« soeur », définition dans le dictionnaire Littré

soeur

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

sœur

(seur) s. f.
  • 1Fille née du même père et de la même mère qu'une autre personne, ou née de l'un des deux seulement. Les habitants de ce pays-là lui demandant [à Isaac] qui était Rébecca, il leur répondit : c'est ma sœur, Sacy, Bible, Genèse, XXVI, 7. Jamais sœurs ne furent unies par des liens ni si doux ni si puissants, Bossuet, Anne de Gonz. La princesse Palatine s'ôta tout pour soulager une sœur qui ne l'aimait pas, Bossuet, ib. Elle vous plaint, vous voit avec des yeux de sœur, Racine, Iph. II, 1.

    Fig. Être sœur, avoir en commun quelque chose. Nous nous voyons sœurs d'infortune, Molière, Psyché, I, 1.

    Sœur de père et de mère, ou sœur germaine, celle qui est née de même père et de même mère qu'une autre personne.

    Sœur de père ou sœur consanguine, celle qui n'est sœur que du côté paternel.

    Sœur de mère ou sœur utérine, celle qui n'est sœur que du côté maternel.

    Les expressions sœur germaine, sœur consanguine et sœur utérine ne s'emploient guère qu'en jurisprudence.

    Demi-sœur, celle qui n'est sœur que du côté paternel ou du côté maternel.

    Sœur naturelle ou sœur bâtarde, celle qui est née de même père ou de même mère, mais hors du mariage.

    Belle-sœur, voy. ce mot à son rang alphabétique.

    Sœur de lait, fille qui a eu la même nourrice qu'une autre personne. J'ai l'honneur d'être le fils du père nourricier de madame de… (il me nomma la femme du ministre) ; ainsi elle est ma sœur de lait, rien que cela, Marivaux, Marianne, 6e part.

    Se dit des animaux. Ma chienne est la sœur de la vôtre.

  • 2 Poétiquement. Les neuf Sœurs, les Muses. Dieu ne fit la sagesse Pour les cerveaux qui hantent les noeuf Sœurs, La Fontaine, Clochette. Quelle verve indiscrète Sans l'aveu des neuf Sœurs vous a rendu poëte ? Boileau, Sat. IX.

    Les sœurs filandières, les Parques (voy. FILANDIÈRE).

  • 3Nom qui fut longtemps donné aux chrétiennes par tous les membres de la chrétienté.

    Sœur en Jésus-Christ, se dit des femmes chrétiennes par rapport au Père qui est au ciel.

  • 4Titre que les rois de la chrétienté donnent aux reines en leur écrivant.
  • 5Il se dit, dans le langage élevé, de filles, de femmes qui vivent ensemble, sans être unies par les liens du sang. Que vous semble, mes sœurs, de l'état où nous sommes ? Racine, Esth. II, 9.

    Nom que les religieuses qui ne sont point en charge ou qui n'ont point atteint un certain âge, prennent dans les actes publics, se donnent entre elles, et qu'on leur donne en leur parlant ou en parlant d'elles. La sœur Thérèse. Sœur Marie de l'Incarnation. Vous m'étonnez de Pauline ; ah ! ma fille, gardez-la auprès de vous ; ne croyez point qu'un couvent puisse redresser une éducation ni sur le sujet de la religion que nos sœurs ne savent guère, ni sur les autres choses, Sévigné, 510.

    Sœur colette ou collette, religieuse de l'ordre de Sainte-Claire.

    Fig. et familièrement. Faire la sœur collette, faire la sucrée, avoir des manières, un langage affecté. Nous rîmes fort de ses manières passées ; nous les tournâmes en ridicule ; elle n'a point le style des sœurs colettes ; elle parle fort sincèrement et fort agréablement de son état, Sévigné, 183.

    Sœurs laies, et, plus ordinairement, sœurs converses, les religieuses qui ne sont pas du chœur, qui ne sont employées qu'aux œuvres serviles du monastère.

    Sœur écoute, religieuse désignée pour accompagner une autre religieuse ou une pensionnaire qui va au parloir.

  • 6Nom donné à certaines filles qui vivent en communauté sans être religieuses. Je vois que votre mal de gorge est opiniâtre ; mais je vous avertis qu'il est rare qu'un médecin guérisse ses malades à cent lieues, et qu'une sœur de la Charité fait plus de bien de près qu'Esculape de loin, Voltaire, Lett. Damilaville, 18 mai 1765. Je ne vois plus ces sœurs dont les soins délicats Apaisaient la souffrance, ou charmaient le trépas, Delille, Pit. II.

    Sœurs grises, nom qu'on a donné quelquefois aux sœurs hospitalières du tiers ordre de Saint-François. La sœur grise court administrer l'indigent dans sa chaumière, Chateaubriand, Génie, IV, III, 6.

    Sœurs du pot, filles qui vivent en communauté et qui soignent les malades.

    Fig. Mme la duchesse d'Aiguillon, la sœur du pot des philosophes, Voltaire, Lett. Thiriot, 27 févr. 1755.

  • 7 Fig. Il se dit de choses assez liées ensemble pour qu'on les assimile à des sœurs. Socrate… n'aura pas voulu s'échapper de la prison contre l'autorité de ces lois [d'Athènes], de peur de tomber après cette vie entre les mains des lois éternelles, lorsqu'elles prendront la défense des lois civiles, leurs sœurs ; car c'est ainsi qu'il parlait, Bossuet, 5e avert. 23. Oui, la sagesse aimable est sœur de la santé, Elle seule connaît le secret qu'on ignore D'assurer l'immortalité, Bernis, Épît. 12.
  • 8 Fig. Il se dit de choses (du genre féminin) qui se répètent. Cette nuit eut des sœurs et même en très bon nombre, La Fontaine, Petit chien. Comme Charès, capitaine des Athéniens, après un grand avantage… écrivit au peuple d'Athènes qu'il avait remporté une victoire qu'on pouvait appeler la sœur germaine de celle de Marathon, Dacier, Plutarque, Aratus. Un démon qui m'inspire Veut qu'encore une utile et dernière satire Se vienne en nombre pair joindre à ses onze sœurs, Boileau, Sat. XI.
  • 9 Le bouillon des deux sœurs, un lavement, Saumaize, Dict. des Préc. t. II, p. 51.

    Dans le Berry, tomber sur ses deux sœurs, tomber sur son séant.

HISTORIQUE

XIIe s. Se puis veïr ma gente sorur Alde…, Ch. de Rol. CXXVIII.

XIIIe s. A l'entrée de quaresme… se croisa li quens Bauduins de Flandre et de Haynaut, à Bruges, et la comtesse Marie sa feme, qui suer estoit au conte Thiebaut de Champaigne, Villehardouin, VI. De là s'en ala-il vers le roi Phelipe d'Alemaigne qui sa serour avoit à fame, Villehardouin, XLII. [Simon a dit à sa femme :] Bele suer, où est Berte, pour sainte charité ? Berte, CXXV. Li baron li disent que Henris li quens de Champagne, qui moult estoit larges, avoit une fille biele et gente, qui avoit non Aelis, et estoit suer germaine l'arcevesque Guillaume-blance-main, Chr. de Rains, p. 9. Tombiele et ses deux sereurs, Bibl. des chart. 2e série, t. 3, p. 423. L'aventure des dameiseles qui esteient serur gemeles, Marie de France, Frêne.

XIVe s. Se nous ou notre hoir marions l'une de nos seurs, Du Cange, auxilium.

XVe s. De ce messire Edouard de Guerles ne demoura nuls enfans ; mais de serour germaine… avoit des enfans, Froissart, II, III, 92.

XVIe s. Thibaut, qui ouyt ces mots, estimant qu'on parloit de sa femme, qui puet-estre aimoit l'amble comme estant de nos sœurs [femme galante], Moyen de parvenir, p. 127, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Bourg. soeu ; provenç. sor, seror ; espagn. sor ; portug. sor, sorore ; ital. sorore ; du lat. sororem ; comparez l'allem. Schwester ; angl. sister ; goth. swista ; sanscrit, svasri. Dans l'ancien français, suer (prononcez sœur) est le nominatif, du lat. sóror, avec l'accent sur so ; seror est le régime, de sorórem avec l'accent sur  ; contre l'habitude, c'est le nominatif, et non le régime, qui est resté dans la langue moderne.