« moine », définition dans le dictionnaire Littré

moine

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

moine

(moi-n') s. m.
  • 1Homme qui s'est engagé par des vœux à suivre une certaine règle autorisée par l'Église. Les chevaliers de Malte… cadets de bonne maison qui ne veulent rien savoir, rien valoir, mais qui voudraient bien tout avoir ; au reste, gens de bien et d'honneur, moines d'épée…, Patin, Lett. t. II, p. 425. Ils ont jugé plus à propos et plus facile de censurer que de repartir, parce qu'il leur est bien plus facile de trouver des moines que des raisons, Pascal, Prov. III. Des évêques [anglicans] qui ont anéanti eux-mêmes l'autorité de leur chaire… en condamnant ouvertement leurs prédécesseurs jusqu'à la source même de leur sacre, c'est-à-dire jusqu'au pape saint Grégoire et au saint moine Augustin son disciple et le premier apôtre de la nation anglaise, Bossuet, Reine d'Anglet. Vous avez vu, au douzième et au treizième siècle, les moines devenir princes ainsi que les évêques ; ces évêques et ces moines partout à la tête du gouvernement féodal, Voltaire, Mœurs, 197. On demande pourquoi on permet à des moines de reprendre un de leurs moines qui s'est fait soldat, et pourquoi un capitaine ne peut reprendre un déserteur qui s'est fait moine, Voltaire, Dict. phil. Vœux. Il faut entrevoir pendant ces cinq siècles [de saint Benoît à saint Bernard] les efforts surhumains tentés par ces légions de moines sans cesse renaissantes, pour dompter, pacifier, discipliner, purifier vingt peuples barbares successivement transformés en nations chrétiennes, Montalembert, Moines d'Occident, t. I, p. V. Le premier de tous les services que conféraient les moines à la société chrétienne, c'était de prier, de prier beaucoup, de prier toujours pour tous ceux qui prient mal ou qui ne prient point ; la chrétienté honorait et estimait surtout en eux cette immense force d'intercession, ces supplications toujours actives, toujours ferventes, ces torrents de prières sans cesse versées aux pieds du Dieu qui veut qu'on l'implore, ID. ib. p. XLVIII.

    Moines gris, s'est dit des moines de Cîteaux, au commencement de leur institution.

    Familièrement. Gras comme un moine, fort gras.

    Attendre quelqu'un comme les moines font l'abbé, c'est-à-dire se mettre à table et dîner sans l'attendre (locution née de ce que dans les monastères l'heure de chaque chose est réglée).

  • 2Moine lai, laïque, ordinairement homme de guerre invalide, que le roi plaçait dans une abbaye de nomination royale, pour y être entretenu.
  • 3Moine bourru, voy. BOURRU.
  • 4Caisse doublée de fer-blanc, où l'on suspend un réchaud pour chauffer un lit ; ou cylindre de bois creusé, doublé de tôle, dans lequel on introduit un fer chaud pour ce même usage. Une femme de chambre accourt avec une bougie, elle trouve un moine dont on avait chauffé le lit, que la Furstemberg n'avait pas senti, Saint-Simon, 311, 72.
  • 5Feuille de papier dont on couvre la traînée de poudre qui doit porter le feu au saucisson d'une mine.

    Terme de marine. Se dit de petits cônes de poudre humectée avec du vinaigre, que l'on brûle dans l'entre-pont pour chasser le mauvais air.

    Artifice que l'on nomme aussi feu de conserve.

  • 6Sorte de masse ou de marteau à peu près pointu.
  • 7Partie intérieure du moule qui sert à faire les coupelles.
  • 8Boursouflure qui paraît quelquefois dans le fer et dans l'acier quand on le forge.
  • 9Les imprimeurs appellent moines des feuilles mal imprimées qui, n'ayant pas bien pris l'encre, paraissent noires et blanches comme l'habit de certains moines.

    Moine se dit aussi, en imprimerie, de la partie blanche elle-même.

  • 10Coquille univalve du genre cône (voy. SARCORAMPHE).
  • 11Donner le moine, se disait d'une certaine malice que pratiquaient les écoliers, les pages et les laquais, en attachant une petite corde au gros doigt du pied d'un homme endormi, et la tirant de temps en temps ; on ne connaît pas l'origine de cette locution. Au XVIe siècle, bailler le moine, signifiait porter malheur.

PROVERBES

Pour un moine on ne laisse pas de faire un abbé, pour un moine l'abbaye ne faut pas, ou faute d'un moine l'abbaye ne manque pas, ne chôme pas, c'est-à-dire l'absence d'une personne n'empêche pas, ne doit pas empêcher que la chose dont il s'agit ne se fasse.

L'habit ne fait pas le moine, c'est-à-dire ce ne sont point les habits ni la parure extérieure qui font l'honnête homme.

HISTORIQUE

XIe s. Ainz [il] deit moine estre en un de ces moustiers, Ch. de Rol. CXXXIX.

XIIe s. E quant li moinie [prononcé moine] vindrent lur complie chanter, Th. le mart. 48. Muine e cou [cuisinier] e sergant, escuier e garçun, Chascun aveit sun pain e dreite livreisun, ib. 61.

XIIIe s. Et puis [il] se rendit moine dedans une abeïe, Berte, II. La robe ne fait pas le moine, la Rose, 11092.

XVe s. Ja ne verrez moine c'on face abbé, De bien servir eglise entalenté [désireux], Bibl. des chartes, 4e série, t. V, p. 353. Convoitise de moines blans, envie des moines ners [dicton né de la convoitise des nouveaux ordres vêtus de blanc, et de l'envie des anciens ordres vêtus de noir], Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 35. Et pour ce dit-on : pour la pitié de la nonnain, baise le moine l'oreiller ; ainsi estoit il du chevalier [qui alla se coucher en plein air au plus près qu'il put du logis de sa dame], Perceforest, t. V, f° 65.

XVIe s. Pour tant encore est le proverbe en usaige de bailler le moyne à quelqu'ung [lui porter malheur], Rabelais, I, 45. Frere Jan des Entommeures… vray moyne si oncques en feust, depuys que le monde moynant moyna de moinerye, Rabelais, Garg. I, 27. À la fin le regnard sera moine, Cotgrave Homme ne connoist mieux la malice que l'abbé qui a esté moine, Cotgrave Il a bien eu du moine [il a été bien pris, bien étrillé], Carloix, VI, 25. Paillard comme un moine, H. Estienne, Apol. pour Hérod. p. 326, dans LACURNE. Il se falloit garder du devant d'une femme, du derriere d'une mule, et d'un moyne de tous costez, Des Accords, Bigarrures, p. 49, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Bourg. mone ; Provenç. monge, mongue, mongue, moncgne, moyne ; cat. monjo ; esp. et port. monge ; ital. monacho. Le français moine vient non du latin monachus, mais d'un thème monius, qui se trouve dans le bas-latin monialis (en des textes du VIIe siècle) ; monius est une autre forme de monachus, grec μοναχὸς, dérivé de μόνος, seul.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

MOINE. Ajoutez :
12Nom d'un papillon de nuit, bombyx monacha.