« haro », définition dans le dictionnaire Littré

haro

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

haro

(ha-ro) s. m.
  • 1Terme de pratique dont on se servait pour faire arrêt sur quelqu'un ou sur quelque chose, et pour procéder sur-le-champ devant le juge.

    Clameur de haro, opposition que l'on formait. Nonobstant clameur de haro, charte normande et lettres à ce contraires, Formule qui se trouve dans tous les priviléges du roi pour imprimer.

    Fig. et familièrement. Crier haro sur quelqu'un, se récrier contre ce qu'il dit ou fait. Le bon Jean crie au meurtre, et le docteur, haro, Régnier, Sat. X. À ces mots on cria haro sur le baudet, La Fontaine, Fabl. VII, 1. Tous crient de concert haro sur le premier qui osera se moquer des sottises sur les quelles ils s'accordent, D'Alembert, Lett. à Volt. 22 fév. 1764.

    Le haro, le cri qui s'élève dans le public. Affronter le haro, l'indignation publique ! pour qui ? pour des ingrats qui vous payent d'un cordon, et disent…, Courier, Lett. particulière. La canaille [dans le royaume de Naples] est le parti du roi [le prince Bourbon chassé], et tout propriétaire est jacobin : c'est le haro de ce pays-ci, Courier, Lett. I, 66.

    Terme de droit féodal. Droit de haro, droit qui permettait au seigneur haut justicier de faire payer l'amende à ceux qui laissaient échapper un individu sur lequel on avait crié haro.

HISTORIQUE

XIIIe s. Puis escrie : haro le fu [feu] ! Cil de la vile…, Fabliaux mss. p. 147, dans LACURNE. Lors crierez harou, qu'ele vous veut meurdrir, Berte, XII. Et Blancheflors s'escrie : haro, traï, traï, ib. LXXXIX.

XIVe s. Cis rois iert Rous [Rollon, qui ravageait la Neustrie avant d'en être duc] ; pour ce crioient Normans que en son tans fuioient Droit vers Chartres comme garous, De toutes parts : ha Rous, ha Rous, Guiart, V. 4721.

XVe s. Dont ceux qui le virent commencerent à crier et à huer et à faire grand haro, Froissart, I, I, 93. Quand les nouvelles et le haro en vinrent à Landrecies, Froissart, ib. I, I, 113.

XVIe s. Nonobstant opposition ou appellations, clameur de Hâ-Raol et doleances quelconques, Édit, sept. 1561. Et en ce faisant a declaré à bonne cause le haro interjeté par ledit le Vaillant sur ledit Hais, Arrêt du parlem. de Rouen, 13 mars 1598.

ÉTYMOLOGIE

L'ancienne opinion est que haro représente ha Raoul, c'est-à-dire est un appel à Rollon, premier duc de Normandie, qui fut un grand justicier. Cette opinion était au commencement du quatorzième siècle celle de G. Guiart, qui, il est vrai, l'interprétait autrement et y voyait un cri d'effroi. Diez la condamne et dit que ha n'est pas l'exclamation qui devrait se trouver ici ; il propose l'ancien haut allemand, hera ou hara, ancien saxon, herod, qui signifie ici ; de sorte que le sens de haro serait : viens ici, viens à mon secours ; enfin herod permet d'expliquer l'ancien verbe haroder, harauder, pousser des cris ; il voit aussi, dans harlou, le simple har, ici, avec loup : ici au loup. Ces raisons plausibles ébranlent beaucoup l'ancienne étymologie. Dans les foires de Champagne, hare ! hare ! ou aré ! are ! était un cri des sergents pour annoncer que la foire était close ; en Flandre, ce cri était ara.