« ogive », définition dans le dictionnaire Littré

ogive

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ogive

(o-ji-v') s. f.
  • 1 Terme d'architecture. Dans l'architecture gothique, nom donné à ces courbures saillantes qu'on appelle nervures, qui, dans les travées ou croisées des voûtes, se croisent diagonalement au sommet, en allant d'un angle à l'autre, et produisent dans les voûtes ces compartiments angulaires qu'on y remarque, Quatremère de Quincy, Dict. d'arch. L'arc brisé appelé ogive a été d'abord une importation d'Orient ; adopté en France, il est devenu le point de départ de tout un système de construction, au milieu du XIIe siècle, dans les provinces du nord de la Loire. Les voûtes d'ogive, autrement à la gothique ou modernes, se peuvent faire…, Derand, l'Architecture des voûtes, ch. 3. Elles [les moulures de l'architecture gothique] suivent le contour des parties soit en montant dans les piliers, soit en circulant dans les arcs, doubleaux et croisées d'ogives, Journal œconomique, mars 1752, p. 68. Le lierre… tapisse de verts manteaux Les longues ogives moulées, Lamartine, Ép. à V. Hugo.

    On dit aussi voûte, arcade, croisée, en ogive. La vieille femme, par manière de remerciement, ouvrit une petite croisée en ogive à vitraux colorés, Ch. de Bernard, Un homme sérieux, § XVIII.

  • 2Ogive s'emploie adjectivement pour les deux genres, et signifie en forme d'ogive. Arc ogive. Voûte ogive. Fenêtre ogive.

REMARQUE

On le trouve écrit quelquefois augive. La voûte du chœur est sans augives, à huit feuillages, d'un goût qui ne se voit point ailleurs, Lebœuf, Hist. du dioc. de Paris, t. XIV, p. 71. En général, toutes les cimes élevées que l'on peut distinguer dans cette chaîne depuis le Mont-Blanc jusqu'au col Fenet, sont soutenues par des augives composées d'une ou de plusieurs suites de feuillets pyramidaux appuyés les uns contre les autres, Saussure, Voy. Alpes, t. IV, p. 40, dans POUGENS.

HISTORIQUE

XIVe s. La dicte chapelle est volue [voûtée] de trois croisiées d'ogive, Compte de la construction d'une chapelle chez les célestins de la forêt de Compiègne, dans l'Ancien bulletin du comité des arts, t. I, p. 48. Deux crois d'augives pour faire les voultes sus, avec une arche entre deux crois augiveres, J. Quicherat, Revue arch. t. VII, p. 66.

XVe s. Item, il fauldra voulter ladite tour [la tour d'Aubette à Rouen], laquelle a quinze piez de creux, et en sont les carches et fourmerès [les cherches et formerets] dejà assizes ; et y fault environ quarante piés d'augives, dont il y a environ seize piez taillez, et la clef ; et sont lesdictes ogifes chanfraintes ; et a eu ladicte voulte quatre branches d'ogives, ID. ib. p. 68. Item faut deux pilliers qui porteront trois piez de saillie, pour cuillir [recevoir] les arcs doubleaulx et les croix d'augives… item fault vaulter le premier estage à croix d'augive… item fault, pour faire les croisées d'augives, deux cens piez de pierre de ung pié carré, et huit cens pierres appelées pendans pour faire lesdites voultes, ID. ib. p. 68. Laquelle vaulsure a quatre branques, et celle ou rond de la dicte tour six branques, et ont tourné les ogives à anse de panier, Bulletin du comité, t. II, p. 64, année 1850, Compte de construction à la collégiale de Béthune. Tailler des oisives pour faire les vostes, Comptes de l'œuvre de la cathédrale de Troyes, Bibliothèque des chartes, mai-juin 1862.

XVIe s. Les maistres macons de ce royaume et aussi d'autres pays ont acoustumé de faire les voutes des esglises esquelles y a grande espace avec une croisée qu'ils appellent d'ogives, Phil. de Lorme, IV, 8. La voute est dite en cul de four rond lorsqu'elle est voutée toute ronde, sans y avoir aucuns arcs, fillets ne ogives qui la soustennent, Mathur. JOUSSE, Secrets d'architecture.

ÉTYMOLOGIE

Augive, dans Ménage ; augiva, dans du Cange, en un texte du XVIe siècle. Ménage le tire de auge : en forme d'auge. M. Renan soupçonne que dans au ou o est l'article arabe al ; mais il ne peut expliquer le reste du mot. Dans quelques provinces, la Franche-Comté par exemple, ogive a le sens d'appui, de contre-fort. M. Scheler dit, sans prendre parti, que ce mot est généralement tiré de l'allemand Auge, œil, en hollandais oog, parce que les arcs des cintres dans les voûtes gothique forment des arcs curvilignes semblables à ceux du coin de l'œil. M. Lehéricher, dans l'Avranchin, 4 déc. 1864, s'appuyant sur la forme par au, y voit un dérivé du latin augere, augmenter, cet arc en diagonale augmentant la force de la voûte et de l'arêtier. C'est la vraie étymologie ; ogis se trouve dans le sens d'appui : XIIe s. Catholicæ fidei validus defensor et ogis, Nicolas de Brai, dans J. QUICHERAT, Rev. arch. t. VII, p. 66.