« ouiller », définition dans le dictionnaire Littré

ouiller

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

ouiller

(ou-llé, ll mouillées) v. a.
  • Ajouter du vin de même origine à celui qui a diminué dans les tonneaux par l'évaporation et l'extravasement de l'écume lors de la fermentation. Un bon vigneron doit ouiller chaque matin ses tonneaux jusqu'à ce qu'il n'en sorte plus d'écume. Il y a des pays où l'on ouille tous les jours pendant le premier mois, Genlis, Maison rust. t. III, p. 291, dans POUGENS.

HISTORIQUE

XIVe s. Quant les deux tonneaux sont devalez de la nef dedens les charretes et illec aemplis et aeulliés par le marchaant, que il ne les sont depuis tenus à emplir ne euiller en meson ne en celier, Du Cange, implagium.

XVe s. Le fermier fut condempné à rendre et restituer la pipe de vin, et, se pleine n'estoit, à la voiller et emplir, Du Cange, ib. Et en pourrez tant user et si longuement vous y aouiller, que trop en avoir pris vous fera souffreteux, Chartier, Quadriloge invectif. Quand les autres sont oillez sans desserte des biens que tu cuides avoir desservis, Chartier, l'Esperance ou consolation.

XVIe s. De mois en mois on recouvrira les tonneaux, pour autant de fois les auillier ou remplir de bon vin. - Auillier les vins avec de l'eau est meilleur qu'avec du vin, tant pour le goust que pour la garde, De Serres, 217. Le vaisseau où sejournera ceste malvoisie sera bien bousché, et tous jours plein : ce qu'on fera, en le auillant souvent avec de l'hydromel, De Serres, 829. Le roi m'a tantost fait de grandes complaintes du peu d'amour et fidellité qu'il trouvoit entre les siens quoique ouillez de bienfaits, D'Aubigné, Hist. 3, 187.

ÉTYMOLOGIE

Œil, comme le dit du Cange : ouiller c'est remplir jusqu'à l'œil, jusqu'au bondon. Cette étymologie écarte le latin olla, cruche, qui convient mal aux diverses formes de ce verbe.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

OUILLER. - ÉTYM. Ajoutez : M. le docteur Olivet, de Genève, conteste que œil, indiqué par Du Cange, que le Dictionnaire a suivi, soit l'origine d'ouiller. Il dit que, dans le midi de la France et le nord de l'Italie, ouiller c'est verser sur le vin un peu d'huile pour le priver d'air, comme chez nous on remplit le tonneau avec du vin ou de l'eau pour le même objet ; que, dans le pays romand, ouille signifie huile, ouiller, huiler, et ouillère, huilerie ; et que ouiller dérive du latin oleum, huile. L'objection à cette argumentation, c'est que, dans nos contrées du moins et dans les anciens textes, ouiller a pour but non de préserver le vin du contact de l'air, mais de tenir le tonneau plein ; voy. entre autres à l'historique ce passage du XVe siècle : Le fermier fut condamné à rendre et restituer la pipe de vin, et, se pleine n'estoit, à la voiller et emplir.