« abbé », définition dans le dictionnaire Littré

abbé

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

abbé

(a-bé) s. m.
  • 1Celui qui gouverne ou possède une abbaye. Abbé crossé et mitré. Élire un abbé.

    Abbé régulier, abbé qui était religieux lui-même et portait l'habit de son ordre.

    Abbé en second, prieur d'un monastère.

    Abbé des abbés, titre de l'abbé du Mont-Cassin, parce que tous les moines de l'Occident avaient reçu leur règle de cette abbaye.

    Abbé cardinal, titre honorifique accordé par le pape, particulièrement aux abbés en chef, lorsque des abbayes qui avaient été réunies se séparaient.

    Prov. Pour un moine on ne laisse pas de faire un abbé, c'est-à-dire que l'absence d'un homme n'empêche pas un projet de s'exécuter.

    Nous l'attendrons comme les moines font l'abbé, c'est-à-dire, s'il ne vient pas à l'heure fixée, nous ne l'attendrons pas.

    Le moine répond comme l'abbé chante, c'est-à-dire les inférieurs se conforment aux habitudes de leurs supérieurs.

    Jouer à l'abbé, jeu où l'on est obligé de faire tout ce que fait celui qui a été désigné pour chef et qu'on nomme abbé.

    Se promettre la vigne de l'abbé, se promettre une vie de délices.

  • 2Tout homme qui porte un habit ecclésiastique. Un jeune abbé. Un abbé de cour. Qui peut concevoir que certains abbés, à qui il ne manque rien de l'ajustement, de la mollesse et de la vanité des sexes et des conditions, qui entrent auprès des femmes en concurrence avec le marquis et le financier, et qui l'emportent sur tous les deux, qu'eux-mêmes soient, originairement et dans l'étymologie de leur nom, les pères et les chefs de saints moines et d'humbles solitaires, et qu'ils en devraient être l'exemple ? La Bruyère, 14.

HISTORIQUE

XIe s. Assez i a evesques et abéz, Ch. de Rol. 209.

XIIe s. Donc enveia li bers au comte dous [deux] abéz, Qu'il lui doinse [donne] conduit…, Th. le Mart. 51. Quatorze rois i ot à heure de souper, Evesques et abbés, que je ne sai nomer, Sax. 13.

XIIIe s. Là trova il moult grant gent et maint abbés et maint barons et maint autres homes du païs de Bourgogne, Villehardouin, 28. La justice laie les doit penre [prendre] et rendre à lor abbés, Beaumanoir, LVI, 1. Quant evesque et abbé reviendront de signer [faire le signe de la croix], Berte, 11. Lors fu li abes molt dolent, Pleins fu de maltalent e d'ire, Grégoire le Grand, p. 44.

XVIe s. Plusieurs allans le chemin de Paris voyoient chapeaux et manteaux par terre qu'on ne daignoit amasser, les prenoient pour fils venant de St-Mathurin ou pour gens qui jouoient à l'abbé de Maugouverne, D'Aubigné, Hist. I, 134.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. abbat ; espagn. abad ; portug. abbade ; ital. abbate ; de abbatem, au nominatif abbas, du syrien aba qui signifie père. Dans l'ancien français au nominatif singulier li abe [e muet], venant de ábbas avec l'accent sur la première syllabe ; le abé, li abé, les abés [e fermé] au régime singulier, au nominatif pluriel et au régime pluriel, venant de abbátem, abbátes, avec l'accent sur la seconde syllabe.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

ABBÉ. Ajoutez :

3Nom donné autrefois aux chefs de certaines confréries d'artisans dans le Midi. Le local de la confrérie se nommait abbaye, nom qui est encore usité en Suisse, notamment à Berne.