« pénitence », définition dans le dictionnaire Littré

pénitence

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pénitence

(pé-ni-tan-s') s. f.
  • 1Retour du pécheur à Dieu, avec une ferme résolution de ne plus pécher à l'avenir. Dieu absout aussitôt qu'il voit la pénitence dans le cœur ; l'Église, quand elle la voit dans les œuvres, Pascal, Pens. XXIV, 62, éd. HAVET. La pénitence n'est autre chose qu'une sainte indignation contre soi-même, Bossuet, 4e sermon, Carême, Pénitence, 2. Ô pénitence impénitente ! ô pénitence toute criminelle et toute infectée de l'amour du monde ! Bossuet, Sermons, Impénit. fin. Variantes, B, dans GANDAR, Choix de sermons. Tremblez, âmes réconciliées, qui renoncez si souvent à la grâce de la pénitence…, Bossuet, Anne de Gonz. Serons-nous fort contents d'une pénitence commencée à l'agonie… ? Bossuet, ib. Nos fausses pénitences qui ne sont suivies d'aucun changement dans nos mœurs, Bossuet, Mar.-Thér. Il est impossible qu'une telle âme soit renouvelée par la pénitence, Bossuet, Anne de Gonz. Les grâces de la pénitence sont les dispositions saintes par où Dieu nous sollicite de renoncer au péché, Bourdaloue, Serm. 18e dim. après la Pentec. Domin. t. IV, p. 120. La pénitence, disent les conciles, est comme le supplément et comme le recouvrement de la grâce de l'innocence, Bourdaloue, Concept. de la Vierge, Myst. t. II, p. 50. Je sais que la pénitence de ceux qui se laissent surprendre à la mort doit être suspecte, Fléchier, Mme de Mont. La pénitence sans laquelle l'homme pécheur ne doit rien prétendre au salut, Massillon, Profess. relig. Serm. 1.

    Ordre de la pénitence de la Madeleine, congrégation de femmes repentantes.

  • 2Le sacrement de la pénitence, ou, simplement, la pénitence, l'un des sept sacrements de l'Église, institué par Jésus-christ lorsqu'il donna à ses apôtres le pouvoir de lier et de délier, et celui de remettre les péchés, et par lequel le prêtre remet les péchés à ceux qui les confessent. Le sacrement de la pénitence est un échange mystérieux qui se fait, par la bonté de Dieu, de la peine éternelle en une temporelle, Bossuet, Sermons, Satisfaction, 1. Elle demande d'elle-même les sacrements de l'Église, la pénitence avec componction, l'eucharistie avec crainte…, Bossuet, Duch. d'Orl. Le prêtre, quoique lieutenant de Dieu et dispensateur de la pénitence, ne peut répondre avec certitude, ni de sa validité, ni de sa nullité, Bourdaloue, Serm. 18e dim. après la Pentec. Dominic. t. IV, p. 100.

    Le tribunal de la pénitence, le prêtre qui confesse ; le lieu où il confesse.

  • 3Tout ce que le prêtre impose, en expiation des péchés. Les pénitences extérieures disposent à l'intérieur, comme les humiliations à l'humilité, Pascal, Pens. XXV, 137, éd. HAVET. À mesure que l'iniquité s'est accrue, la pénitence s'est mitigée, Bourdaloue, Jug. dern. 2e avent, p. 339. Vous contrefaites la pénitence, mais vous ne la faites pas, Bourdaloue, Pénit. Avent, p. 486. L'Évangile à l'esprit n'offre de tous côtés Que pénitence à faire et tourments mérités, Boileau, Art p. III. La seule approche des jours de pénitence vous jette dans l'ennui et dans la tristesse, Massillon, Avent, Mort du péch. Il est bon que les pénitences soient jointes avec l'idée de travail, non avec l'idée d'oisiveté, Montesquieu, Espr. XXIV, 12.

    Pénitence publique, sorte d'expiation que l'Église imposait autrefois aux grands criminels, retenus dans l'état d'excommunication. Louis [le Débonnaire], le visage contre terre, demande lui-même la pénitence publique, qu'il ne méritait que trop en s'y soumettant, Voltaire, Mœurs, 23. Il fallait subir une pénitence publique pour obtenir la rémission des crimes commis après avoir été baptisé, Condillac, Histoire anc. XV, 9.

    Lettres de pénitence, se disait des lettres que recevaient de leurs évêques les pénitents auxquels des pèlerinages étaient imposés.

    Libelle de pénitence, libelle renfermant divers articles de pénitence que des individus coupables d'hérésie ou de prévarication s'engageaient à observer

  • 4Il se dit des jeûnes, des prières, des macérations, en un mot de toutes les austérités qu'on s'impose en expiation de ses péchés. Faites pénitence, parce que le royaume des cieux est proche, Sacy, Bible, Évang. St Math. IV, V. 17. Un beau château, un bel air, de belles terrasses, une trop bonne chère : cette vie est trop douce, et les jours s'écoulent trop tôt, et l'on ne fait point de pénitence, Sévigné, 20 juill. 1694. Les peines qui sont attachées à la tendresse que j'ai pour vous, étant offertes à Dieu, font la pénitence d'un attachement qui ne devrait être que pour lui, Sévigné, 29 mars 1680. Il [David] fit pénitence avec son peuple, Bossuet, Hist. I, 6. Ses remords [de Mme de la Vallière], encore plus que les dégoûts causés par une rivale, la conduisirent aux Carmélites, où elle vécut trente-six ans dans la plus dure pénitence, Duclos, Œuv. t. V, p. 178.

    Fig. Faire pénitence de sa mauvaise conduite, en être puni par quelque malheur. Charles, de mes péchés j'ai bien fait pénitence, Régnier, Sat. VIII. Les Allemands, qui passèrent ensuite et qui sont les meilleures gens du monde, firent une rude pénitence de nos étourderies, Montesquieu, Rom. 23.

    Fig. et familièrement. Faire pénitence, faire mauvaise chère. Vous venez dîner avec nous sans nous avertir, vous ferez pénitence.

  • 5Les psaumes de la pénitence, voy. PSAUME.
  • 6Punition, châtiment d'une faute. Voilà une rude pénitence pour une faute bien légère. Mettre un enfant en pénitence. Des pénitences d'enfant. Adèle ne viendra point avec nous chez Nicolle ; elle est en pénitence aujourd'hui, Genlis, Ad. et Théod. t. I, p. 293, dans POUGENS.
  • 7Il se dit, à certains jeux de société, des punitions infligées à ceux qui ont manqué aux règles. Votre pénitence sera de dire une chanson.
  • 8Pour pénitence, en pénitence, pour votre pénitence, loc. adv. En punition, pour peine ; se dit surtout par plaisanterie. Voyons, lui dit le confesseur : C'est le plaisir qui fait l'offense ; Que donnait-on ? - Le Déserteur. - Vous le lirez pour pénitence, Piron, Épigr. contre Sédaine. Mortifiez vos goûts et vos plaisirs ; Et, si parfois vous avez des désirs, Demandez Gluck pour votre pénitence, Épigr. contre Gluck, sans nom d'auteur, dans l'Acanthologie ou Dictionnaire épigrammatique de Fayolle.

REMARQUE

Voltaire a dit : Devers Pâques on doit pardonner aux chrétiens qui font pénitence ; je la fais…, Lett. Cideville, 13 mars 1741. Suivant la règle, pénitence, sans article, ne devrait pas être représenté par la ; mais la phrase étant claire peut passer.

HISTORIQUE

XIe s. Par penitence [il] les comande à ferir [frapper], Ch. de Rol. LXXXVII.

XIIe s. Tant [je] fais pour lui [elle] greveuse penitance…, Couci, X.

XIIIe s. Pour faire penitance chascuns outremer va, Berte, CVIII. Et si est ague [la crosse] par desous, pour çou que li prelas doit donner penitenche poignante as pecheours, Chr. de Rains, p. 105. Et si soffrit la peneance ; Ice affiert [convient] à telle enfance, Fabliaux mss. dans LACURNE. Après te doins [donne] en penitence, Que nuit et jor sans repentence En bien amer soit ton penser, la Rose, 2243.

XVIe s. Une satiété si lourde, qu'elle equipolle à penitence [repentir], Montaigne, I, 70.

ÉTYMOLOGIE

Bourg. pegnitance ; provenç. penitencia, penedensa, pentenza ; esp. penitencia ; ital. penitenzia ; du lat. poenitentiam, dérivé de poenitens. L'ancien français avait deux formes : penitence, calqué sur le latin, et peneance qui avait subi l'empreinte française. Peneance s'était contracté aussi en penance.