« trotter », définition dans le dictionnaire Littré

trotter

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

trotter

(tro-té) v. n.
  • 1Aller le trot. Ce cheval trotte bien.

    Trotter des épaules, se dit d'un cheval qui trotte pesamment.

    Trotter menu, se dit d'un cheval qui avance peu.

    Trotter se dit aussi du cavalier qui est sur un cheval qui trotte. Les deux pieds suspendus sur son double étrier, Assise de côté, l'une trotte à l'anglaise ; L'autre va sautillant sur la selle française, Delille, Trois règ. III.

  • 2 Par extension, marcher beaucoup à pied. Ce ne sont pas toujours les pardons [cérémonies d'église] qui font aller les femmes : c'est l'envie de trotter ; voilà pourquoi on dit plaisamment que saint Trottet, saint Caquet et saint Babil sont les plus grands patrons de ce sexe dévot, Patin, Lett. t. I, p. 384, dans POUGENS. J'avais franchi les monts qui bornent cet État, Et trottais comme un jeune rat Qui cherche à se donner carrière, La Fontaine, Fabl. VI, 5. Il gèle à pierre fendre ; je suis tout le jour à trotter dans ces bois, Sévigné, 99. Ils [les jeunes gens qui entrent dans le service militaire] vont trottant des bords de la Charente, Voltaire, Pauvre diable. Rencontrez-vous une de ces jolies personnes qui vont trottant menu les yeux baissés, coudes en arrière et tortillant un peu des hanches…, Beaumarchais, Mar. de Figaro, III, 5.

    On entendrait une souris trotter, il ne se fait pas le moindre bruit.

  • 3 Fig. Faire bien des courses. bien des démarches pour quelque affaire. Garçon bien fait… Et qui faisait les servantes trotter, La Fontaine, Gag. Quand je veux tirer de mes parents quelque service, je fais mon testament, et aussitôt ils trottent, Courier, Lett. I, 207.
  • 4 Fig. Il se dit de choses qui vont et viennent. Pour un âne enlevé deux voleurs se battaient… Tandis que coups de poing trottaient…, La Fontaine, Fabl. I, 13. Puis tout d'un coup, comme je pensais lui répondre [à Mme de Ludres], je trouvai qu'elle ne m'écoutait plus, et que ses beaux yeux trottaient par la chambre, Sévigné, 1er avr. 1671. M. le chevalier [de Grignan]… s'en retourna avec cette douleur qui trotte justement sur le pied, Sévigné, 5 nov. 1688. Vers la fin du repas, il vit trotter les santés à la ronde, Hamilton, Gram. 4. Bientôt lettres et présents trottèrent, Hamilton, ib. 6. Il n'y a pas de jours que les billets ne trottent ; c'est moi qui suis le courrier, Lamotte, Minutolo, sc. 10. Tu tiendras tes yeux baissés, au lieu de les laisser trotter comme tu fais toujours, Th. Leclercq, Prov. t. III, p. 175, dans POUGENS.
  • 5 Fig. Se dit de ce qui passe par la plume, par l'esprit, par l'imagination. Ceci est un billet écrit à course de plume, la mienne est bien en train de trotter, Sévigné, 388. Il faut un peu, entre bons amis, laisser trotter les plumes comme elles veulent, Sévigné, 24 nov. 1675. Il y a trois ans que cet amour-là lui trotte dans la cervelle, Dancourt, Mari retrouvé, sc. 5. Je n'aime plus cette Margot : seulement quelquefois son petit nez me trotte encore dans la tête, Marivaux, Surp. de l'amour, I, 2. Son imagination, qui ne cesse de trotter, Caraccioli, Lett. récréat. t. I, p. 131, dans POUGENS.

    Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.

  • 6 V. a. Trotter un cheval à la longe, à la plate-longe, Dict. de l'Acad. au mot longe.

    PROVERBE

    Qui ne peut galoper, qu'il trotte.

REMARQUE

Les verbes qui ont un radical terminé par ot ne prennent généralement qu'un seul t ; on ne voit pas d'où vient l'exception pour trotter.

HISTORIQUE

XIIIe s. Li vilains, qui estoit asis En la sele sor le cheval, Le fet troter parmi un val, Ren. 16370. Molt estoient en grief torment, Et trotoient si durement, Qu'il n'a el mont sage ne sot Qui peüst soffrir si dur trot, Lai du trot.

XVe s. Vous devenez vieulx, Et tousjours troter Voulez, sans cesser ; Ne soyez plus tieulx [tel], Orléans, Rondel. Au barbier qui la barbe oste, Qui ma barbe osta, Et à la mode qui trotte, Qui me la coupa…, Basselin, V.

XVIe s. Par les meilleures maisons trotoit le Catholicon, duquel nous avons parlé, D'Aubigné, Hist. III, 329.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. espagn. et portug. trotar ; ital. trottare ; gaél. trot ; kimry, trotio. Saumaise pense que l'expression latine ire tolutim, trotter, qui avait donné tolutarius, trotteur, a pu donner tolutare, dont les langues romanes ont fait trotter. Cette explication très plausible est adoptée.