« amortir », définition dans le dictionnaire Littré

amortir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

amortir

(a-mor-tir) v. a.
  • 1Rendre comme mort, c'est-à-dire rendre plus faible, moins vif, moins violent, moins dur. Un barrage amortissait la force du courant. Amortir un choc, une chute. Amortir l'éclat de la lumière. L'âge amortira l'ardeur des passions. L'esprit ? C'est un feu qu'une maladie et qu'un accident amortissent, Fléchier, Mont. Mille choses que le temps devrait avoir amorties, Sévigné, 26.

    En parlant des herbes, leur faire perdre leur âcreté. Amortir ou faire amortir des herbes, du céleri.

    Rendre la viande plus tendre. Certaines viandes ont besoin d'être amorties.

  • 2 En termes de finances, racheter une dette, une rente, une redevance.
  • 3Autrefois, donner aux mainmortables le droit de devenir propriétaires.

    Donner un bien sous la condition qu'on sera nourri jusqu'à la mort par le donataire.

    Dans l'ancienne jurisprudence, amortir un héritage, diminuer les droits, profits et revenus qui en dépendent.

    Amortir la foi et hommage, se faire décharger de la foi et hommage, à la charge de quelque autre redevance.

  • 4 En termes de marine, ôter à un bâtiment sa vitesse par un moyen quelconque.

    V. n. Rester échoué pendant le reflux.

  • 5S'amortir, v. réfl. Devenir amorti. Son ardeur s'est promptement amortie. Ce nectar où tes feux s'amortissent, Béranger, Bacchante.

HISTORIQUE

XIIIe s. Li cos, qui ert touz amortez, Quant il senti laschier la bouche, Bati ses eles, si s'en touche Et vint volant sur un pomier, Renart, 1686. Car ains qu'ele en poüt cheoir, Tost en porroit, sans resortir, La Rose du tout amortir, la Rose, 15628. Paor a que no Franc n'aient perdu la vie ; Poignant s'en vient aus murs de la cité antie, Nostre gent i trova dolente et amortie : Devant eus gist l'eschiele qui estoit depecie, Ch. d'Ant. VI, 814. Tel uzage qui sont amorti se passeroient par amende du meffet, Beaumanoir, XXIV, 16. Li tiers cas, qui apartient à sainte Eglise, si est de toz les biens et de toutes ammosnes qui sont données, ammosnées ou amorties, por sainte Eglise servir et soustenir, Beaumanoir, XI, 4. Tout soit li heritages venus de lor sers, ce que li serf des eglises aquierent ne demeure pas amorti as eglises, s'il n'est otroié du souverain, Beaumanoir, XLV, 33.

XIVe s. [La mort] L'assailli tellement qu'il n'ot ne cuer ne veine Qui ne fust amortis ains la sepmaine pleine, Guesclin. 22677.

XVe s. [Le maître médecin] amortit tout ou en partie le venin qu'il avoit pris et reçu, Froissart, II, II, 70.

XVIe s. Il amortit l'inimitié qu'il avoit portée contre ce duc [sa propre inimitié], Montaigne, I, 2. En moins de rien lui furent, que vuidés, que accordés, que amortis, deux ou trois cents procès, Despériers, Contes, XXXVI. Toutes ces envies, toutes ces haines et detractions à l'encontre de Marius, furent bien tost après esteinctes et amorties par le grand danger qui survint à toute l'Italie du costé du ponent, Amyot, Marius, 16. Sa gloire et son authorité s'alloit petit à petit aneantissant et amortissant par trop demourer en paix sans rien faire, Amyot, Marius, 56. La lassitude du corps amortissoit l'aise et le contentement de l'esprit, Amyot, Aratus, 27. Les privileges que quelques uns avoient de ne contribuer pas esgallement aux levées du pays, c'estoit que, par une somme une fois levée, ils vouloient amortir toutes ces choses, D'Aubigné, Hist. I, 362. Si pour telles choses les porreaux ne s'amortissoient, on les touchera d'huile de vitriol, Paré, V, 21. Quelques fois on trouve les viperes si surprises de froid qu'elles demeurent toutes amorties et immobiles, comme si elles estoient gelées, Paré, XXIII, 6. Ce qui attise ou amortit le feu, Ronsard, 820.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. émoti ; provenç. amortir, amortar, amorsar ; anc. cat. amortir ; ital. ammortire, ammortare ; de à et mort. L'ancien français avait aussi amorter.