« cajoler », définition dans le dictionnaire Littré

cajoler

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

cajoler

(ka-jo-lé) v. a.
  • 1Employer des paroles, des manières caressantes pour gagner quelqu'un. Il se porte au-devant, lui parle, le cajole, Régnier, Sat. VIII. Ce sont des contes plus étranges Qu'un renard qui cajole un corbeau sur sa voix, La Fontaine, Fab. II, 1. … Dit d'abord un ami qui veut me cajoler, Boileau, Ép. VI. L'on en sort [des boutiques de Paris] quelquefois à bon marché : une jeune marchande cajole un homme une heure entière, pour lui faire acheter un paquet de cure-dents, Montesquieu, Lett. pers. 58. Le compliment est d'un amant adroit, et vous avez entendu dire qu'il fallait cajoler les mères pour obtenir les filles, Molière, Am. magn. I, 2.
  • 2Tâcher de plaire à une femme par paroles et manières. Les coqs ne chantent point, je n'entends aucun bruit, Sinon quelques zéphyrs, qui le long de la plaine Vont cajolant tout bas les nymphes de la Seine [c'est-à-dire, caressant, frôlant les eaux de la Seine], Racan, Berg. Alcidor, I, 1. Il cajolait la jeune bachelette, La Fontaine, Cloch. Il ne cajole point sa femme, La Bruyère, 13. Va, bienheureux amant, cajoler ta maîtresse, Corneille, Médée, V, 7.

    Absolument. Tudieu ! comme avec lui votre langue cajole ! Molière, Éc. des femmes, V, 4. Et je m'assure aussi tellement en sa foi, Que, bien que tout le jour il cajole avec toi, Mon esprit te conserve une amitié si pure, Que, sans être jaloux, je le vois et l'endure, Corneille, la Suivante, II, 8.

  • 3 Terme de marine. Faire marcher un vaisseau contre le vent, en profitant d'un courant.

    V. n. Faire de petites bordées. Les brûlots ennemis ne pouvaient, en cajolant et en se laissant dériver aux courants, présenter que la proue ou la poupe aux vaisseaux français, Relation du combat de la Hougue, dans JAL.

  • 4 V. n. S'est dit du cri du geai. C'est en ce sens que Régnier l'a pris activement : Sa barbe pinçoter, cajoler la science [parler le jargon de la science].

HISTORIQUE

XVIe s. Vaut mieux, suivant le vieil usage, Un vau de vire cajoler [chanter] Que mal parler, J. le Houx, II. Quelque soupçon qu'eust cette pauvre femme, il la cajola de maniere que…, D'Aubigné, Hist. I, 33. Ils piolent comme poullets, ils cageollent comme les gays, ils cacabent comme perdrix, Paré, Animaux, 25. Je ressembleray au hibou, et croy qu'il y aura quelque gay ou meschant corbeau, ennemy de la verité et de la republique, qui me cajolleront et becquetteront, Paré, Mumie. et Lic. Dédic. Il cajolle comme une pie borgne, OUDIN.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, crajolé, cajolé, bigarré ; namurois, cajoler, enjoliver. On le tire de cageole (espagn. gayola, portug. gaiola), diminutif de cage : traiter comme un oiseau qui est en cage, ou plutôt, chanter comme un oiseau en cage et de là flatter ; car cageoler a signifié aussi chanter : cajoler un vau de vire. Mais cageole n'existe pas ou du moins n'existe que sous la forme geôle (voy. ce mot) ; cela fait difficulté. Aussi Grandgagnage pense que le mot n'a pas cette origine, à laquelle le sens du wallon ne peut s'accorder ; et qu'il faut y voir le radical jol qui est dans joli, avec un préfixe cra ou ca.