« surmonter », définition dans le dictionnaire Littré

surmonter

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

surmonter

(sur-mon-té) v. a.
  • 1Franchir en montant. Les lamas surmontent des rochers escarpés où les hommes mêmes ne peuvent les accompagner, Buffon, Morc. choisis, p. 185.

    Fig. Celui qui tient ensemble les deux vérités [le libre arbitre de l'homme et la prescience de Dieu], sachant bien qu'il n'est pas ici dans le lieu d'entendre, les surmonte par la foi, Bossuet, 2e avert. 10.

  • 2Monter au-dessus. Ils recueillent sur la surface de l'eau cette huile liquide, qui, par sa légèreté, la surmonte comme nos huiles végétales, Buffon, Min. t. III, p. 14. Les eaux ont surmonté les sommets des montagnes, Raynal, Hist. phil. v, 9. Comme le flot captif qui, bouillant dans le vase, S'enfle, frémit, s'élève et surmonte ses bords, Lamartine, Harold, Déd.

    Absolument. L'huile mêlée avec de l'eau surmonte toujours.

  • 3Être placé, s'élever au-dessus d'un autre objet. Des vases surmontent les acrotères de cette balustrade. Ses yeux [de l'attagas] sont surmontés par deux sourcils rouges fort grands, Buffon, Ois. t. III, p. 372. On sait que la plupart des mines de charbon de terre sont plus ou moins surmontées par des couches de terres argileuses, Buffon, 3e ép. nat. Œuvr. t. XII, p. 153.
  • 4 Fig. Vaincre, dompter. Je veux une œuvre concevoir, Qui pour toi les âges surmonte, Malherbe, IV, 5. C'est [d'Hacqueville] un homme admirable pour surmonter les lenteurs et les difficultés par son application et sa patience, Sévigné, 23 oct. 1675. Je suis persuadé que le roi, c'est-à-dire Dieu par lui, surmontera tous ses ennemis, Sévigné, 30 mars 1689. Un petit rossignol qui s'égosille pour surmonter un homme qui joue du luth, Sévigné, 24 févr. 1672. Après que, par le dernier effet de notre courage, nous avons, pour ainsi dire, surmonté la mort, elle éteint en nous ce courage par lequel nous semblions la défier, Bossuet, Duch. d'Orléans. Je suis vaincue et surmontée par une inclination qui m'entraîne malgré moi, La Fayette, Princ. de Clèves, Œuvr. t. II, p. 155, dans POUGENS. On ne surmonte le vice qu'en le fuyant, Fénelon, Tél. VII. Ainsi la hardiesse et le travail obstiné surmontent les plus grands obstacles, Fénelon, ib. XVI. Toujours occupé ou à pleurer vos faiblesses, ou à surmonter vos remords, Massillon, Carême, Inconstance. Un sentiment plus doux s'insinua peu à peu dans mon âme, l'attendrissement surmonta le désespoir ; je me mis à verser des torrents de larmes, Rousseau, Hél. IV, 17. Elle surmonta sa timidité naturelle en faveur de son neveu, Diderot, Claude et Nér. I, 14.
  • 5Dépasser, surpasser. Lirez-vous, sans rougir de honte, Que notre impiété surmonte Les faits les plus audacieux ? Malherbe, II, 4. Quelle neige a tant de blancheur Que sa gorge ne la surmonte ? Malherbe, V, 18. Je ne trouve pas moins en petit une espèce d'infini qui m'étonne et qui me surmonte, Fénelon, Exist. I, 21.
  • 6L'emporter sur, avoir l'avantage sur. Si elle [la France] ne saurait souffrir d'être surmontée en valeur et en adresse par une nation étrangère, souffrira-t-elle de l'être en vertu et en générosité ? Le Maistre, Plaidoyer 36. Elle [la volonté] s'enveloppe elle-même dans son propre ouvrage, comme un ver à soie ; et, si les lacets dont elle s'entoure semblent de soie par leur agrément, ils ne laissent pas toutefois de surmonter le fer par leur dureté, Bossuet, 4e sermon, Circoncision, 2. Un Rhodien d'environ trente-cinq ans surmonta [à la lutte] tous les autres qui osèrent se présenter à lui, Fénelon, Tél. v. N'avez-vous pas cru que Pompée mettrait Rome dans la servitude, s'il surmontait César ? Fénelon, Dial. des morts anc. Dial. 40. Soudain le pasteur [Jacob] se dégage Des bras du combattant des cieux, L'abat, le presse, le surmonte, Et sur son sein gonflé de honte Pose un genou victorieux, Lamartine, Médit. II, 6.

    Absolument. La pensée qu'on préfère quelqu'un, la crainte de n'être pas aimée, l'envie de surmonter, cela fait un mélange de diverses passions, Sévigné, 3 juill. 1680.

  • 7Accabler par surabondance. La sueur nous surmontait, Sévigné, 6 août 1680. Je ne vois point d'ici ce qu'est devenue toute cette presse [foule de visiteurs] qui surmontait votre château, Sévigné, 15 sept. 1680.
  • 8Causer un sentiment d'angoisse. Vous restez là muets, la rougeur vous surmonte, Dufrény, Réconc. norm. III, 4. Ce trouble affreux qui vous surmonte, Genlis, Théât. d'éduc. Portrait, I, 7.
  • 9Se surmonter, v. réfl. Maîtriser ses penchants. À peine se sont-ils [les mondains] surmontés sur un point, qu'une nouvelle difficulté les lasse et les abat, Massillon, Profess. relig. Serm. 1. Qui ne sait pas se surmonter, qui n'a pas la force en partage, ne peut posséder que des vertus imparfaites et fragiles, Genlis, Vœux témér. t. I, p. 248, dans POUGENS.

HISTORIQUE

XIIe s. E quel part qu'il se tournout, ses adversaires surmontout, Rois, 52. Moult fu por lui [son tinel, sa massue] Renoars sormontez [glorifié], Par toute France cremuz et redoutez, Bat. d'Aleschans, V. 7008.

XIIIe s. Et li quens de St Pol sourmonta l'ost, et les prist par deriere, et se feri entre aus [eux] come lions famelleus, Chr. de Rains, 150. Autant cum par sa grant valor Soit de clarté, soit de chalor, Sormonte li solaus la lune, la Rose, 12019. Et se le numbre est d'une part et d'autre yves [égal], la dignité sormonte, Liv. de just. 35.

XIVe s. Concupiscence et mauvais desirs surmon tés et vaincus par abstinence, Oresme, Éth. v.

XVe s. Et seroient si hauts [les engins] qu'ils surmonteroient les murs du chasteau, Froissart, I, I, 262.

XVIe s. Pour ce que ceste pensée surmonte en leur esprit, qu'ils ont Dieu present, qui a le soin de leur salut, la crainte est veincue par telle asseurance, Calvin, Inst. 438. L'effect surmonte de si loing la pensée, que…, Montaigne, I, 81. Je veulx que les choses surmontent, de façon que celuy qui escoute n'aye aulcune souvenance des mots, Montaigne, I, 191. Les difficultez et mesayses qu'ils eurent à surmonter, Montaigne, I, 261. Ils [les Romains] laissoient les roys qu'ils avoient surmontez, en la possession de leurs royaumes, Montaigne, III, 104. M. de Vieilleville, surmonté de colere, se rue dessus…, Carloix, IV, 32.

ÉTYMOLOGIE

Sur 1, et monter ; provenç. sobremontar ; ital. sormontare.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SURMONTER. Ajoutez :
10Se surmonter, se surpasser, faire plus qu'on ne fait d'habitude. Le luxe, qui d'un siècle à l'autre cherche quelque nouvelle invention de se surmonter, Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne. Il faut prendre Fontarabie à quelque prix que ce soit… surmontez-vous, je vous supplie ; si j'étais aussi robuste que le courrier que je vous envoie, je serais, en sa place, porteur de ma propre dépêche, Richelieu, Lettres, etc. t. VI, p. 170 (1638). Je vous écrivis pour vous conjurer de faire l'impossible pour grossir les troupes qui doivent entrer en Catalogne… cette affaire est de telle importance et la promptitude si nécessaire, que je m'assure que vous vous surmonterez vous-même en cette occasion, ID. ib. p. 734 (1640).