le cœur se fortifie dans la vertu, Fénelon, Tél. IX. Le fils qu'elle lui avait donné [au czar Pierre] en 1690 naquit malheureusement avec le caractère de sa mère, et ce caractère se fortifia par la première éducation qu'il reçut, Voltaire, Russie, II, 10.

    Avec ellipse du pronom personnel. Chaque jour voyait croître leur foi et fortifier leur charité, Massillon, Carême, Comm.

    S'affermir. Se fortifier dans sa résolution.

  • 5Se donner l'un à l'autre des forces, du courage. Ils s'encouragent, ils se fortifient les uns les autres. Ils se fortifient mutuellement dans leurs résolutions.
  • 6S'entourer de fortifications. L'ennemi se fortifie dans son camp.

    Se fortifier dans un poste, s'y mettre en état de tenir contre les attaques de l'ennemi.

HISTORIQUE

XIVe s. Car tous les fors Englois, de quoi il y a tant, Chasteaux, villes, citez se vont fortefiant, Guesclin. 16911.

XVe s. Et estoit l'intention des Anglois que… ils detruiroient toute Escosse pour la cause de ce que ils s'estoient fortifiés en celle saison des François [les avaient pris pour auxiliaires], Froissart, II, II, 236. Mes [les Anglais] sont fortiffiez leans, Que à peine en pourrez chevir, Myst. du siége d'Orléans, p. 479.

XVIe s. Si la viande ne se digere si elle ne nous augmente et fortifie… , Montaigne, I, 144. La conscience fortifie l'innocent contre la torture, Montaigne, II, 47. Il passa au travers l'armée ennemie pour aller fortifier ses gents de sa presence, Montaigne, III, 172. Il en avoit bien remparé et fortifié toutes les advenues avec clostures et fortifications de bois, Amyot, P. Aem. 20. Clermont d'Antragues averti fortifie [renforce] ses coureurs du capitaine Cartier, et de vingt hommes, avec charge de donner, D'Aubigné, Hist. II, 193. Et soit le tout distillé en fortifiant le feu petit à petit, Paré, XXV, 32.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. et espagn. fortificar ; ital. fortificare ; du lat. fortificare, de fortis, fort, et facere, faire.