« rogaton », définition dans le dictionnaire Littré

rogaton

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

rogaton

(ro-ga-ton) s. m.
  • 1 Terme familier. Il s'est dit par plaisanterie pour requête, supplication. Scarron a fait quelques rogatons en vers : Rogaton à M. de Lionne pour être payé de sa pension.

    Un porteur de rogatons, celui qui porte des vers, des sonnets, des placets à de grands seigneurs pour tâcher de tirer d'eux quelque présent.

  • 2 Par extension, en termes de littérature, petits ouvrages de rebut. Lorsqu'à Pluton le messager Mercure Eut apporté le Banquet de Platon, Il fit venir le maître d'Épicure, Et lui dit : tiens, lis-moi ce rogaton, Rousseau J.-B. Épigr. I, 16. J'ai demandé à Marin si je pouvais vous faire tenir par lui le six et septième volume des rogatons alphabétiques [Dictionnaire philosophique] que je vous prie de mettre dans votre bibliothèque, Voltaire, Lett. d'Alembert, 14 nov. 1771. Je vous supplie, mon cher ami, de donner à Thiriot les rogatons de vers qui sont dans le paquet ; cela peut servir à sa correspondance, Voltaire, Lett. Damilaville, 9 oct. 1767.
  • 3Bruits de ville, nouvelles du jour, de peu d'importance. Vous savez comme j'aime à ramasser des rogatons pour vous divertir, Sévigné, 14 oct. 1676. Sa curiosité sera pleinement satisfaite ; il avait reçu sur ce sujet mille rogatons qui ne valaient rien, Sévigné, 4 janv. 1690.
  • 4Petites choses bonnes à manger. Te voilà ravi… d'emplir tes poches de cédrat, de pistaches et d'autres rogatons, dont tu farcis la pauvre fille, malgré qu'elle en ait, Hamilton, Gramm. 4.
  • 5Restes de viandes. Ce mendiant avait sa besace pleine de rogatons.

    Plat composé de choses qui ont déjà été servies. Il ne nous a donné à dîner que des rogatons.

    Par extension et avec un sens de dénigrement qui est le plus ordinaire. Remarquez que tous ces musiciens étrangers appelés pour enrichir le répertoire académique [de l'Opéra] nous apportaient des rogatons déjà servis sur les tables de nos voisins, Castil Blaze, Acad. de musiq. n° XIX.

HISTORIQUE

XIVe s. Jehan du Parc, lequel estoit porteur de rogaton en la cour de l'official de Coustances, Lett. de remission, dans LACURNE. Icellui bastard fist semondre par un rogaton le suppliant en l'eveschié du Mans, Du Cange, rogatum.

XVIe s. J'en reviens à ce mot, lequel appelle porteurs de rogatons ceux que Maillard nomme portatores reliquiarum et indulgentiarum et bullatores, H. Estienne, Apolog. d'Hérod. p. 65, dans LACURNE. Appelez porteurs de rogatons, pour ce qu'ils ne vivent que des aumones des gens de bien et de grammercis, H. Estienne, ib. p. 358. Saint Augustin… se complaignant d'aucuns porteurs de rogatons, qui déjà de son temps exerçoient foire vilaine et deshonneste, portant çà et là des reliques de martyrs, Calvin, Avert. sur les reliques. Cafars, cagots… papelardz… patespelues, porteurs de rogatons, Rabelais, IV, Anc. prol.

ÉTYMOLOGIE

Lat. rogatum, demande (qu'au moyen âge on prononçait rogaton), de rogare, demander. Après le sens de demande, le rogatum prit celui de ce qui était demandé, ramassé, en retour des indulgences distribuées ; et finalement il devint une chose de peu de valeur.