« daigner », définition dans le dictionnaire Littré

daigner

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

daigner

(dè-gné) v. n.
  • Condescendre à, en regardant la chose comme digne de soi ou comme n'étant pas indigne. Roi, je ne puis ; prince, je ne daigne ; Rohan suis, Devise des Rohan. C'est beaucoup qu'il sorte quelquefois de ses méditations et de sa taciturnité et que, même pour critiquer, il daigne une fois le jour avoir de l'esprit, La Bruyère, V. Calliope jamais ne daigna leur parler, Boileau, Disc. au roi. Daigne-t-elle sur nous au moins tourner les yeux ? Quel orgueil ! Racine, Androm. III, 6. Heureux que sa bonté daignât tout oublier, Racine, Brit. IV, 4. Daigne, daigne, mon Dieu, sur Mathan et sur elle Répandre cet esprit d'imprudence et d'erreur, De la chute des rois funeste avant-coureur, Racine, Athal. I, 2. Hélène fut la seule de son sexe, parmi tant d'enfants de Jupiter, dont ce dieu daigna se déclarer le père, Courier, I, 24.

    Ce verbe est d'un fréquent usage à la fin des lettres, quand on écrit à un supérieur, à une personne beaucoup plus élevée en dignité. Daignez agréer mes respectueux hommages. Daignez croire à ma sincère et cordiale affection.

HISTORIQUE

Xe s. Tuit oram [prions] que por nos [elle] degnet preier, Eulalie.

XIe s. Vostre olifant soner vous ne deignastes, Ch. de Rol. LXXXV.

XIIe s. Se [vous] ne la faites douloir, Tant que [elle] desgnast de moi avoir merci…, Couci, IV. Puisque merci ne m'i daigne valoir, [je] Ne sai où nul confort [je] pregne, ib. IX. Aumosne aurez, se'l [si vous le] [mon cœur] daigniez retenir, ib. Dame, comment qu'il m'en preingne, [je] Mercie amour de ce qu'ele me deingne Tenir à sien…, ib. Se vous daigniez ma priere escouter, ib. XII. Je doi avoir grant joie en mon courage, S'ele me doigne à son oes [service] retenir, ib. XI. Certes, nenil ; ne me vint en penser Qu'onques nul jour je vous deignasse aimer, Quesnes, Romancero, p. 108.

XIIIe s. Et li rois lui otrie, nel [ne le] daigna refuser, Berte, XCVII.

XIVe s. Et afin que il fasse les gens rire, il dit teles choses que un home gracieux et vertueux ne daigneroit dire, Oresme, Eth. 178. Quant le chevalier ot [ouit] Bertran qu'ainsi parla, Il ne dist o ne non, ne parler ne daigna, Guesclin. 1782.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. doignai ; provenç. denhar, deingnar, deinar ; espagn. dignar ; ital. degnare ; du latin dignari, de dignus, digne.