« mangeur », définition dans le dictionnaire Littré

mangeur

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

mangeur, euse

(man-jeur, jeû-z') s. m. et f.
  • 1Celui, celle qui mange. Par lui [l'amour] les loups deviennent des moutons ; Il fait si bien que l'on n'est plus le même, Témoin Hercule, et témoin Polyphême, Mangeur de gens…, La Fontaine, Court. Le sens de la présence réelle nous conduit à des prodiges, à renverser les lois de la nature… à nous rendre mangeurs de chair humaine, Jurieu, dans BOSSUET 6e avert. 30. Il [un synode] conclut que la doctrine des luthériens, qu'il appelle de grossiers mangeurs de chair humaine…, Bossuet, Euchar. II, 9. Polyxène et Apicius portaient à la table bien des sensations inconnues à nous autres mangeurs vulgaires, Montesquieu, Goût, délicatesse.

    Celui, celle qui est dans l'habitude de manger beaucoup. Mme de Saint-Géran était mangeuse, aimant la bonne chère, Saint-Simon, 42, 247.

    Un gros mangeur, celui qui mange beaucoup. Un petit mangeur, celui qui mange peu. Les Grecs croyaient que les hommes des temps héroïques étaient plus grands, et Homère les fait grands mangeurs, Fleury, Mœurs des Israël. titre IV, 1re part. p. 29, dans POUGENS. Le plus plaisant c'est qu'elles s'imaginaient elles-mêmes être de très petites et très sobres mangeuses, Marivaux, Pays. parv. 1re part.

    Mangeur de pommes, se dit des Normands par plaisanterie, la Normandie abondant en pommes.

    Fig. C'est un mangeur de viandes apprêtées, se dit d'un fainéant, aimant à bien vivre sans se donner de la peine.

    On a dit dans un sens analogue : mangeur de pain mollet. Tant de fainéants soi-disant abbés et tant de mangeurs de pain mollet, Anti-Menagiana, p. 233.

    Fig. Un mangeur de charrettes ferrées, de petits enfants, un fanfaron.

  • 2 Fig. et familièrement. Un mangeur, un prodigue, un dissipateur.
  • 3 Fig. Celui qui gruge les autres, qui vit à leurs dépens, qui leur extorque leur avoir. Les partisans et autres mangeurs du peuple, Patin, Lettres, t. II, p. 404. Il leur apprit à leurs dépens, Que l'on ne doit jamais avoir de confiance En ceux qui sont mangeurs de gens, La Fontaine, Fabl. X, 4. Nous ne trouvons que trop de mangeurs ici-bas ; Les uns sont courtisans, les autres magistrats, La Fontaine, ib. XII, 13.

    Un mangeur de chrétiens, un homme qui vexe, qui tourmente les autres.

  • 4 Fig. Mangeur de livres, un homme studieux.

    Un mangeur de crucifix, un mangeur d'images, un mangeur de saints, un bigot, un faux dévot.

  • 5 Terme d'ancienne jurisprudence. Homme que la justice envoyait en garnison dans les maisons des débiteurs, pour y vivre aux frais de ces derniers, jusqu'à l'entier payement.
  • 6Mangeur de fourmis, le fourmilier. Les mangeurs de fourmis dont le corps est couvert de poils ne se trouvent que dans les parties méridionales du nouveau monde, Buffon, Quadrup. t. IV, p. 58.

    Mangeur de pierre, petit ver qui se trouve dans l'ardoise.

    Mangeur de poire, petite chenille.

    Mangeur de riz, l'ortolan riz et un gros-bec.

    Mangeur de vers, espèce de fauvette.

    Mangeur de noyaux, gros-bec.

HISTORIQUE

XIIIe s. Je ne di pas ce soient li frere prescheor ; Ançois sont une gent qui sont bon pescheor [pêcheurs], Qui prenent tel poisson dont il sont mengeor, Rutebeuf, 178.

XVIe s. C'estoit un mangeur excessif, Despériers, Contes, LXXV. Aux emprunts de ville, quand on ne paye à jour nommé ce à quoy l'on est cottizé, l'on envoye aux maisons des garnisons d'hommes que l'on appelle mangeurs, Pasquier, Lettres, t. I, p. 529. Un fierabras, un rodomont, un taillant, fendant, mangeur de charrettes ferrées, Pasquier, ib. t. I, p. 576. Les cordeliers et les autres moines ensemble, tous les mangeurs de crucifix, H. Estienne, Apol. d'Hérod. p. 331.

ÉTYMOLOGIE

Prov. manjaire, manjador ; cat. menjador ; ital. mangiatore ; voy. MANGER. Le prov. manjaire, le français mangere est le nominatif ; manjador en prov. et mangeor en français est le régime.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

MANGEUR. Ajoutez :
7Mangeur de vipères, nom d'un pitre chez deux célèbres charlatans du Pont-Neuf, l'Orviétan et Bary, du temps de la jeunesse de Molière. Tu [Molière] briguas chez Bary le quatrième emploi ; Bary t'en refusa, tu t'en plaignis à moi ; Et je m'en souviens bien qu'en ce temps-là mes frères T'en gaussaient, t'appelant le mangeur de vipères, Élomire.