« litière », définition dans le dictionnaire Littré

litière

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

litière

(li-tiè-r') s. f.
  • 1Lit couvert porté sur deux brancards, par deux ou plusieurs chevaux ou mulets, l'un devant, l'autre derrière. Vous y allez donc en litière, quelle fantaisie ! j'ai vu que vous n'aimiez les litières que quand elles étaient arrêtées ; vous êtes bien changée, Sévigné, 48. Mme de la Fayette arriva avant-hier de Chantilly en litière ; c'est une belle allure ; mais son côté ne peut souffrir le carrosse, Sévigné, 8 juill. 1676. La duchesse était assise en une litière à six chevaux blancs, Marchangy, Tristan le voyageur, ch. 78.

    Fig. Tête-à-tête, secret, par comparaison avec le tête-à-tête d'une litière. Avez-vous jamais vu des fins et des commencements d'histoires comme celles-là [les affaires des poisons] ? il faudrait faire un petit tour en litière sur tous les événements, Sévigné, à Guitaut, 18 mai 1680. Voilà ce qui entretient mes réflexions dans ces bois où je rêve souvent ; ce serait bien une litière si nous y étions, Sévigné, 17 juill. 1680.

  • 2Chez les anciens Romains, voiture portée par des hommes. Lucile le premier… Vengea l'humble vertu de la richesse altière, Et l'honnête homme à pied du faquin en litière, Boileau, Art p. II.
  • 3Espèce de chaise à porteurs dans laquelle on s'étendait sur un matelas.
  • 4 Par extension, lit de paille ou de fourrage bien sec, placé sur le sol des écuries et étables pour protéger les animaux contre le froid, favoriser leur repos, absorber les excréments liquides, etc. Litière fraîche. Vieille litière. Elles [des mules] avaient, dans les écuries du couvent, de la litière jusqu'au ventre, Lesage, Guzm. d'Alf. VI, 1. Pour litière on ne leur donne [aux chevaux] en Perse que du sable et de la terre en poussière bien sèche, sur laquelle ils reposent et dorment aussi bien que sur la paille, Buffon, Quadrup. t. VIII, p. 64.

    Litière sautée, se dit de la litière des étables, quand on a enlevé le crottin, en la remuant avec une fourche.

    Ce cheval est sur la litière, il est malade ou estropié à ne pouvoir sortir de l'écurie. Je ne vous dirai point qu'ils [vos chevaux] sont sur la litière ; les pauvres bêtes n'en ont point, et ce serait mal parler, Molière, l'Avare, III, 5.

    Par extension. Être sur la litière, être malade au lit ou incapable d'agir par suite de fatigue ou par l'effet d'une âge avancé.

    Fig. Faire litière d'une chose, la prodiguer, la répandre avec profusion, comme on répand la litière sous les animaux. C'est un homme qui fait litière de pistoles, Corneille, Ment. IV, 7. Ce capitaine fait litière d'argent ; c'est un marquis de vingt mille livres de rente, Brueys, le Grondeur, III, 2.

    Il signifie aussi sacrifier misérablement. Faire litière de son honneur. Tout en ménageant certains termes trop grossiers pour l'honneur de l'épiscopat et des maximes du royaume, il [Fénelon] fit litière de l'un et de l'autre, Saint-Simon, 46, 29.

  • 5 Terme de magnanerie. Le résidu de la feuille non mangée et les excréments des vers.

HISTORIQUE

XIIe s. À son tinel [avec sa massue] fist de Turs tel lietiere, Que sus la terre cuert li sans com riviere, Bat. d'Aleschans, V. 6293.

XIIIe s. Que cest bois ne te soit à tousjours mais litiere [tombeau], Berte, X. Blanchefleur la royne [ils] ont en litiere mis Entre deux palefrois, ib. XCIX. Puis [ils] establerent les cevaux [chevaux] ; Moult les firent bien aaisier Et de litiere et de mangier, Fl. et Bl. 1430. Si come li rois et li archevesques de Rains s'en revenoient, si les prist maladie grans, et furent mis en litiere et furent portés jusques à Monpansier, Chr. de Rains, p. 177.

XIVe s. Aux chiens qui vienent des bois et de la chasse fait l'en lictiere devant leur maistre, Ménagier, I, 7. À mestre Girart d'Orliens, paintre, pour cause de la façon d'une litiere, De Laborde, Émaux, p. 366.

XVe s. Et leur amenoit on devant leurs hostels le foin, l'avoine et la litiere, dont ils estoient bien servis et à bon marché, Froissart, I, I, 32. Une litiere chevaucheresse que deux chevaux portoient, De Laborde, Émaux, p. 366.

XVIe s. Ceux qui ont amené ces inventions sont les courtisans, qui en portent cependant une dure penitence, n'y ayant année que telles despenses redoublées n'en envoyent une douzaine à la littiere, Lanoue, 161. Le secours de Dieu, duquel vous devez estre certains quand vous ferez litiere de vostre vie pour garder la foi inviolablement, D'Aubigné, Hist. III, 22. Depuis son jeune age il avoit fait litiere de toute crainte de Dieu, D'Aubigné, ib. III, 468.

ÉTYMOLOGIE

Berry, letière ; bourg. liteire ; prov. leisiera, littiera ; catal. llitera ; esp. litera ; du bas-latin lectaria, qui vient de lectus, lit.