« fracas », définition dans le dictionnaire Littré

fracas

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fracas

(fra-kâ ; l's se lie : un fra-kâ-z épouvantable) s. m.
  • 1Rupture ou fracture violente et bruyante. Les bombes ont fait un grand fracas dans la ville. Ce pont s'est entr'ouvert, a fait un grand fracas, Et dans les eaux du Tibre est tombé sous ses pas, Du Ryer, Scévole, I, 3.

    Fig. Ainsi quand vous voyez passer comme en un instant devant vos yeux, je ne dis pas les rois et les empereurs, mais les grands empires qui ont fait trembler tout l'univers ; quand vous voyez les Assyriens anciens et nouveaux, les Mèdes, les Perses, les Grecs, les Romains se présenter devant vous successivement et tomber, pour ainsi dire, les uns sur les autres, ce fracas effroyable vous fait sentir qu'il n'y a rien de solide parmi les hommes, et que l'inconstance et l'agitation sont le propre partage des choses humaines, Bossuet, Hist. III, 1. Le fracas des événements qui, de dix ans en dix ans, varient la scène du monde et qui arment puissamment les princes de l'Europe pour de petits intérêts, Voltaire, Lett. Richelieu, 25 nov. 1752.

  • 2Bruit semblable à celui d'une chose qu'on brise ; grand bruit. Avec grand bruit et grand fracas Un torrent tombait des montagnes, La Fontaine, Fabl. VIII, 23. Que le bruit, que le choc, que le fracas des armes Retentisse de toutes parts, Quinault, Cadmus, III, 6. Au bruit de la tempête, au fracas des torrents, Arnauld, Oscar, II, 2. Ils tirèrent mal, il est vrai, mais de si près, que la fumée, les feux et le fracas de tant de coups épouvantèrent les chevaux wurtembergeois et les renversèrent pêle-mêle, Ségur, Hist. de Nap. VI, 2.

    On dit qu'un orchestre fait du fracas lorsqu'il ne produit qu'un bruit sans effet.

  • 3Tout ce qui offre tumulte, désordre avec bruit. Et de son grand fracas surprenant l'assemblée, Dans le plus bel endroit a la pièce troublée, Molière, Fâcheux, I, 1. Tout ce fracas, Cet embarras Me pèse par trop sur les bras, Molière, Bourg. gentilh. V, entrée 1. Ce fut d'abord entre nous un fracas de questions sur Paris et sur Athènes, Chateaubriand, Itinér. I.

    Le fracas du monde, l'agitation de la vie du monde. Ce tourbillon qu'on appelle le monde Est si frivole, en tant d'erreurs abonde, Qu'il n'est permis d'en aimer le fracas Qu'à l'étourdi qui ne le connaît pas, Voltaire, Épît. LXIV. Loin du brillant fracas d'un monde ambitieux, Borné dans mes projets, sans désirs, sans envie, Mercure de juin 1749, p. 44.

    On dit dans un sens analogue, le fracas des villes. Le fracas des villes n'est fait que pour ceux qui ne peuvent s'occuper, Voltaire, Lett. Mme de Florian, 12 oct. 1767.

    Faire du fracas, crier bien haut, se plaindre hautement. [Il] Prétend qu'on le sépare [de sa femme] et fait bien du fracas, La Fontaine, Contr.

  • 4Il se dit, dans les compositions littéraires, et surtout dans les pièces de théâtre, de ce qui frappe l'oreille et l'esprit comme fait le fracas. Le public veut des coups de théâtre incroyables, de grands mots et du fracas, Voltaire, Lett. d'Argental, 2 mars 1766. Peut-être que l'appareil de la scène, le fracas de théâtre qui règne dans cet ouvrage, les rôles de Cicéron, de Catilina, de César, pourront frapper pendant quelques représentations, Voltaire, ib. 13 juill. 1751. Ce Gilles Shakspeare, avec toute sa barbarie et son ridicule, a des traits si naïfs et si vrais, et un fracas d'action si imposant, que tous les raisonnements de Pierre Corneille sont à la glace en comparaison du tragique de ce Gilles, Voltaire, Lett. Saurin, 28 fév. 1764.

    Terme de peinture. Multitude et confusion d'objets qui frappent et fatiguent la vue. Il a pour opposé silence.

  • 5Bruit qu'on fait dans le monde. Et lui-même ayant fait grand fracas, chère lie, Mis beaucoup en plaisirs en bâtiments beaucoup, Il devint pauvre tout d'un coup, La Fontaine, Fabl. VII, 14. Le beau Sidney, moins dangereux qu'il ne le paraissait, avait trop peu de vivacité pour soutenir le fracas dont menaçait sa figure, Hamilton, Gramm. 6. Il y avait sans doute, à la cour de ces rois comme ailleurs, de petits seigneurs très importants, faisant du fracas, Duclos, Consid. mœurs, ch. 5. Ce fracas indécent, fantôme du bonheur, Qu'une femme toujours paya de son honneur, Lanoue, Coquette, V, 3. Il demanda si on n'avait pas entendu parler de cette bande de jeunes gens qui avaient fait tant de fracas dans les environs, Voltaire, Jenni, 7.

    Il se dit, dans un sens analogue, des choses qui, attirant l'attention du public, excitent une sorte de soulèvement. Le livre de M. de Meaux fait un grand fracas ici ; on ne parle d'autre chose, Maintenon, Lett. au card. de Noailles, 29 juin 1698. Je sais fort bien que toute cette aventure fait du fracas dans votre Paris, où le beau monde veut des nouveautés, Voltaire, Lett. d'Argental, 30 janv. 1778.

ÉTYMOLOGIE

Ital. fracasso (voy. FRACASSER). Fracas paraît s'être formé de fracasser au XVIIe siècle.