« scabreux », définition dans le dictionnaire Littré

scabreux

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

scabreux, euse

(skâ-breû, breû-z') adj.
  • 1Sur quoi il est difficile de cheminer à cause des aspérités. Je viens de voir les Hanovriens et les Hessois en ordre de bataille [à Bruxelles]… on disait qu'ils allaient à Dunkerque ; le chemin est un peu scabreux, quoiqu'il paraisse assez beau, Voltaire, Lett. au roi de Pr. novembre 1742. Mon génie est vaincu : voyez ce mercenaire Qui, marchant à pas lourds dans un sentier scabreux, Tombe sous son fardeau, Gilbert, le Poëte malheureux. Nous arrivâmes par un chemin étroit et scabreux à Bethléem, Chateaubriand, Itin. part. III.
  • 2 Fig. Rude et raboteux, en parlant d'un auteur. Quintilien sera-t-il plus excusable de n'être pas éloquent en donnant des préceptes d'éloquence… que Sénèque d'être laconique et scabreux en philosophant ? Diderot, Claude et Nér. II, 103.
  • 3 Fig. Qui a des difficultés, du péril, qui embarrasse. Il est trop scabreux de se mêler de vos affaires, à vous autres grands ; et je ne veux point me brouiller avec les puissances, Dancourt, les Fées, I, 2. Cette épître à Horace n'est pas finie ; elle est d'ailleurs fort scabreuse, et elle demanderait un secret bien plus profond que le souper des Lois de Minos, Voltaire, Lett. Mme du Deffant, 23 oct. 1772. Il [l'enfant] me fera peut-être, au dépourvu, des questions scabreuses, Rousseau, Ém. III. Plusieurs libraires auraient envie d'imprimer le Pamphlet des pamphlets par P. L. Courier ; mais aucun n'ose s'en charger ; les uns refusent, d'autres promettent ou même commencent et n'achèvent pas, tant l'entreprise leur paraît hardie, périlleuse, scabreuse, Courier, Collect. de lettres et articles. Si ta fille était assez folle pour épouser un drôle de cette espèce, ce que tu aurais de mieux à faire serait de mettre ton bien à fonds perdu, à moins que tu ne te sentes assez vert pour tâter une seconde fois du mariage, ce qui est diablement scabreux à notre âge, Ch. de Bernard, la Peau de lion, § XI.

    Difficile à dire ou à traiter décemment. Ce conte est bien scabreux. On prétend qu'Euripide composa une tragédie de Pasiphaé… le sujet était un peu scabreux, Voltaire, Lois de Minos, notes.

HISTORIQUE

XVIe s. Armez-vous d'armeures scabreuses, Chargez vos fleches et vos dars, Rec. de farces, p. 339. Comme les mouches qui ne peuvent tenir contre un corps bien poly et bien lissé, et s'attachent et reposent aux lieux scabreux et raboteux, Montaigne, III, 312. Sa queste [de la vertu] est scabreuse et laborieuse, Montaigne, I, 70. Ayant estudié de le rendre le plus clair qu'il m'a esté possible, en si profonde obscurité bien souvent, et si scabreuse et raboteuse asperité presque par tout, Amyot, Moral. Épître, p. 16. En la premiere instruction des mulets et mules, il est necessaire d'avoir un gouverneur patient, afin que, par moien, il range à la raison ces bestes scabreuses, De Serres, 314. Les affaires divins et humains, desquelz nous avons traicté et disputé… si soubtilement que nous avons esté pour ce reputez, par aventure, difficiles et scabreux, Bonivard, Advis et devis des langues, p. 58.

ÉTYMOLOGIE

Lat. scabrosus, dérivé de scaber, raboteux, galeux, de scabere, gratter ; comparez l'allem. schaben, island. scafa, gratter.