« ricaner », définition dans le dictionnaire Littré

ricaner

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

ricaner

(ri-ka-né) v. n.
  • Rire à demi. Cette liberté légère, réservée aux titres et aux richesses, qui fait dire une galanterie à une actrice, qui en fait chiffonner une autre, ricaner avec celle-ci, sourire avec celle-là, Marivaux, Pays. parv. 6e part. Il répète les derniers mots de ce que dit sa femme, il ricane et montre des dents qu'on aimerait autant qu'il cachât, Mme D'Épinay, Mém. t. I, p. 114, dans POUGENS.

    Rire en se moquant, rire avec mépris. Voilà-t-il pas monsieur qui ricane déjà ? Molière, Tart. I, 1. De vous on commence à ricaner beaucoup en France, Voltaire, Poés. mêl. 154. Saluer des épaules, ricaner sur un rien, débiter deux ou trois fadeurs, Legrand, Tri. du temps présent, 2e part. sc. 15.

    Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.

HISTORIQUE

XVe s. Il ouyt ricaner une beste moult laidement en maniere d'ung asne ; dont Estonne fut moult courroucié, car bien luy fut advis qu'il le mosquast, Perceforest, t. II, f° 30. Que fait chanoine qui ricanne Comme nos asnes en moustier ? Certes je croy que tout se damne ; Chascun fait contre son mestier, Deschamps, Poésies mss. f° 293.

XVIe s. Asne à longues oreilles et babines pendantes, qui, quand il ricannoit, faisoit retentir tout le voisinage, Nuits de Straparole, t. II, p. 257, dans LACURNE. Le villayn ricanne comme ung chien soubz ung huis, Palsgrave, p. 551. L'asne demeuroit derriere, qui ricquanne et prie qu'on ne le veuille laisser seul à la gueule aux loups, Merlin Coccaïe, t. II, p. 251, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. reganhar ; cat. regunyar ; espagn. regañar. Le sens propre est braire comme un âne, et montrer les dents comme un chien : de sorte que ce verbe paraît avoir une certaine analogie avec rechigner ; le fait est que Oudin dans son Dictionnaire le donne sous la forme ricagner ; il en a aussi avec l'anc. français recaner, qui a les deux sens de ricaner. Diez y voit l'équivalent du lat. cachinnare, rire à bouche ouverte, ri y étant venu à cause de l'influence de rire ; mais cela, et même le sens, fait difficulté, car ricaner n'est pas rire à bouche ouverte. Il reste fort difficile de déterminer les rapports et l'origine de rechigner, recaner et ricaner ; mais, en prenant en considération le sens, on peut conjecturer que ricaner vient de l'anc. haut-all. geinôn, ouvrir la bouche, avec re ou ri préfixe. Le bas-latin gannare, se moquer, ne va pas pour le sens ; le latin gannire, qui signifie grogner ou gémir comme un chien, n'est peut-être pas à rejeter. Le mot du Berry ricasser paraît formé de rire.