« canaille », définition dans le dictionnaire Littré

canaille

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

canaille

(ca-nâ-ll', ll mouillées, et non kana-ye) s. f.
  • 1Vile populace. Eh bien ! manger moutons, canaille, sotte espèce, Est-ce un péché ? La Fontaine, Fabl. VII, 1. Travailler est le fait de la canaille, La Fontaine, Papef. Où Rabelais est mauvais, il passe bien au delà du pire ; c'est le charme de la canaille, La Bruyère, 1. Les Vaudois furent appelés par Maimbourg une canaille révoltée, Voltaire, Mœurs, 138. Ceux qui daignaient acheter les suffrages de la canaille qui composait les tribus, Rousseau, Contr. IV, 2. Spectateur dédaigneux des misères de la canaille, Rousseau, Ém. IV. Sénèque, qui connaissait l'esprit de la cour, de la ville et de la canaille, Diderot, Claude et Néron. Repoussé des hommes de son rang, il se livra aux vices de la canaille, Diderot, Essai sur Claude.
  • 2 Par extension, gens, quelle que soit leur condition, dignes de mépris ; en ce sens le pluriel est usité. Ces canailles-là. Quoi ! vous continuez, canailles infidèles ! Corneille, Médée, V, 3. La canaille littéraire est ce que je connais de plus abject au monde, Voltaire, Lett. Damilaville, 24 sept. 1766. Je sais que, dès qu'on a donné un ouvrage passable, la canaille de la littérature jette les hauts cris, Voltaire, ib. 17 déc. 1766. Je veux élever Émile à la campagne, loin de la canaille des valets, Rousseau, Ém. II. C'était [MM. les chambellans], vous disais-je, une canaille qu'il fallait laisser aboyer, Courier, I, 57. M. de Monaco se commit fort mal à propos en personne avec des canailles, Saint-Simon, 84, 92.

    Par antiphrase. Je crois qu'il se contentera d'aller en paradis, et qu'il ne quittera point ces canailles chrétiennes, Sévigné, 583.

  • 3 Par badinerie, en parlant d'enfants importuns. Faites taire cette petite canaille. … Ah ! le petit babouin ! Voyez, dit-il, où l'a mis sa sottise ! Et puis prenez de tels fripons le soin ! Que les parents sont malheureux, qu'il faille Toujours veiller à semblable canaille ! La Fontaine, Fabl. I, 19.
  • 4 Populairement, il se prend comme adjectif indéclinable : des manières canaille, un propos canaille. Populairement aussi, on dit, en parlant d'un seul homme : c'est une canaille.

HISTORIQUE

XIIIe s. Du mal que nos feisons à ceste chiennaille ne prendra jà garde cil qu'il apelent Seigneur, Psautier, f° 114.

XVIe s. La reigle et police de bien vivre n'a jamais si bien esté ordonnée aux monasteres, qu'il n'y eust tousjours quelques canailles meslez parmi les bons, Calvin, Instit. 1021. Les rois aux chiens flatteurs donnent le premier lieu, Et de cette canaille endormis au milieu…, D'Aubigné, Tragiques, II, p. 57. Arriere mastins, hors de la quarrière ; hors de mon soleil, canaille au diable, Rabelais, Pant. Prol. du IIIe livre.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, chinêie ; Berry, chienaille ; ital. canaglia ; de cane, chien (voy. CHIEN). Canaille est italien ; chienaille était le mot français.