« cocagne », définition dans le dictionnaire Littré

cocagne

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

cocagne [1]

(ko-ka-gn') s. f.
  • Temps de réjouissance où l'on boit et mange largement. Je vois des cocagnes pour un peuple immense, des feux d'artifice…, Voltaire, Lett. à Cath. 147.

    Fig. Le gouvernement représentatif de la sorte est une cocagne, mon cousin, Courier, II, 304.

    Pays de cocagne, pays imaginaire où tout abonde, où l'on trouve tout à souhait. J'ai vu de beaux châteaux, une belle campagne. - Vous êtes, mes amis, au pays de Cocagne. - Au pays de Cocagne ! allons vite manger, Legrand, le Roi de Cocagne, I, 1. Veut-on manger, les mets sont épars dans les plaines ; Les vins les plus exquis coulent de nos fontaines ; Les fruits naissent confits dans toutes les saisons ; Les chevaux tout sellés entrent dans les maisons ; Le pigeonneau farci, l'alouette rôtie Vous tombent ici-bas du ciel comme la pluie, Legrand, ib. sc. 2. Paris est pour le riche un pays de cocagne, Boileau, Sat. VI. Ivre de champagne, Je bats la campagne Et vois de cocagne Le pays charmant, Béranger, Cocagne.

    Mât de cocagne, sorte de mât lisse et élevé, dressé dans les réjouissances publiques et portant à son sommet des objets de quelque prix qui appartiennent à celui qui peut y arriver en grimpant.

HISTORIQUE

XIIIe s. Li païs a à non coquaigne, Qui plus i dort, plus i gaaigne, Fabliaux, Barbazan, édit. MÉON, t. IV, p. 176.

ÉTYMOLOGIE

Espagn. cucaña ; ital. cuccagna. D'après Génin, Recréat. t. II, p. 89, le mot est italien et plus particulièrement napolitain, vu que, dans les réjouissances publiques, à Naples, on élevait une montagne qui lançait toute sorte de choses bonnes à manger ; il ajoute que c'est après l'expédition du duc de Guise en 1688 que ce mot fut introduit en France, et que, dans la traduction de Boccace, faite au XVIe siècle, 8e journée, 3e nouvelle, il est parlé d'un pays qui ressemble au pays de cocagne, mais qui n'est pas appelé cocagne, preuve que le mot n'existait pas encore. La preuve est mauvaise ; car le mot de cocagne et la description du pays de cocagne sont dans le fabliau cité à l'historique. Le mot est donc français, et non emprunté ; il avait même pénétré dans l'anglo-saxon, comme le montrent des vers cités par Johnson au mot cokney. D'après Diez il vient de coquere, cuire, à l'aide des mots suivants : catalan coca ; pays de Coire, cocca ; languedocien, coco ; picard, couque, qui tous signifient cuisine ; c'est là la vraie étymologie. On trouve, dans l'ancien français, cocaingne en un autre sens : Le traversiers jura seur saintes evangiles, que il n'arrestera ne fera arrester malicieusement le dit navel ou naviaux de l'Esglise dou Gart, pour cause de cocaingne, ne pour fere ennui ne domage à esciant, Du Cange, cocagium, en 1314. Ce cocaingne-là vient de coq ; c'est le combat de deux coqs.