« refuge », définition dans le dictionnaire Littré

refuge

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

refuge

(re-fu-j') s. m.
  • 1Lieu où l'on s'enfuit, où l'on se retire pour être en sûreté. Mais chercher ton asile en la maison du mort ! Jamais un meurtrier en fit-il son refuge ? Corneille, le Cid, III, 1. Il [Dieu] sera votre juge : Vous ne trouverez point devant lui de refuge, Corneille, Poly. V, 2. Les coupables du même crime cherchent naturellement un même refuge, Bossuet, Déf. Var. 1er disc. 40. Dans cette inconstance des choses humaines… celui-là me semble heureux qui peut avoir un refuge, Bossuet, Sermons, Amour des plaisirs, 2. Là [dans la tour de Montlhéri], depuis trente hivers un hibou retiré Trouvait contre le jour un refuge assuré, Boileau, Lutr. III.

    Lieu où se rendent des gens qui ne sont guère reçus ailleurs. Votre maison est le refuge ordinaire de tous les fainéants de la cour, Molière, Critique, 1.

  • 2 Fig. Appui, soutien, en parlant des personnes qui servent de refuge. Tous nos maux en ce monarque Ont leur refuge et leur secours, Malherbe, II, 4. Ce lion ayant été contraint pour quelques raisons d'État de sortir de Libye avec toute sa famille… je crois que vous ne trouverez pas indigne de vous d'être le refuge des lions affligés, Voiture, Lett. 41. Dieu est notre refuge et notre force, Sacy, Bible, Psaumes, XLV, 2. Promettez… Que, sévère aux méchants et des bons le refuge, Entre le pauvre et vous, vous prendrez Dieu pour juge, Racine, Athal. IV, 3.

    Il se dit aussi des choses. N'a-t-on point de présent à faire, Point de pourpre à donner, c'est en vain qu'on espère Quelque refuge aux lois…, La Fontaine, Fabl. XI, 7. La reine voulait que les rebelles trouvassent leur refuge dans sa parole, Bossuet, Reine d'Angl.

  • 3 Fig. Prétexte pour s'excuser, raison apparente dont on cherche à se couvrir. On l'a poursuivi dans tous ses refuges. Vous voulez dire que la cour ne se connaît pas à ces choses ; et c'est le refuge ordinaire de vous autres messieurs les auteurs, Molière, Critique, sc. 7. C'était le dernier refuge des manichéens, Bossuet, Nouv. myst. 16.
  • 4Maison de refuge ou, simplement, refuge, maison d'asile pour les indigents, ou de correction pour des femmes qu'on veut retirer du désordre. Je me trouve fort offensée de la proposition de ce milieu entre le monde et le refuge, Maintenon, Lett. à Mme de Villette, 13 août 1708.
  • 5Ordre du refuge, ordre de religieuses fondé à Nancy en 1617 et établi pour la retraite des femmes et des filles dérangées.
  • 6Chez les Hébreux, refuges ou villes de refuge, villes où se retiraient ceux qui avaient commis un meurtre involontaire.

HISTORIQUE

XIIe s. E faiz est li sires refuges al povre, Liber psalm. p. 9. Pur ceo vos requerum merci, De defendement suffraitus, Et de refuge besoignus, Benoit de Sainte-Maure, II, 293. Ne il ne poent contre lui Aver defense ne refui, Grégoire le Grand, p. 60. Pur ço est France franche, par les sainz ù je fui, Que cil ki mestier unt i viengent à refui, Th. le mart. 54. Il est mis escudz [mon bouclier] e ma salveted ; il me eslieved, e il est mun refui, Rois, p. 205.

XIIIe s. Sont en terre establi li juge Por estre deffense et refuge à cel cui li monde forfet, la Rose, 5486.

XIVe s. Il cuident et tienent que en tel cas le seul et singulier refuge c'est à ses amis, Oresme, Eth. 229.

XVe s. Il connoissoit bien les adreces et les refuges du pays, comme celuy qui en estoit, Froissart, liv. I, p. 91. Au fort, puisqu'en ce point je suy, Je porterai ma grant penance, Ayant vers loyauté refui, Où j'ay mis toute ma fiance, Orléans, Ball. 17.

XVIe s. Il fut contraint de se retirer pour son dernier refuge par devers luy, Amyot, Marius, 14.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. refug, refuy, refuch, refut ; espagn. refugio ; ital. rifugio ; du lat. refugium, de refugere (voy. REFUIR). On remarquera les deux formes refui et refuge.