« chicane », définition dans le dictionnaire Littré

chicane

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chicane

(chi-ka-n') s. f.
  • 1 Par dénigrement, procès en général. Quoi ! vous poussez cette chicane [vous poursuivez ce procès] ? Sévigné, 536. Ce meuble de chicane [un sac à procès] appartient sûrement à quelque homme du Maine ou quelque bas-Normand, Regnard, Ménechm. I, 2.
  • 2Abus des ressources et des formalités de la justice. Lui souffle avec ces mots l'ardeur de la chicane, Boileau, Lutr. I. Et dans l'amas confus des chicanes énormes, Ce qui fut blanc au fond, rendu noir par les formes, Boileau, Sat. I.
  • 3 Poétiquement, le démon des procès. Là, sur des tas poudreux de sacs et de pratiques, Hurle tous les matins une sibylle étique ; On l'appelle Chicane ; et ce monstre odieux Jamais pour l'équité n'eut d'oreilles ni d'yeux, Boileau, Lutr. v. La Chicane en fureur mugit dans la grand'salle, Boileau, Sat. VIII.
  • 4Les gens de chicane, ceux qui vivent des procès et des procédures. Je défie votre chicane de Rouen d'être plus chicane que celle de Bruxelles, Voltaire, Lett. en vers et en prose, 74.
  • 5Subtilité captieuse en toute matière, difficulté mal fondée et de mauvaise foi. Soulever, faire naître une chicane. Chercher des chicanes. Dans les livres que les anciens ont écrits de la prudence civile, il y a du galimatias de l'école et de la chicane philosophique, Guez de Balzac, Entret. 26. Ne croyez pas que ce soit seulement la querelle de l'épiscopat ou quelques chicanes sur la liturgie anglicane, qui aient ému les communes, Bossuet, Reine d'Anglet. Que dit-on pour autoriser la supposition du Pentateuque ?… Rien de suivi, rien de positif, rien d'important ; des chicanes sur des nombres, sur des lieux ou sur des noms, Bossuet, Hist. II, 13. On sera fatigué en voyant ces variations et tant de fausses subtilités de la nouvelle réforme ; tant de chicanes sur les mots ; tant d'équivoques et d'explications forcées sur lesquelles on les a fondées, Bossuet, Var. préface.
  • 6 Terme d'art militaire. Guerre de chicane, guerre où l'on ne livre que de petits combats, pour disputer le terrain.
  • 7Manière de jouer au mail, au billard et à la paume.

HISTORIQUE

XVIe s. Du plus grand chicaneur qu'on pourra jamais voir, En ce tombeau glacé gist la despouille morte ; Pluton, hoste commun, ne le veut recevoir, De peur qu'en son pays la chicane il ne porte, Des Accords, Bigarr. Epitaphes. Chicane, certain cercle fixe en terre pour y faire passer la paume, Oudin

ÉTYMOLOGIE

Wallon, chakine ; bas-grec τζυξάνιον, jeu du mail ; τζυϰανίζειν, jouer au mail. Ménage le tire de l'espagnol chico, petit ; Diez approuve cette étymologie ; et Génin, la complétant (car il faut rendre raison de chicane signifiant jeu de mail), dit que le jeu a été ainsi nommé de la petite boule qui en fait le sujet et que l'on a comparée à quelque chose de petit (chico). Mais cette étymologie ne peut se soutenir en présence du bas-grec qui vient du persan tchaugan, raquette et jeu de mail, mot qui rend raison de l'affixe ane. Dès lors la série des sens est : jeu de mail, puis action de disputer la partie, et enfin manœuvres processives.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CHICANE.
7Ajoutez : Nous y arrivâmes à travers mille boules de mail ; car on joue là, le long des chemins, à la chicane, Voy. de Bachaumont et Chapelle, p. 41, La Haye, 1714.