« sous », définition dans le dictionnaire Littré

sous

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

sous

(sou ; l's se lie : sou-z un abri) prép.
  • 1Il marque la situation d'une chose à l'égard d'une autre qui est par-dessus. Sous le toit. Passer sous les fenêtres de quelqu'un. Mettre un oreiller sous sa tête. Sous le ciel. Vaubrun a eu quatre chevaux de blessés sous lui, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 186. Ils brûlaient de l'encens sur les collines, aussi bien que sous les chênes, sous les peupliers et sous les térébinthes, Sacy, Bible, Osée, IV, 13. Le fleuve Bétis coule dans un pays fertile, et sous un ciel doux qui est toujours serein, Fénelon, Tél. VIII. Les sarigues… portent leurs petits dans une poche sous le ventre, Buffon, Quadrup. t. XI, p. 25. L'Araxe au loin mugit sous un pont qui l'outrage, Delille, Én. VIII.

    Tenir quelqu'un sous le bras, avoir le bras passé au bras de quelqu'un. Candide aperçut un jeune théatin dans la place Saint-Marc, qui tenait sous le bras une jeune fille, Voltaire, Candide, 24.

    Regarder quelqu'un sous le nez, le regarder de près avec mépris.

    Sous la cheminée, voy. CHEMINÉE.

    Par menace. Je le ferai mourir sous le bâton, je l'assommerai de coups de bâton.

    On dit de même : faire périr sous, pour indiquer le genre de supplice. Pour avoir fait périr tous les habitants de quelques autres villages sous des scies, sous des herses de fer, sous des cognées de fer, Voltaire, Dict. phil. Philosophe.

    Terme de manége. Ce cheval est sous lui, ce cheval a les quatre extrémités rapprochées sous le ventre.

  • 2 Terme de marine. Être sous voiles, avoir toutes les voiles déployées.

    Sous le vent, se dit du côté opposé à celui d'où le vent souffle.

    Cette île nous restait sous le vent, nous étions dans une position telle, que le vent nous atteignait avant d'atteindre cette île.

    Les manœuvres qui sont sous le vent, les manœuvres du bord opposé à celui qui reçoit le vent.

    Être sous l'écoute d'un bâtiment, en être sous le vent et très près.

    On est sous la côte, lorsqu'on en est très près.

  • 3Il sert à marquer la situation de deux choses, dont l'une est plus élevée que l'autre. Du roi sous les remparts il trouvera l'escorte, Voltaire, Adél. du Guesclin. IV, 1.

    Camper, se retirer sous une ville, sous le canon d'une ville, camper, se retirer auprès d'une ville dont on est le maître et qui peut servir d'appui contre ceux qui viendraient attaquer le camp. Le Quesnoy, sous lequel on croit que nous camperons demain, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 248. Artabaze était d'avis qu'on ne hasardât point de bataille, mais qu'on se retirât sous les murs de Thèbes, où l'on aurait soin d'amasser des vivres et des fourrages, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. III, p. 260, dans POUGENS. On forma à la hâte, sous le canon de la place, des retranchements de troncs d'arbres couchés les uns sur les autres, Raynal, Hist. phil. XVI, 21.

    Être sous le feu d'un bastion, d'un bataillon, être exposé au feu d'un bataillon, d'un bastion.

    Sous le fusil, à petite portée du fusil du chasseur. Les jeunes ont une petite voix courte et plaintive… ce son est aisé à imiter ; et la mère, trompée par l'appeau, arrive jusque sous le fusil du chasseur, Buffon, Quadrup. t. II, p. 90.

    Ce cheval est sous la main du cocher, ou, simplement, sous la main, se dit d'un cheval de car rosse qui est à la droite du timon.

    Il se dit, dans le même sens, de la situation de deux lieux. La Ferté-sous-Jouarre. Le signor Annibal me mena dans une maison qui est sous Volterre, qui s'appelle l'hospitalità, et qui est bâtie sur le champ où Catilina fut tué, Retz, Mém. t. IV, liv. v, p. 6, dans POUGENS.

    Cela s'est passé sous mes yeux, j'en ai été témoin oculaire.

    Mettre une chose sous les yeux de quelqu'un, la lui présenter pour qu'il l'examine, en décide.

    Il a fait élever cet enfant sous ses yeux, il l'a fait élever dans sa maison, près de lui.

    Avoir quelque chose sous la main, l'avoir à sa portée.

  • 4Il se dit de ce qui couvre, enveloppe. Reconnaître une femme sous le masque. Quoique nous y soyons seules [dans un logis], il nous y fait vivre sous le voile, Montesquieu, Lett. pers. 156.

    Un cheval sous poil noir, sous poil gris, un cheval de poil noir, de poil gris.

    Fig. Sous cape, voy. CAPE.

    Être sous les armes, se dit des soldats rangés en haie ou en bataille avec leurs armes. À son arrivée, le régiment se mit sous les armes (voy. ARMES).

    Fig. Sous les armes, en guerre. Il vit ses progrès arrêtés par la révolution qui délivra le Portugal de l'Espagne, mais en tenant pendant dix-huit ans les deux peuples sous les armes, Raynal, Hist. phil. IX, 28.

    Fig. Être sous les armes, se dit quelquefois d'une femme, d'une fille qui est parée à son avantage et avec dessein de plaire.

    Sous les drapeaux, voy. DRAPEAU.

    Servir, combattre sous les drapeaux, sous les enseignes d'un prince, être engagé, servir dans les troupes d'un prince.

    Terme de marine. Sous pavillon, en portant le pavillon de. Naviguer sous pavillon français, sous pavillon anglais, sous pavillon neutre.

  • 5Il se dit de ce qui sert à enfermer, à sceller. La maîtresse de maison a une poche remplie de clefs différentes ; elle tient sous le pêne le vin, le sucre, l'eau-de-vie, les macarons, l'huile et les confitures, Mercier, Tabl. de Par. 225.

    Être sous clef, sous la clef, être dans un lieu fermé à clef (voy. CLEF).

    Être sous les verrous, être en prison.

    Ce papier est sous les scellés, il est dans un meuble, dans une chambre où l'on a mis le scellé.

    Cette pièce est inventoriée sous la cote A, sous la cote B, etc., elle est marquée de la lettre A, de la lettre B, et est énoncée dans l'inventaire avec cette cote.

    Être inscrit sous tel numéro, avoir tel numéro d'inscription.

    Fig. Dire une chose sous le secret, sous le sceau du secret, sous le sceau de la confession, la dire en grande confidence et en exigeant le secret.

  • 6 Fig. Il marque la subordination, la dépendance. Ces religieux vivaient sous la règle de saint Benoît. Cela est compris sous la même règle. Il est sous la tutelle de son oncle. Il a tant d'hommes sous son commandement. Je vous ai vu combattre et commander sous moi, Corneille, Cid, I, 6. Quoi donc ! pécherons-nous, parce que nous ne sommes plus sous la loi, mais sous la grâce ? Sacy, Bible, St Paul, Ép. aux Rom. VI, 15. Depuis cette défaite [des barbares], les troupes se crurent invincibles sous Théodose, Fléchier, Hist. de Théodose, II, 64. Sous quel astre cruel avez-vous mis au jour Le malheureux objet d'une si tendre amour ? Racine, Iphig. v, 3. Quand on est né avec ce génie borné au détail, on n'est propre qu'à exécuter sous autrui, Fénelon, Télém. XXII. Nous étions sous la servitude et la malédiction ; et il [Jésus] vient rompre nos chaînes et nous mettre en liberté, Massillon, Pet. carême, Grandeur de J. C. Les plus jolies filles de Poitou la consultent comme un oracle, parce qu'elle a fait ses études sous une coquette de Paris, Regnard, Attendez-moi sous l'orme, sc. 1. Les Tartares ont conquis deux fois la Chine, et ils la tiennent encore sous leur obéissance, Montesquieu, Lett. pers. 81. Des ministres qui régnaient sous eux ou sur eux [certains princes], Voltaire, Pol. et lég. Fragm. sur l'Inde, 9. Rien n'effacera dans mon cœur la mémoire du P. Porée, qui est également chère à tous ceux qui ont étudié sous lui, Voltaire, Mél. litt. au P. de la Tour.

    Par plaisanterie, une soubrette dit à une dame : sous moi, pour signifier pendant que je suis à votre service. Je suis fille d'honneur ; je ne veux point qu'on dise Que vous ayez sous moi fait pareille sottise, Regnard, le Joueur, v, 1.

    Être sous la protection de quelqu'un, en être protégé. Que chaque peuple marche sous la protection de son dieu : mais, pour nous, nous marcherons sous la protection du Seigneur notre Dieu, Sacy, Bible, Michée, IV, 5.

    On dit de même : se mettre sous la protection de quelqu'un, prendre quelqu'un pour son protecteur.

    Fig. Être sous la main d'un autre, être dans sa dépendance, à son entière disposition. Retournez à votre maîtresse, et humiliez-vous sous sa main, Sacy, Bible, Genèse, XVI, 9.

    On dit à peu près dans le même sens : être sous la férule de quelqu'un.

    Sous convoi, en termes de marine, avec la protection d'un convoi. Avec le temps, ils insultèrent le pavillon des Européens, qui se virent réduits à ne plus naviguer que sous convoi, Raynal, Hist. phil. III, 18.

  • 7Il se dit du lien qu'impose le mariage. Et j'aime mieux la voir sous un autre hyménée Que si contre son gré sa main m'était donnée, Molière, Éc. des mar. I, 2. La fille qu'autrefois, de l'aimable Angélique, Sous des liens secrets, eut le seigneur Enrique ? Molière, Éc. des f. v, 9.
  • 8Il se joint à beaucoup de mots pour en former d'autres qui marquent une infériorité de position, de qualité, d'attributions. Sous-bibliothécaire, sous-doyen, etc. (voy. les mots de ce genre à leur rang alphabétique).
  • 9Dans le langage de la botanique, il équivaut à presque : sous-orbiculé.

    Il tient quelquefois lieu de légèrement : sous-bifide.

  • 10Il marque le temps durant lequel un homme a vécu, l'intervalle pendant lequel un événement est arrivé, etc. Sous la république. Sous l'empire. Sous la restauration. Ce fait est arrivé sous tel consul. À quoi sert-il à un peuple que son roi subjugue d'autres nations, si on est malheureux sous son règne ? Fénelon, Tél. v. Sous la régence on fut dispensé de l'hypocrisie, Duclos, Œuv. t. VIII, p. 45.

    Sous peu, sous peu de temps, dans peu de temps.

    On dit de même : sous quinze jours, sous quinzaine, etc., dans quinze jours, dans une quinzaine. En pensant qu'il retournerait sous deux jours dans sa chaumière, Genlis, Veillées du château t. 1, p. 145, dans POUGENS.

  • 11 Fig. Il se dit d'une forme, d'une apparence qui couvre, ou qui cache. Les uns disaient : est-ce quelque divinité sous une figure humaine ? Fénelon, Tél. VI. Le quartz, les jaspes et les micas doivent se rencontrer dans les laves, sous leur forme propre ou peu altérée, Buffon, Min. t. II, p. 71. Saint-Contest, qui, sous un extérieur simple et grossier, était l'homme le plus fin, le courtisan le plus adroit, Duclos, Œuv. t. v, p. 329. C'est un ange en effet sous les traits d'une femme, Delille, Parad. perdu, IX.

    Sous un jour, sous un aspect, avec une certaine apparence. On a représenté sa conduite sous un mauvais jour. C'est sous cet odieux aspect qu'ont toujours été regardés les fermiers des taxes, Raynal, Hist. phil. XIX, 10.

  • 12 Fig. En se couvrant de. Anselme, instruit de l'artifice, M'a repris maintenant tout ce qu'il nous prêtait, Sous couleur de changer de l'or que l'on doutait, Molière, l'Ét. II, 7. Pour cet Arménien, ce marchand déguisé, Introduit sous l'appât d'un conte supposé, Molière, ib. IV, 7. Quoi ! sous un beau semblant de ferveur si touchante Cacher un cœur si double, une âme si méchante ! Molière, Tart. v, 1. Ne prétendez pas vous sauver sous cette imposture, Molière, l'Avare, v, 5. Vous n'aviez sous mon nom travaillé que pour vous, Racine, Brit. IV, 2. Il voulut donc sous un prétexte heureux ôter lui-même à ce couple sensible L'occasion qu'il redoutait pour eux, Malfilâtre, Narcisse, II.

    Sous le prétexte de, sous le voile de la charité, en se servant du prétexte, du voile de la charité.

  • 13Sous tel nom, sous tel titre, avec tel nom, avec tel titre. Il se présenta sous un faux nom. Il a publié un recueil sous le titre de Mélanges littéraires. Cela est connu sous telle dénomination. Un écrit scandaleux sous votre nom se donne, Boileau, Épît. VI. Rien n'est plus commun aujourd'hui que de jeunes auteurs ignorés, qui mettent, sous des noms connus, des ouvrages peu dignes de l'être, Voltaire, Facéties, Diatr. Akakia.

    Plaider sous le nom de quelqu'un, se servir de son nom pour plaider.

  • 14Moyennant, par, avec. Sous telle et telle condition. Là, nous n'avons rien su que de la renommée, Qui, par un bruit confus diversement semée, N'a porté jusqu'à nous ces grands renversements Que sous l'obscurité de cent déguisements, Corneille, Rodog. I, 1. Il [un cardinal] lui a résigné [à un tiers] l'archevêché de Ravenne, sous une pension presque aussi grande que le revenu, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 429. Sous promesse de bien traiter Les députés, eux et leur suite, La Fontaine, Fabl. VI, 14. Je fis voir que lâcher ce qu'on a dans la main, Sous espoir de grosse aventure, Est imprudence toute pure, La Fontaine, ib. 10. Enfin je l'ai fait fuir, et, sous ce traitement, De beaucoup d'actions il a reçu la peine, Molière, Amph. I, 2. Je suis toute réjouie que vous soyez en état de vous faire peindre, et que vous conserviez sous votre négligence une beauté si merveilleuse, Sévigné, 127. On se hasarde [pour aller se promener] sous l'espérance de la Saint-Jean, on prend le moment d'entre deux nuages, Sévigné, 21 juin 1680.

    Passer quelque chose sous silence, n'en point parler.

    Affirmer sous serment, faire un serment pour attester la vérité de quelque chose.

    Faire un acte, une promesse sous seing privé, reconnaître cet acte, cette promesse par sa simple signature, non authentique et sans l'intervention de notaire.

    Sous caution, en fournissant caution.

    Sous bénéfice d'inventaire (voy. BÉNÉFICE, n° 1).

  • 15Cela est défendu sous peine de la vie, sous peine de bannissement, sous peine d'amende, on encourra la peine de mort, le bannissement, une amende.

    Cela est ordonné sous peine de désobéissance, on encourra les peines attachées à la désobéissance si on ne fait pas telle chose.

  • 16Sous ce rapport, voy. RAPPORT, Rem.
  • 17Sous main, loc. adv. Secrètement. Il cherche à vous nuire sous main.

    Substantivement. J'étais très assuré que Longueil ne m'épargnerait pas par ses sous main, Retz, III, 200.

REMARQUE

On dit : L'armée demeura toute la nuit sur les armes, et demeura toute la nuit sous les armes ; tous deux sont bons et également usités pour dire que l'armée fut toute la nuit en armes, VAUGEL. Rem. t. II, p. 669, dans POUGENS. En ce sens, on ne dit plus que : sous les armes.

HISTORIQUE

Xe s. Cel edre [ce lierre] sost que cil sedebat, Fragm. de Valenc. p. 468.

XIe s. Alez en est en un verger suz l'umbre, Ch. de Rol. II.

XIIe s. Il fait creuser soz terre à pic et à martel, Sax. IX.

XIIIe s. Tant comme aucun est en servage, il est soz main, Liv. de jost. 2.

XVe s. Basle et Strasbourg et autres villes imperialles qui sont soubz le bout de ceste riviere du Rhin, Commines, v, 1.

XVIe s. Ayant perdu une bataille soubs [par] A. Varus, Montaigne, I, 23. Soubs nostre protection, Montaigne, I, 30. Soubs la foy et asseurance de…, Montaigne, I, 30. Soubs quelque pretexte, Montaigne, I, 59. Les loix soubs lesquelles il estoit nay, Montaigne, I, 221. C'estoient gens qui vivoient soubs autre forme de gouvernement, Amyot, Ép. Defendre le public, soubs lequel la vie, l'honneur et le bien de chaque particulier sont compris, Amyot, ib. Il leur ottroya la paix, soubz condition que…, Amyot, Thésée, 18. Ilz gardoient leurs femmes enfermées soubs la clef, Amyot, Lyc. 30. Le mois de janvier sous Romulus estoit l'unzieme, Amyot, Numa, 31. Les contraignant de partir, soubs grosses peines à qui desobeiroit, Amyot, Cor. 18. Porus respondit de rechef, que le tout se comprenoi soubs ce mot royalement, Amyot, Alex. 103. L'os de l'esperon ou petit focile s'insere et s'appuye sous l'apophyse interne de la jambe, ne touchant en rien l'articulation d'icelle avec la cuisse, ains luy servant seulement d'un sous-appuy, Paré, IV, 36.

ÉTYMOLOGIE

Berry, sos, sour ; bourguig. zo, so ; wallon, so ; provenç. et catal. sotz ; ital. sotto ; valaque, subt ; du lat. subtus, dérivé de sub, grec, ὑπὸ, sanscr. upa, qui signifie également infériorité et supériorité.