« denrée », définition dans le dictionnaire Littré

denrée

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

denrée

(dan-rée) s. f.
  • 1Toute espèce de marchandise. Denrées alimentaires. Les denrées qui sont dans les magasins. Si l'on emploie des soins dispendieux ou pénibles pour conserver une denrée plus longtemps, c'est seulement parce que l'augmentation du prix de la denrée doit récompenser de ces soins, Condorcet, Duhamel. Les essences et autres menues denrées d'amour, Hamilton, Gramm. 6.

    Denrées coloniales, productions des colonies. Elles seraient mieux nommées marchandises ou denrées équinoxiales, parce qu'elles croissent dans la zone torride et dans le voisinage des tropiques, J. B. Say, Traité, 1841, p. 231.

    C'est une chère denrée, c'est-à-dire cela est mis à très haut prix ou à trop haut prix.

    Il vend bien sa denrée, c'est-à-dire il sait se faire valoir.

  • 2Mauvaise marchandise. Il n'y a que de la denrée dans cette boutique.

    Fig. et en parlant d'un vaurien : Voilà une belle denrée !

  • 3En un sens plus restreint, toute production de la terre destinée à la vente et employée pour la nourriture. Grosses, menues denrées. Tu ne vends pas Comme tu veux tes herbes, ta denrée, Tes choux, tes aulx, enfin tout ton tracas, La Fontaine, Jum. Je ne croyais pas que les denrées fussent si chères, Maintenon, Lett. à Mme de la Viefville, 23 fév. 1709. Du gland, un navet, ou quelque autre pareille denrée, Rousseau, Ém. II.
  • 4 Marchandise mise en vente, non pour être revendue, mais pour être consommée, soit qu'elle soit destinée à la subsistance, soit qu'il s'agisse de tout autre genre de consommation ; tant qu'elle est achetée pour être revendue, elle conserve le nom de marchandise, J. B. Say, Épitome, au mot Denrée.
  • 5Nom, dans quelques provinces, d'un petit pain blanc.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et s'est trop viez li marchiés [c'est se prendre trop tard pour faire un marché], Quant on acate denrée K'uns autres a adesée, Bibl. des Chartes, 4e série, t. V, p. 337. Onques de lui [sur elle] [ils] n'aprirent maillie ne denrée [la valeur d'une maille ou d'un denier], Berte, CIV. Onques mais en ma vie n'oi [je n'eus] de joie denrée, Qui ore ne me soit à cent doubles doublée, ib. CXXVI. Et li quens lor jura que jà, ne à mort ne à vie, n'averoit denrée de sa terre ; et d'iluec en avant ot il à non Jehan-sans-terre, Chron. de Rains, 84. Et s'ai bien mengié deus denrées De novel miel en fresches rées, Ren. 10235. Se li serjans a l'administration de vendre blés, aveines, ou autres denrées, il convient qu'il conte du pris, Beaumanoir, XXIX, 14. Cil qui sunt tenu por vilain cas en prison, lor vie est establie à avoir cascun jor denrée de pain et de l'yaue, Beaumanoir, LI, 7. Je vous di bien veraiement, Il font maint mauvès serement, Et si jurent que lor denrées Sont et bones et esmerées Tels foiz que c'est mençonge pure, Rutebeuf, 223. Les gens le roy leur loerent les estaus pour vendre leur danrées chier, si comme l'en disoit, comme il porent, Joinville, 217.

XIVe s. Et telle chose avient aucune foiz en tempestes à ceux qui pour lour neif alegier jettent lour denrées en la mer, Oresme, Eth. 48.

XVe s. Ne rencherirent les vivres qu'on n'eust la denrée pour un denier, aussi bien qu'on avoit par avant qu'ils vinssent, Froissart, I, I, 32. Jusques au marché des denrées, Froissart, II, II, 54.

XVIe s. S'il sanglouttoyt, c'estoyent denrées [botte valant un denier] de cresson, Rabelais, Pant. IV, 32.

ÉTYMOLOGIE

Berry, darrée ; provenç. denairada ; espagn. dinerada ; ital. derrata ; du bas-latin denariata, la valeur d'un denier, du latin denarius, denier (voy. DENIER). Denrée a signifié primitivement ce qui vaut un denier, ce qui s'acquiert par denier, par argent.