« moulin », définition dans le dictionnaire Littré

moulin

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

moulin

(mou-lin ; l'n ne se lie jamais : un moulin à vent ; au pluriel, l's se lie : des mou-lin-z à vent) s. m.
  • 1Machine composée de diverses pièces, pour faire tourner des meules, et qui est employée pour réduire les grains en farine. Il [le mulet] eût cru s'abaisser servant un médecin ; Étant devenu vieux, on le mit au moulin, La Fontaine, Fabl. VI, 7. Déjà nouveau seigneur, il vante sa noblesse ; Quoique fils de meunier, encor blanc du moulin, Il est prêt à fournir ses titres en vélin, Boileau, Ép. V.

    Moulins à bis, moulins qui fabriquent des farines bises.

    Moulins à blanc, moulins qui fabriquent des farines blanches.

    Anciennement. Moulin pendu, moulin établi sur un bateau.

    Moulin banal, moulin auquel un seigneur avait le droit d'obliger tous les habitants de sa seigneurie à venir moudre leurs grains.

    Fig. Faire venir l'eau au moulin, procurer à soi, aux siens, des avantages, de l'argent, de l'utilité, etc.

    Fig. Il viendra moudre à mon moulin, il aura besoin de moi, j'aurai ma revanche.

    Fig. Jeter son bonnet par-dessus les moulins, voy. BONNET.

    Fig. C'est un moulin à paroles, se dit d'une personne fort babillarde.

    Fig. La langue, comme instrument qui moud des paroles. Mme de Richelieu me parut abattue… les fatigues de la cour ont rabaissé son caquet ; son moulin me parut en chômage, Sévigné, 110. La Bury fait fort joliment tourner son moulin à paroles, Sévigné, 26 janv. 1680.

    Fig. Moulin à sophismes, celui qui débite beaucoup de sophismes. Celui qui connaîtra l'esprit du stoïcisme, ne sera point étonné qu'un amalgame de philosophie et de théologie ait fait des disciples de Zénon des moulins à sophismes, Diderot, Claude et Nér. II, 8.

  • 2Moulin à vent, sorte de moulin qui est mû par le vent. Dans la suite [après les mortiers où l'on pilait le grain], ils [les Romains] firent usage de meules, c'est-à-dire de moulins à bras, auxquels ils occupaient leurs esclaves, surtout pour les punir… quant aux moulins à eau, il n'en est parlé nulle part avant le règne d'Auguste… les moulins à vent sont une invention tout à fait moderne, Bouchaud, Instit. Mém. sc. mor. et pol. t. V, p. 130. Mabillon a publié une charte de 1105 par laquelle Guillaume, comte de Mortain, permet à Vital, abbé de Savigny, d'établir, dans les diocèses de Bayeux, d'Évreux et de Coutances, des moulins à eau et des moulins à vent, Mongez, Instit. Mém. hist. et litt. anc. t. III, p. 447.

    Vêtir un moulin à vent, mettre les voiles aux volants.

    Fig. Il est vêtu comme un moulin, il est habillé en toile.

    Cette personne, cette chose ressemble à telle autre comme à un moulin à vent, elle ne lui ressemble pas du tout.

    Cela lui ressemble comme à un moulin à vent, se dit d'une mauvaise comparaison. Il y a une constellation dans le ciel qu'il a plu à quelques personnes de nommer Balance, et qui ressemble à une balance comme à un moulin à vent, Arnauld, Logique de Port-Royal, 1er discours.

    Fig. Se battre contre des moulins à vent, se forger des chimères ; locution prise du combat effectif de Don Quichotte contre des moulins à vent. Ce serait là un moulin à vent digne de leur faire tirer l'épée, Sévigné, 4 août 1680.

  • 3Toute autre machine du même genre qui sert à divers usages. Moulin à foulon, à huile, à poudre, à tabac, à sucre, à tan, à papier. Leurs moulins à scier leur sont [aux Hollandais] d'une utilité fort grande, Corresp. de Colbert, III, 2, p. 305. Il est dit dans cet arrêt [du 7 nov. 1641] que S. M. acceptait les offres de Briot et de Racle, et leur ordonnait de faire porter à la monnaie au marteau leur moulin et machines pour fabriquer les nouvelles espèces, sous les poinçons et matrices du sieur Varin, conducteur des engins de la monnaie au moulin, J. Caillet, l'Administration en France sous Richelieu, II, 409.

    Moulin à café, à poivre, petit ustensile où l'on moud le café, le poivre.

    Moulin à beurre, baratte rotative.

    PROVERBE

    On envoie les ânes au moulin.

HISTORIQUE

XIIe s. As hummes saint Thomas sun curuz [le roi] pardona, La surur [à la sœur de] saint Thomas merci quist e cria, E en adrescement un molin li dona, Th. le mart. 162.

XIIIe s. Le molin à vent delès saint Antoine…, Liv. des mét. 309.

XIVe s. Et trop va foloiant Li hons quant il se fie en femme tant ne quant ; De pensées de femmes vont li molin molant, Baud. de Seb. XIII, 390.

XVe s. Un chevalier qui porte un escu d'argent à un fer de moulin et une bordure endentelée de gueules, Froissart, II, II, 18. Un molin à pasteiller, autrement dit à guedes, Du Cange, molendinum.

XVIe s. Par le moyen de la grande despense l'eau est venue à leur moulin, Lanoue, 334. On eust crié qu'il avoit derrier le bataillon quelque barbe ou cheval viste pour jouer à la fausse compagnie, et gaigner le moulin, D'Aubigné, Faen. IV, 1. Moulins portatifs, D'Aubigné, Hist. I, 220. Vingt milliers de poudre, sans celle que les moulins faisoient, D'Aubigné, ib. II, 37. Moulins à bras, D'Aubigné, ib. II, 151. Un moulin à cheval, D'Aubigné, ib. II, 154. En moulins banaux, qui premier vient, premier engraine, Loysel, 259. Il y en a eu la pluspart controuvées par les prestres par pure avarice, pour amener la farine au moulin, Calvin, Instit. 956. Pour la construction et ediffice d'un moulin qui doit estre assis et porté sur basteaulx en la riviere de Seine, près la poincte du palais de Paris, pour servir à pollir dyamans, aymeraudes, agattes et autres especes de pierres, Bibl. des ch. 6e série, t. I, p. 481. Assez va au moulin qui son asne y envoie, Génin, Récréat. t. II, p. 235. L'eauve fault au molin, Génin, ib. p. 243. Qui veut ouir des nouvelles, au four et au moulin on en dit de belles, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 176. Chacun ira au moulin avec son propre sac, Leroux de Lincy, ib. p. 268. Chascun moulin trait à lui l'eau, Leroux de Lincy, ib. Le four appelle le moulin bruslé [se dit quand quelqu'un a un vice et le reproche à un autre], Nicot, Dict. On ne peut estre ensemble au four et au moulin, Cotgrave Qui entre dans un moulin, il convient de necessité qu'il s'enfarine, Cotgrave Sous ombre d'asne entre chien au moulin, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Berry et wallon, molin ; picard, molin, mélin, meulin ; bourguig. melin ; provenç. molin, moli ; catal. molí ; espagn. molino ; portug. moinho ; ital. molino ; du bas-lat. molinus, qui vient du latin molinum saxum, pierre à moudre, de mola, meule à moudre.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

MOULIN. Ajoutez :
4Moulin à poudre, moulin à faire la poudre ; moulin à meules, celui où les matières destinées à composer la poudre sont pressées sous des meules verticales ; moulin à pilons, celui où ces matières sont battues par des pilons dans des mortiers.
5Chute d'eau qui se creuse un conduit à l'intérieur des glaciers, et qui, finissant par en percer la masse, tombe au fond et va frapper le roc, entraînant avec elle du gravier et des terres.i Les savants naturalistes dans leurs écrits, les guides dans le récit de leurs courses aventureuses, racontent beaucoup de choses sur les moulins des glaciers, sur leurs fissures, leurs pyramides, leurs bancs de sable et autres phénomènes curieux qui sont visibles à leur surface, Journ. offic. 18 oct. 1873, p. 6429, 2e col. Il n'est point de touriste, traversant la mer de glace de Chamonix, à qui son guide n'ait montré les cascades appelées moulins… les moulins de nos glaciers sont des miniatures, Ch. Martins, Rev. des Deux-Mondes, 15 avr. 1875, p. 857.
6 Moulin à lumière, nom, en Allemagne, d'un appareil où la rotation d'une roue placée au centre d'un tube de Geissler est produite par un effet dynamique spécial à l'électricité, W. de Fonvielle, Acad. des sc. Comptes rend. t. LXXXIII, p. 149.