« guet », définition dans le dictionnaire Littré

guet

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

guet

(ghè ; le t ne se lie pas dans le parler ordinaire) s. m.
  • 1Action par laquelle on observe, on épie ce qui se passe, ce qui se fait. Le guet dura longtemps. Le guet pendant une nuit obscure. Fais bon guet, Corneille, Illus. com. IV, 2. Une compagne y devait faire Le guet autour de nos amants, La Fontaine, Nic. Tu fais le guet pour eux et les laisses surprendre, Th. Corneille, Baron d'Albikrac, III, 1. Je vais faire le guet ; Qu'il est doux de garder ce qu'on aime ! Favart, Cherch. d'esprit, 16.

    Fig. Un savantas… qui veut rentrer à toute force dans la conversation, et qui est toujours au guet pour prendre au bond l'occasion de se remettre en danse, Sévigné, 511. Il n'est point de moment où l'on ne soit au guet Pour y [à la cour] mettre à profit les faux pas qu'on y fait, Boursault, Ésope à la cour, IV, 2.

    Avoir l'œil, l'oreille au guet, regarder, écouter attentivement ce qui se passe. [Il] A l'œil toujours au guet pour des tours de souplesse, Régnier, Sat. V. Tout le jour il avait l'œil au guet…, La Fontaine, Fabl. VIII, 2. Aie aussi l'œil au guet, Nérine, et prends bien garde qu'il ne vienne personne, Molière, M. de Pourc. 13.

  • 2Il se dit de quelques animaux. Le chat est au guet. Ce chien est de très bon guet.
  • 3 Particulièrement. Surveillance exercée pendant la nuit dans une place de guerre pour se défendre des surprises, dans une ville pour y veiller au bon ordre (acception qui a vieilli). Dans cette ville ce sont les bourgeois qui font le guet.

    Anciennement, guet de mer, obligation de monter la garde sur les côtes. Les habitants des paroisses sujettes au guet de mer, Ordonn. août 1681, IV, 6, 6.

    Terme de féodalité. Garde et guet, droit qui obligeait les vassaux à faire le guet dans le château, et qui fut changé en une redevance en argent.

  • 4Troupe chargée de la surveillance pendant la nuit dans une ville. Ils contrefont le guet et de voix magistrale : Ouvrez de par le roi ! tout de bon le guet vint, Régnier, Sat. X. Sur la bonne foi seule on vit en assurance, Et le guet ne fait point le calme de nos bois, Chaulieu, Stances sur la retraite. On ne bat plus le guet à Paris, on ne casse plus de lanternes, Dancourt, Impromptu de Surênes, sc. 6. Te voilà pris comme un sot ; le guet à cheval est à la grande porte, et le guet à pied à celle de derrière ; regarde par où tu veux sortir, Dancourt, la Femme d'intrigues, V, sc. dern. On voit par les registres du parlement que le guet de cette ville [Paris] était réduit alors à quarante-cinq hommes mal payés et qui même ne servaient pas, Voltaire, Louis XIV, 2.

    Chevalier du guet, chef de la compagnie du guet ; commandant des archers du guet.

    Mot du guet, mot donné a ceux qui sont du guet pour qu'ils puissent se reconnaître, et, en général, mot convenu entre certaines gens pour se reconnaître. Gardez-vous sur votre vie D'ouvrir que l'on ne vous die Pour enseigne et mot du guet : Foin du loup et de sa race, La Fontaine, Fabl. IV, 15.

    fig. Familièrement. Ils se sont donné le mot du guet, c'est-à-dire ils sont d'intelligence.

  • 5Se disait autrefois d'un soldat placé en sentinelle pour faire le guet. Asseoir le guet. Poser le guet.

    Guet chez le roi, signifiait le détachement des gardes du corps qui demeurait, la nuit, près de la personne du roi pour le garder.

HISTORIQUE

XIIIe s. Li mestre et li juré devant dit sont quite du guet por la paine et por le travail que il ont de guarder le mestier de talemelerie [boulangerie], Liv. des mét. 13. Lors estoit chas cuns aseür, Car li siens gaiz [le guet du surveillant] valoit un mur, Rutebeuf, 45.

XIVe s. Parmi les quatre qui alerent avoec les wes des portes, Caffiaux, Abattis de maisons, p. 9. Pour la ville garder moult très bien s'apresterent, Et firent moult bon gait, celle nuit le doublerent, Guesclin. 18576.

XVe s. Le capitaine s'eveilla soudainement, qui toute la nuit avoit dormi et fait trop povre gait, tant qu'il le compara [paya] [surprise du château de Bervich par les Écossais], Froissart, II, II, 13. Nostre guet estoit de cinquante lances qui se te noient vers la grange auz merciers, Commines, I, 8. Revenons à nostre guet [guetteur], lequel, quand il aperçut tout ce qui fut fait, se leva de son guet, et s'en alla sonner sa trompette, Louis XI, Nouv. LXXIII.

XVIe s. Or donques mettons nous en ordre ; Nabuzardan vous sera pour mot du guet, Rabelais, Pant. IV, 39. Me tenant au guet de ces grandeurs extraordinaires, j'ay trouvé que ce sont des hommes comme les aultres, Montaigne, IV, 48. Avoir l'œil au guet, l'oreille aux escoutes, Montaigne, IV, 386. On y mit un guet tel, que les pauvres gens, qui ne pensoient en nul mal, furent surpris, Marguerite de Navarre, Nouv. XL. C'estoit un guet [piége] qu'il dressoit à Metellus bien mal aisé à eschapper, Amyot, Marius, 51. Ils entendoient six tambours battre la garde et les trompettes sonner au guet, D'Aubigné, Hist. II, 447. Faire le guet à Montfaucon [y être pendu], Cotgrave Bon gué chasse malaventure, Cotgrave Il est bien vray qu'il [le connétable de Bourbon] fut fort bien compris dans le traité de Madrid ; mais le roy [François 1er] le rompit tout à trac, quand il fut de retour en France, si bien que M. de Bourbon fut du guet [fut la dupe] et eut la cassade, Brantôme, Capestrang. t. I, p. 212.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. gach, guach, gag, gayt, s. m. gaita, gacha, s. f. ; du germanique : anc. h. allem. wahta ; allem. mod. Wacht, guet, garde.