« nouveauté », définition dans le dictionnaire Littré

nouveauté

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

nouveauté

(nou-vô-té) s. f.
  • 1Qualité de ce qui est nouveau. En quelle nouveauté d'orage Ne fut éprouvé ton courage ? Malherbe, III, 3. Je fus d'abord confus de la nouveauté de ce compliment, Guez de Balzac, liv. VI, lett. 3. Surpris des nouveautés d'un tel événement, Corneille, Héracl. II, 6. La grâce de la nouveauté est à l'amour ce que la fleur est sur les fruits ; elle y donne un lustre qui s'efface aisément et qui ne revient jamais, La Rochefoucauld, Max. 274. La grâce de la nouveauté et de la longue habitude, quelque opposées qu'elles soient, nous empêchent également de sentir les défauts de nos amis, La Rochefoucauld, Réfl. mor. n° 426. Les impressions anciennes ne sont pas seules capables de nous abuser : les charmes de la nouveauté ont le même pouvoir, Pascal, Pens. III, 3, éd. HAVET. Les réformés, affligés de leur nouveauté qu'on ne cessait de leur reprocher, Bossuet, Variat. XI, § 6. Tout commence : il n'y a point d'histoire ancienne où il ne paraisse non-seulement dans ces premiers temps, mais longtemps après, des vestiges manifestes de la nouveauté du monde, Bossuet, Hist. I, 2. Toutes ces affectations, si basses et si puériles, ne viennent que d'une seule cause, c'est à savoir de ce qu'on cherche la nouveauté dans les pensées, qui est la manie surtout des écrivains d'aujourd'hui, Boileau, Longin, Subl. ch. 4. Les lois humaines tirent avantage de leur nouveauté, qui annonce une attention particulière et actuelle du législateur pour les faire observer, Montesquieu, Esp. XXVI, 2. La nouveauté des arts parmi nous ne prouve point la nouveauté du globe, comme le prétendait Épicure, l'un de nos prédécesseurs en rêveries, Voltaire, Dict. phil. Arts, beaux-arts. La nouveauté paraît, et son brillant pinceau Vient du vieil univers rajeunir le tableau, Delille, Imag. III.
  • 2Chose nouvelle. Ce sont des nouveautés dont j'ai lieu d'être en peine, Corneille, Attila, III, 2. Seigneur, ces nouveautés ont droit de me confondre, Molière, D. Garcie, V, 5. Quand on aime fortement, c'est toujours une nouveauté de voir la personne aimée, Pascal, Passions de l'amour. Quelle chimère est-ce donc que l'homme ! quelle nouveauté, quel monstre, quel chaos, quel sujet de contradiction, quel prodige ! Pascal, Pens. VIII, 1, éd. HAVET. Ils pratiquent des nouveautés dans les confessions, Pascal, Prov. X. Ma fille, pour être si opposées dans nos lectures, nous n'en sommes pas moins bien ensemble ; au contraire, nous sommes une nouveauté l'une pour l'autre, Sévigné, 9 juin 1680. Ils avaient un dessein formé de se servir de mon amitié, de ma crédulité, de mon crédit pour établir cette nouveauté à la cour, Maintenon, Lett. au card. de Noailles, 29 mai 1697. Je vais vous régaler de grandes nouveautés, La Bruyère, Théophraste, VIII. Être chrétien et n'être pas pénitent était un monstre et une nouveauté sans exemple, Massillon, Carême, Jeûne.

    C'est nouveauté, c'est une nouveauté de vous voir, se dit à quelqu'un qu'on n'a pas vu depuis longtemps.

  • 3En religion, en politique, et en tout genre d'opinions, innovation. En toute opinion je fuis la nouveauté, Régnier, Sat. IX. On ne peut plus avancer de nouveautés sans péril, Pascal, Préf. Vide. La source de tout mal est que ceux qui n'ont pas craint de tenter au siècle passé la réformation par le schisme, ne trouvant point de plus fort rempart contre toutes leurs nouveautés que la sainte autorité de l'Église, ils ont été obligés de la renverser, Bossuet, Reine d'Anglet. L'erreur et la nouveauté se faisaient entendre dans toutes les chaires ; et la doctrine ancienne… pouvait à peine parler à l'oreille, Bossuet, Reine d'Anglet. Dans cette belle délibération où il s'agissait de réformer les abus du gouvernement, un des principaux règlements que Mécénas proposa à Auguste fut d'empêcher les nouveautés dans la religion, qui ne manquaient pas de causer de dangereux mouvements dans les États, Bossuet, Hist. II, 12. Il écarte les erreurs et les profanes nouveautés qui allaient s'introduire dans sa province, Fléchier, Panég. t. II, p. 303. Votre facilité a fait naître de nouvelles prétentions ; le peuple a voulu avoir ses magistrats particuliers ; vous savez avec quelle force je m'opposai à ces nouveautés, Vertot, Rév. rom. II, 160. Le peuple, toujours avide de la nouveauté, voyait avec plaisir s'élever un parti qui semblait n'en vouloir qu'à l'autorité du sénat, Vertot, ib. XII, 170. L'amour des nouveautés, le faux zèle, la crainte, De la Mecque alarmée ont désolé l'enceinte, Voltaire, Mahomet, I, 1. Cela tient à l'incertitude sociale de tout le dix-huitième siècle partagé entre d'anciennes habitudes et de puissantes nouveautés, Villemain, Littérature fr. 18e siècle, 2e partie, 3e leçon.
  • 4Caractère du nouvel homme, en style mystique. Cette nouveauté, qui ne peut déplaire à Dieu, comme le vieil homme ne peut lui plaire, est différente des nouveautés de la terre, en ce que les choses du monde, quelque nouvelles qu'elles soient, vieillissent en durant, au lieu que cet esprit nouveau se renouvelle d'autant plus qu'il dure davantage, Pascal, Lett. à Mlle de Roannez, 3. Et toute la nouveauté que j'y trouve [dans l'âme du fidèle converti] n'est que le renouvellement de l'homme intérieur, Massillon, Carême, Jeûne.
  • 5Chose nouvelle en fait de mode, de livre, etc. La nouveauté qui suit, vieillit la nouveauté, Delille, Imag. III.

    Les nouveautés, les étoffes les plus nouvelles et les plus à la mode.

    Article de haute nouveauté, article de la dernière mode.

    Livres qui viennent de paraître. Il m'envoie toutes les nouveautés. J'aime à lire les nouveautés. Nous déjeunions, nous causions, nous lisions quelques nouveautés, Rousseau, Conf. V. Ces nouveautés éphémères qui courent on ne sait pourquoi, qui meurent on ne sait comment, Rousseau, ib.

    Marchand de nouveautés, celui qui fait particulièrement métier de vendre des étoffes pour femmes, la mercerie, les rubans, la lingerie et tout ce qui concerne la toilette des femmes. On dit de même : magasin de nouveautés.

    Pour les livres, on dit libraire, librairie de nouveautés.

    Au sing. La nouveauté se dit pour le commerce de nouveautés. Il est dans la nouveauté.

    En style de fabrique de drap (à Elbeuf, à Louviers), on appelle nouveautés, les draps à dispositions variées ou à couleurs bizarres, par opposition aux draps unis et à couleurs acceptées, parce que ces nouveautés changent et n'ont qu'un temps.

  • 6Spectacle, pièce nouvelle qui a une certaine vogue. Les nouveautés ont ce désavantage qu'on y va moins en spectateur qu'en critique, Marmontel, Élem. litt. Œuv. t. X, p. 42, dans POUGENS.
  • 7Temps pendant lequel une chose est nouvelle. Cette mode est encore dans sa nouveauté.
  • 8 Terme de jardinier. Fruits et légumes venus avant le temps par le soin du jardinier. Un bon jardinier doit avoir de la passion pour les nouveautés.

    On dit aujourd'hui primeurs.

HISTORIQUE

XIIIe s. Ses drois offices [du bailli], s'est de garder les drois et les coustumes du païs et les porfis de la terre son segneur, sans fere novelté desconvenable, Beaumanoir, I, 42.

XVe s. Dont vient cette nouvelleté ? Froissart, II, II, 116. Il n'avoit mie commission de la seigneurie de Venise, sans laquelle il n'oseroit entreprendre aucune nouvelleté, Boucic. II, 14. Pour commencer à faire cas de nouvelleté, ils misrent hors de prison le duc de Gueldres, Commines, V, 17. Elle veult souvent avoir nouveautez selon le temps, tant en robes, saintures que aultres choses, Les 15 joyes de mariage, p. 41.

XVIe s. Mais que vous servira ceste fleur de beauté, De jeunesse et d'amour richement couronnée, Si, sans estre cueillie, elle devient fennée Et perd sa desirable et chere nouveauté ? Desportes, Diane, II, 26. Ces choses, à l'adventure, plairont plus aux lecteurs pour la nouveauté et curiosité, qu'elles ne les offenseront pour leur faulseté, Amyot, Rom. 18. Haïssant ceulx qui machineroient quelques nouvelletez, Amyot, Solon, 61. Les lieux et les livres que je reveoy me rient toujours d'une fresche nouvelleté, Montaigne, I, 35. La fuyte de la nouvelleté et de l'estrangeté, Montaigne, II, 313.

ÉTYMOLOGIE

Bourg. nôveàtai ; provenç. noveletat, noeletat ; du lat. novellitatem, qui vient de novellus (voy. NOUVEAU).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

NOUVEAUTÉ.
5Ajoutez :

On appelle nouveautés les plantes chauffées, c'est-à-dire celles qui sont produites par les cultures forcées, Journ. offic. 31 mai 1875, p. 3869, 2e col.

9Locution vieillie. À la nouveauté que, dans le premier moment que. Un étourdi se pourra bien revancher, et surtout à la nouveauté qu'on lui aura fait plaisir, Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne.